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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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certainement quelque chose pour
que ce soit aussi lumineux ?
    — De l’alun, ce n’est pas un secret. Ça rend les
couleurs plus éclatantes, et ça les fixe aussi. Elles ne se fanent pas. Un
manteau de cette teinte serait magnifique sur vous, un bonheur éternel.
    — De l’alun, répéta-t-elle. Pourquoi les teinturiers
d’ici n’en utilisent-ils pas ?
    — C’est très cher. Ça vient de Turquie. C’est un luxe
que seules certaines femmes peuvent se permettre.
    — Et ce bleu, d’une couleur si profonde ?
    — Comme vos yeux. »
    Elle avait les yeux verts, mais ne le corrigea pas.
    « Les teinturiers anglais emploient la guède ;
nous, de l’indigo qui vient du Bengale. Les commerçants maures vont le chercher
aux Indes et l’apportent en Égypte où nos marchands italiens l’achètent à
Alexandrie... Vous imaginez tout le chemin parcouru pour satisfaire votre
beauté exceptionnelle ?
    — Oui, dit Caris. Je m’en faisais justement la
réflexion. »
    *
    Pierre le Teinturier avait pour atelier un hangar au bord de
la rivière, aussi vaste que la demeure d’Edmond. C’était un bâtiment en pierre
composé uniquement de murs extérieurs, sans cloisons ni plancher. Deux feux
immenses brûlaient sous deux chaudrons flanqués chacun d’une grue semblable à
celle que Merthin avait fabriquée pour le toit de l’église Saint-Marc. Ces
grues servaient à soulever les énormes sacs de laine ou de tissu pour les
déposer dans les cuves. Le sol était toujours trempé, de sorte que les
apprentis travaillaient pieds nus, vêtus de leurs seules culottes à cause de la
chaleur. Dans cette atmosphère opacifiée par la vapeur, l’humidité faisait
briller leurs cheveux et leurs visages dégoulinant de sueur. L’âcre odeur des
lieux prit Caris à la gorge.
    Elle montra à Pierre son rouleau de tissu invendu. « Je
voudrais un écarlate semblable à celui des tissus italiens. C’est ce qui se
vend le mieux. »
    Peter hocha la tête avec accablement. De tempérament
maussade, il prenait un air blessé quoi qu’on lui dise. Pour l’heure, il
affichait la mine d’un homme victime d’une injustice. « Nous le teindrons
avec de la garance.
    — Et avec de l’alun, s’il vous plaît, pour fixer la
couleur et la rendre plus éclatante.
    — Nous n’employons pas ce produit. Nous n’en avons
jamais employé. D’ailleurs, je ne connais personne qui en fasse usage. »
    Caris se maudit intérieurement de n’avoir pas pensé à se
renseigner plus avant. Elle avait supposé qu’un teinturier saurait tout ce
qu’il convenait de savoir sur les colorants. « Pouvez-vous essayer quand
même ?
    — Je n’en ai pas. »
    Caris soupira. Pierre, manifestement, était de ces artisans
pour qui toute chose est impossible s’ils ne l’ont pas déjà faite auparavant.
« Imaginons que j’arrive à en trouver.
    — Où ça ?
    — À Winchester, je suppose, ou à Londres. Ou peut-être
à Melcombe. » C’était le grand port le plus proche. Des bateaux y
accostaient de toute l’Europe.
    « Même si j’en avais, je ne saurais pas comment
l’utiliser.
    — Vous ne pouvez pas vous renseigner ?
    — Auprès de qui ?
    — Eh bien, j’essaierai de mon côté. »
    Il secoua la tête d’un air pessimiste. « Je ne sais
pas...»
    Elle n’avait pas envie de se disputer avec lui, c’était le
seul teinturier en ville qui travaillait à grande échelle. C’est pourquoi elle
dit sur un ton conciliant : « Je ne vais pas prendre plus de votre
temps. De toute façon, d’ici à ce que je trouve de l’alun, le pont aura été achevé
depuis belle lurette. »
    Sur ces mots, elle partit. Qui, en ville, était susceptible
d’avoir de l’alun ? Quelle bêtise de ne pas avoir posé plus de questions à
Loro le Florentin ! Les moines devaient certainement savoir des choses
comme celles-là, mais ils n’étaient plus autorisés à parler aux femmes. Elle
décida d’aller trouver Mattie la Sage. La guérisseuse utilisait toutes sortes
d’ingrédients pour ses mixtures. Elle se servait peut-être d’alun. En tout cas,
et c’était le plus important, elle ne prétendrait pas savoir de quoi il
s’agissait si elle l’ignorait, à la différence d’un moine ou d’un apothicaire
qui inventerait n’importe quoi de peur de paraître idiot.
    Mattie l’accueillit par ces mots : « Comment va
ton père ? » Une fois de plus, constata Caris, Mattie devinait
toujours ce qui la

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