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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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laine dans l’alun, puis ajouter la
garance, mais ne pas faire bouillir à nouveau. En revanche, il convenait
d’employer un troisième élément : de l’eau de chaux. Le résultat obtenu
dépassait toutes les espérances de Caris : un rouge éclatant, presque
identique au rouge des Italiens. Elle n’en croyait pas ses yeux ! Las, ce
rouge allait certainement déteindre, lui procurer une nouvelle déception. Mais
la couleur ne vira pas en séchant. Elle supporta parfaitement un nouveau lavage
et même un second foulage.
    Elle transmit la formule à Pierre qui, sous sa surveillance
attentive, utilisa tout le reste d’alun pour teindre dans l’une de ses cuves
géantes neuf aunes d’un lainage tissé à partir de laine de qualité supérieure.
Une fois le tissu foulé, Caris paya un finisseur pour l’ébarber à l’aide de cette
petite fleur sauvage qui s’accroche aux vêtements et pour réparer certains
petits défauts.
    Et ce fut, lestée de sa balle d’un rouge lumineux et
parfait, qu’elle se rendit à la foire de Saint-Gilles.
    Comme Caris déroulait son lainage sur l’étal, un homme à
l’accent londonien lui en demanda le prix.
    Elle l’examina. Ses vêtements étaient coûteux, mais sans
ostentation. À défaut d’être noble, il devait être riche. Masquant de son mieux
le tremblement de sa voix, elle répondit : « Sept shillings le yard.
C’est la plus belle qualité...
    — Non ! Je voulais dire : combien la balle
entière ?
    — Elle fait douze yards, messire, ce qui fait donc
quatre vingt-quatre shillings. »
    Il frotta le tissu entre son pouce et son index. « Il
n’est pas aussi serré que le lainage italien, mais il n’est pas mal. Je vous en
donnerai vingt-sept florins d’or. »
    Les pièces d’or de Florence servaient couramment de monnaie
d’échange, car l’Angleterre ne frappait pas de monnaie en or. Un florin
équivalait peu ou prou à trois shillings, soit trente six pennies d’argent. Le
Londonien lui proposait donc d’acheter la balle entière pour seulement trois
shillings de moins qu’elle en aurait tiré en vendant le tissu au détail.
Devinant qu’il n’était pas homme à marchander, car sinon il en aurait proposé
un prix moindre, elle refusa, s’émerveillant de sa témérité.
    « Bien », dit-il sans hésiter, lui confirmant
ainsi qu’elle pouvait se fier à son instinct. Elle le regarda sortir sa bourse
en frémissant. Un instant plus tard, elle tenait dans sa main vingt-huit
florins.
    Elle en prit un et le retourna entre ses doigts. Il était un
peu plus grand qu’un penny d’argent. Sur une face était gravée l’image de saint
Jean-Baptiste, le patron de Florence, sur l’autre une fleur, symbole de la
ville. Elle la déposa sur le plateau d’une balance pour comparer son poids à
celui d’un florin frappé récemment que son père conservait spécialement à cette
intention. La pièce du Londonien était bonne.
    « Merci, dit-elle, osant à peine croire à son succès.
    — Je m’appelle Harry Lemarchand, de Cheapside, à
Londres, dit-il. Mon père est le plus grand marchand de tissu d’Angleterre.
Quand vous aurez encore de cette écarlate, venez nous voir à Londres. Nous vous
achèterons tout ce que vous pourrez nous apporter. »
    *
    « Tissons toute la laine invendue ! dit-elle à son
père, une fois de retour à Kingsbridge. Il nous reste quarante sacs de laine.
    Transformons tout en étoffe rouge.
    — C’est une grande entreprise », dit-il
pensivement.
    Caris était certaine de son succès. « Il y a des
quantités de tisserands, et ils vivent tous misérablement. De plus, Pierre
n’est pas le seul teinturier en ville. On peut enseigner aux autres comment
utiliser l’alun.
    — Et si ton secret est connu, tout le monde te
copiera ! »
    Il avait raison de se faire l’avocat du diable, mais ses
objections ne calmaient pas Caris. Elle bouillait d’impatience de se mettre à
l’ouvrage.
    « Qu’ils nous copient ! Qu’ils gagnent de
l’argent, eux aussi.
    — Dès qu’il y aura abondance de tissu, le prix chutera,
dit-il encore, ne voulant pas se laisser entraîner dans une aventure.
    — Ce n’est pas demain la veille que cette affaire
cessera d’être profitable. »
    Il hocha la tête. « C’est vrai. Mais pourras-tu en
vendre une telle quantité ? Les gens riches ne sont pas légion à Shiring
ou ici.
    — Alors je l’emporterai à Londres.
    — D’accord, admit-il avec un sourire. Je

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