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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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vent des recherches de Cros, soit venu à Paris pour le rencontrer, l'ait fait boire, ce qui n'était pas difficile, parler, ce qui était aussi facile, et lui ait dérobé son invention. Légende vraiment ? » Très honnêtement, l'académicien ajoute, rendant à Edison ce qui est censé lui revenir : « […] les traces de son passage à Londres, la même année, portent témoignage qu'il était parvenu, lui aussi, à la solution ».
     

5.
     
    La mort, conduisant une rafle barbare, avait fait le vide autour de lord Pacal Desteyrac, sixième baronet Cornfield. Charles, lady Ottilia et Uncle Dave avaient, avant Susan, été exclus à jamais du cercle familier.
     
    Désemparé, le seigneur de Soledad espérait trouver une amère consolation dans le fils que lui avait légué son épouse. Il ne savait encore rien de cet enfant, confié à une nourrice irlandaise par le professeur Collins. Car la vie exige qu'on l'abreuve de lait, dès le premier jour.
     
    « La mort d'un proche ou d'un ami est, déjà, un peu la nôtre », avait dit Thomas Artcliff, avant de regagner New York. Ce matin-là, Pacal ressentit physiquement la véracité de ces mots quand, à l'heure du rasage, le miroir lui montra, aux tempes, ses premiers cheveux blancs. À trente-sept ans, Pacal prit conscience de l'accélération de la marche du temps et connut l'étrange sensation d'avoir déjà vécu plusieurs vies.
     
    L'attitude des Buchanan ajoutait au désarroi d'un homme auquel son grand-père et son père avaient transmis assez de force morale pour dominer, avec détermination, toutes les situations, bonheurs, déceptions ou deuils. Les Cornfield et les Desteyrac ne sacrifiaient pas longtemps à l'apitoiement sur soi.
     
    Dès la mise au tombeau de sa femme, il avait subodoré que tante Maguy et ceux dont elle influençait, depuis toujours, la conduite, lui imputaient la mort de Susan. Sans le formuler autrement que par des soupirs, suivis de silences, et des regards délateurs, tous exprimaient le même reproche muet. Ils étendaient même cette culpabilité à l'innocent nouveau-né en affichant une indifférence mesquine à son sort. Pour eux, l'enfant avait tué la mère. Bien que le professeur Collins, interrogé par Arnold, eût exclu tout rapport direct entre l'accouchement et la fatale crise d'éclampsie, les Buchanan ne changeraient pas d'opinion : Pacal, le Bahamien dont le sang indien n'avait pas supporté l'abstinence, restait l'instigateur lubrique du meurtre de Susan, et son fils George, le butin de ce crime.
     
    Devinant qu'un jour ou l'autre cette accusation serait jetée au visage du lord, Collins, prenant Pacal à part, avait été clair. « Aussi étrange que cela paraisse, votre femme est morte de peur. Ce sont ses craintes, son angoisse, entretenues par ce dragon de Maguy Metaz O'Brien après ma banale mise en garde, qui ont déclenché la crise d'éclampsie. J'ai connu plusieurs cas semblables. L'accouchement se passe bien et, soudain, les frayeurs et les appréhensions, bien que devenues vaines, ressurgissent, s'imposent et provoquent ce qui avait été redouté. Nous commençons seulement à percevoir combien la pensée peut influencer les réactions du corps. Un médecin français, Jean Martin Charcot, mort l'an dernier, a démontré que des paralysies peuvent, chez certains patients, être provoquées par simple suggestion », avait conclu le praticien.
     
    Errant seul, d'une pièce à l'autre, dans la maison de Beacon Street, qu'il avait offerte à Susan et dont il allait hériter, Pacal s'interrogeait sur le proche avenir, quand le majordome sentencieux, un flot de rubans noirs épinglé à l'épaule, annonça d'un ton glacial qu'une dame demandait à être reçue. Dévoué au clan Buchanan, l'imbécile avait feint de ne pas reconnaître Fanny Cunnings, qui, prévenue par télégramme, arrivait de Floride. En silence, la tante Fanny étreignit Pacal, avec fougue et tendresse.
     
    – Mon pauvre ami ! Que de deuils accumulés en si peu de mois ! dit-elle enfin.
     
    – C'est beaucoup, en effet.
     
    Pacal sut aussitôt qu'il avait, enfin, près de lui, une amie compréhensive et sûre.
     
    On savait à Boston, dans le quartier des affaires, l'insolente prospérité des entreprises floridiennes de Fanny. Si les Buchanan n'avaient tout mis en œuvre pour faire oublier l'existence de la dissidente fortunée, son retour eût fait sensation.
     
    Lord Pacal invita la visiteuse à résider sous son

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