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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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printemps, il faudrait à nouveau labourer et
semer, et les mêmes difficultés ressurgiraient. Les serfs recommenceraient à se
mutiner pour obtenir des salaires plus élevés et, si Ralph refusait de les
satisfaire, ils s’enfuiraient pour aller travailler chez d’autres seigneurs,
beaucoup trop dépensiers et complètement irresponsables.
    Cette situation n’avait que trop duré. Il devait en parler
avec son jeune voisin de table, le comte de Monmouth, lui faire comprendre que
la seule façon pour les nobles de mettre un terme à ce chaos, c’était de faire
front commun en résistant systématiquement aux demandes d’augmentation de
salaire et en refusant d’embaucher des serfs en fuite.
    Voilà ce que Ralph aurait aimé expliquer à David. Hélas, le
jeune homme ne semblait guère disposé à lui accorder son attention. Il
paraissait s’intéresser davantage à Odila, assise en face de lui, et qui était
à peu près de son âge. Ralph se dit qu’ils s’étaient certainement déjà
rencontrés, sans doute lors d’un dîner donné par l’ancien comte de Monmouth,
que Philippa et son premier mari, le comte William, fréquentaient beaucoup, à
l’époque où David était son écuyer. Quoi qu’il en soit, on sentait que les deux
jeunes gens s’appréciaient : David parlait avec animation et Odila,
suspendue à ses lèvres, acquiesçait à tous ses propos, s’émerveillant de ses
histoires et riant avec grâce à ses plaisanteries.
    Ralph avait toujours rêvé de fasciner les femmes.
Malheureusement, il ne possédait pas cette faculté, contrairement au jeune
comte de Monmouth et à son frère qui, malgré sa petite taille, sa tignasse
rousse et sa physionomie ingrate, séduisait sans effort les plus belles d’entre
elles.
    À cet égard, Ralph enviait Merthin ; pour le
reste, il le plaignait. Depuis le jour où le comte Roland l’avait condamné à
devenir charpentier, il n’avait jamais pu s’élever dans le monde. Pour l’heure,
assis de l’autre côté du comte David, il n’avait pour se consoler que son
charme et son titre de prévôt de la guilde.
    Ralph, lui, n’arrivait même pas à séduire sa propre épouse.
Dame Philippa lui adressait à peine la parole. Elle avait pour lui moins
d’attentions que pour son chien.
    Comment pouvait-il l’avoir désirée aussi ardemment pendant
tant d’années, et être aussi peu satisfait ? Il avait passé treize ans de
sa vie à soupirer pour elle. Aujourd’hui, après trois mois de mariage, il
aurait tout donné pour en être débarrassé.
    Pourtant, il n’aurait pu formuler un seul reproche à son
encontre. Philippa se comportait en épouse modèle. Elle dirigeait le château
avec le même savoir-faire que du vivant de son premier mari : les
commandes étaient passées, les factures payées, la garde-robe du comte sans cesse
enrichie ; un feu brûlait toujours dans la cheminée, et les mets et les
vins arrivaient sur sa table sans faillir. Elle se soumettait même à son désir
physique. Il pouvait lui faire tout ce qu’il voulait : déchirer ses
vêtements, enfoncer dans sa fente ses doigts impatients, la prendre debout ou
par-derrière : jamais elle ne protestait.
    Mais elle ne lui rendait pas ses faveurs. Ses lèvres ne
s’émouvaient pas contre les siennes, sa langue ne se glissait pas dans sa
bouche, ses doigts ne caressaient pas sa peau. Quand il voulait coucher avec
elle, elle lubrifiait son sexe mort avec quelques gouttes d’huile d’amande dont
elle gardait toujours une fiole à portée de la main, et elle le laissait
grogner au-dessus d’elle, immobile comme un cadavre. Dès qu’il roulait sur le
côté, elle allait procéder à ses ablutions.
    Le seul réconfort que trouvait Ralph à cette union, c’était
la façon dont Odila prenait soin de Gerry. Le petit stimulait son instinct
maternel naissant, et elle adorait babiller avec lui et le bercer en chantant
pour qu’il s’endorme. Elle lui procurait une affection qu’il n’aurait jamais
reçue d’une nourrice.
    Mais Ralph avait tout de même des regrets. Les formes
voluptueuses de Philippa, qui l’avaient naguère rendu fou de désir,
n’éveillaient plus en lui que du dégoût. Il ne l’avait pas touchée depuis des
semaines, et ne la toucherait sans doute plus jamais.
    À la vue de ses seins lourds et de ses hanches rondes, il
repensait avec nostalgie au corps svelte, à la peau d’enfant de Tilly. Tilly,
qu’il avait poignardée, perçant sa frêle

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