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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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la famille avait besoin de se sustenter en prévision du labeur à venir.
Elle posa sur la table du mouton froid, du pain, du beurre et de la bière bien
forte. Sam, qui avait dix ans, était déjà debout, mais David, qui n’en avait
que huit, dormait encore. Comme tous les matins, Gwenda dut le tirer du lit.
    « Cette tenure est bien trop grande pour être exploitée
par un homme et sa femme, grommela-t-elle comme ils étaient attablés devant le
petit déjeuner.
    — Nous n’étions aussi que tous les deux l’année où le
pont s’est écroulé, répliqua Wulfric d’une voix joyeuse. On a quand même réussi
à rentrer la moisson en temps voulu. »
    Son optimisme était irritant.
    « J’avais douze ans de moins, à l’époque.
    — Tu es plus belle maintenant. »
    Gwenda n’était pas d’humeur à écouter des galanteries.
    « Quand ton père et ton frère étaient encore de ce
monde, vous engagiez des journaliers à la moisson.
    — Cette terre est à nous, désormais, c’est la seule
chose qui compte. Nous y avons semé le blé et nous profiterons de la récolte au
lieu d’être payés un malheureux penny par jour. Plus nous travaillerons, plus
nous prospérerons. N’est-ce pas ce que tu as toujours voulu ?
    — J’ai toujours voulu être indépendante, si c’est ce
que tu veux dire. »
    Elle alla jusqu’à la porte et regarda le ciel. « Vent
d’ouest, annonça-t-elle. Il y a des nuages.
    — Il ne faudrait pas qu’il pleuve avant deux ou trois
jours, dit Wulfric d’un air inquiet.
    — Je pense que ça ira. Allons, les garçons ! Il
est temps de partir. Vous mangerez en route. »
    Elle était en train de glisser un pain et de la viande dans
un sac pour leur repas de midi quand la silhouette boiteuse de Nathan le Bailli
s’encadra dans la porte. « Oh non ! s’écria-t-elle. Pas
aujourd’hui... Nous avons presque fini de rentrer la moisson !
    — Le seigneur doit rentrer la sienne », dit
Nathan.
    Il était accompagné de son fils de dix ans, Jonathan,
surnommé Jonno, qui se mit immédiatement à faire des grimaces à Sam.
    « Accorde-nous trois jours de plus sur notre terre,
implora Gwenda.
    — Inutile de discuter ! dit Nathan. Vous devez au
seigneur un jour de travail par semaine. Deux pendant les moissons. En
conséquence, aujourd’hui et demain, vous irez récolter l’orge au Champ du ruisseau.
    — Le deuxième jour fait l’objet d’une dispense depuis
des lustres.
    — Cette dispense date de l’époque où la main-d’œuvre
était abondante. Aujourd’hui, il y a pénurie ! Avec tous ces serfs qui lui
ont extorqué des tenures libres, le seigneur n’a quasiment plus personne pour
rentrer sa moisson.
    — Autrement dit, ce sont les gens comme nous, ceux qui
n’ont pas discuté les conditions, qui n’ont pas exigé d’être relevés des
obligations coutumières, qui se retrouvent punis et forcés de travailler deux
fois plus sur les terres domaniales ? » s’indigna Gwenda.
    Elle lança un regard accusateur à Wulfric. Elle ne lui
pardonnait pas d’avoir ignoré ses conseils quand elle l’avait supplié de
négocier l’accord avec Nathan.
    « Si on veut, répondit Nathan avec indifférence.
    — Par l’enfer ! s’exclama Gwenda.
    — Ne jure pas ! Le seigneur offre le déjeuner. Il
y aura du pain complet et un tonneau de bière fraîche. Tu ne vas pas me dire
que ce n’est pas tentant !
    — Le seigneur nourrit la bête qu’il s’apprête à faire
crever sous lui.
    — Hâtez-vous, maintenant ! » cria Nathan et
il tourna les talons.
    Son fils tira la langue à Sam, qui se jeta sur lui pour
l’empoigner. Mais Jonno parvint à lui échapper et courut se réfugier près de
son père.
    D’un pas lourd, Gwenda et les siens traversèrent les champs
pour se rendre à l’endroit où l’orge du seigneur ondulait sous le vent. Ils se
mirent au travail. Wulfric fauchait, Gwenda ramassait les épis, et Sam marchait
derrière elle, récupérant ceux qu’elle avait laissé tomber pour en former aussi
une gerbe. Lorsque sa botte était assez grosse, il la tendait à sa mère pour
qu’elle la noue à l’aide d’un de ces liens solides que David avait tressés de
ses petits doigts agiles à partir de brins d’orge. D’autres serfs travaillaient
à leur côté, des serfs qui, comme eux, avaient préféré rester liés au seigneur
plutôt que de réclamer la liberté, à l’instar de ceux, plus malins, qui
moissonnaient à présent

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