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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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pas de loup, saisissant le bougeoir
au passage. Ayant poussé la porte tout doucement, il découvrit, à la lumière
vacillante de son lumignon, sa jeune épouse endormie. Elle était si jolie avec
ses longs cheveux épars sur l’oreiller, si innocente, qu’il ressentit soudain
un élan de tendresse et il dut se rappeler combien il la haïssait de faire
obstacle à ses ambitions.
    Couché près d’elle dans un berceau, Gerry dormait à poings
fermés, la bouche ouverte.
    Ralph s’approcha lentement. D’un geste vif, il plaqua la
main sur la bouche de Tilly l’éveillant en sursaut. Les yeux écarquillés, elle
le fixa avec terreur.
    Ralph posa le bougeoir. Il avait toujours dans ses poches
une quantité de petites choses utiles, comme des liens en cuir et des bouts de
chiffon. Il en enfonça un dans la bouche de Tilly pour l’empêcher de crier. Il
n’avait pas prononcé un mot, pourtant il avait l’impression qu’elle l’avait
reconnu malgré sa cagoule et son gant. Peut-être l’avait-elle identifié à son
odeur, comme les chiens. Quelle importance ! Elle n’aurait pas l’occasion
de parler.
    Il lui lia les mains et les pieds avec ses lanières. Elle ne
se débattait pas encore, mais cela n’allait pas tarder. Ayant vérifié la
solidité du bâillon, il s’assit et attendit.
    L’écho des Psaumes lui parvenait, porté par un puissant
chœur de femmes et quelques voix masculines qui suivaient péniblement. Tilly le
regardait avec de grands yeux implorants. Il la tourna sur l’autre flanc pour
ne plus voir son visage.
    Dès le début, elle avait su qu’il voulait la tuer. Elle
l’avait lu dans ses pensées. Ce devait être une sorcière. Peut-être toutes les
femmes étaient-elles des sorcières. Quoi qu’il en soit, elle avait deviné ses
intentions dès l’instant où le projet s’était formé dans son esprit. Elle
s’était mise à le surveiller, le soir surtout : elle suivait d’un œil
craintif ses moindres déplacements, ses moindres gestes. La nuit, allongée à
côté de lui, elle demeurait tendue, les sens en alerte, jusqu’à ce qu’il
s’endorme ; le matin, elle était invariablement levée quand il se
réveillait. Et, un beau jour, elle avait disparu. Il l’avait cherchée avec Alan
sans succès, jusqu’à ce que des rumeurs lui apprennent qu’elle avait trouvé
refuge au prieuré de Kingsbridge.
    Ce qui, par un heureux hasard, s’accordait parfaitement avec
ses plans.
    Gerry émit de petits bruits dans son sommeil. L’idée qu’il
pouvait se mettre à pleurer traversa soudain l’esprit de Ralph. Que faire si
les religieuses revenaient de la cathédrale juste à ce moment-là ? L’une
ou l’autre viendrait certainement voir si tout allait bien. Dans ce cas-là, il
emploierait les grands moyens, se dit-il. Ce ne serait pas la première fois
qu’il tuerait des bonnes sœurs. Il s’était fait la main en France.
    Enfin, il entendit des pas étouffés fouler le sol du
dortoir : les religieuses remontaient se coucher. Alain devait les compter
depuis la cuisine, au fur et à mesure qu’elles passaient devant lui. Quand
elles seraient toutes dans le dortoir, ses hommes entreraient en scène, armés de
leurs épées. Ralph mit Tilly debout sur ses jambes. Son visage ruisselait de
larmes. La retournant dos à lui, il passa le bras autour de sa taille et la
souleva sur sa hanche. Elle était aussi légère qu’une enfant.
    Il dégaina son poignard.
    Derrière la porte, il entendit un homme lancer :
« Silence, ou vous mourrez ! » Il reconnut la voix d’Alan, bien
qu’étouffée par la cagoule.
    Il retint son souffle. Surtout, ne pas alerter les sœurs qui
veillaient les malades à l’hospice ou les moines qui venaient de regagner leur
dortoir.
    Des cris de surprise et de peur retentirent malgré
l’avertissement. Pas assez forts pour les mettre en danger, jugea Ralph.
    Jusque-là, tout allait bien.
    Ouvrant la porte à toute volée, il s’avança dans le dortoir,
portant Tilly sur la hanche.
    La pièce étant à présent éclairée par les lanternes des
religieuses, Ralph vit qu’Alan avait empoigné l’une d’elles et la maintenait
plaquée contre lui, le couteau sur la gorge. Deux mercenaires se tenaient à
côté de lui ; les deux autres devaient monter la garde au pied de
l’escalier.
    « Écoutez-moi ! » dit Ralph.
    Reconnaissant sa voix, Tilly se tordit sur sa hanche. Ralph
ne s’en soucia pas : personne d’autre ne pouvait

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