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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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une lettre à Violet, pour inviter Elíseo García Padilla et son épouse à séjourner à Soledad, le temps qu'il leur plairait.
     
    Avant que ses hôtes ne touchent Soledad, les événements se précipitèrent, de façon tragique, à Cuba. Craignant pour la sécurité des ressortissants américains en résidence sur l'île, maltraités et parfois arrêtés par les fonctionnaires espagnols, qui les accusaient d'aider les rebelles, le consul général des États-Unis, Fitshugh Lee, avait, plusieurs fois, réclamé à Washington l'envoi d'une force navale. Le gouvernement de McKinley finit par accéder à cette demande. Les premiers jours de janvier 1898, l'escadre de l'Atlantique Nord, sous le commandement du capitaine William T. Sampson, avait été envoyée à Dry Tortugas, petite île à l'ouest de Key West, à six heures de navigation des côtes cubaines. Le 25, le cuirassé de seconde classe Maine s'était présenté pour une « visite de courtoisie », devant le port de La Havane. Les Espagnols avaient aussitôt dépêché le croiseur Vizcaya , pour une visite de réciprocité à New York.
     
    Si le Maine avait été accueilli avec une politesse guindée, et son commandant Charles D. Sigsbee reçu comme hôte officiel du gouvernement espagnol, le peuple et la presse cubaine se montrèrent moins accueillants. Irrités par l'attitude du Sénat américain, qui avait reconnu aux rebelles le statut de belligérants, avant de proposer une médiation, que le gouvernement espagnol avait rejetée avec hauteur, les Havanais, surtout les Havanaises, savaient signifier aux marins américains qu'ils n'étaient pas les bienvenus à Cuba.
     
    « Ces cochons de Yankees, en se mêlant de nos affaires, nous humilient au suprême degré. Pour nous provoquer davantage, après nous avoir insultés dans leurs journaux, par des articles écrits chez nous, ils nous envoient un navire de guerre de leur escadre vermoulue », lisait-on dans un placard, publié en ville et remis aux officiers du Maine .
     
    Dans le même temps, les nouvelles, envoyées de New York, n'étaient pas de nature à modérer l'indignation des Hispano-Cubains. Lors de leurs sorties en ville, le commandant du Vizcaya et ses officiers étaient souvent conspués par les militants de la junte révolutionnaire cubaine, protégée du gouvernement de McKinley, et par des citoyens qui, se souvenant de l'affaire du Virginius 12 , ne rêvaient que d'en découdre avec les Espagnols. À en croire une photographie du New York Journal , qui, à Soledad, amusa beaucoup les membres du Loyalists Club, ils n'étaient pas les seuls. Le cliché montrait des élèves de Harvard University, en élégant costume de ville et coiffés de chapeaux melon, qui apprenaient le maniement d'armes, pour aller soutenir la guérilla cubaine. Ce Millionaire Regiment , ainsi que le journal nommait cette unité, formée de rejetons des affairistes les plus fortunés, dont le jeune William K. Vanderbilt, n'attendait que l'occasion de s'embarquer pour Cuba.
     
    Même si la plupart de ces rodomonts ne la saisirent pas, l'occasion fut offerte aux belliqueux le mardi 15 février, à vingt et une heure quarante, quand une violente explosion, qui fracassa les vitres de nombreux immeubles, proches du port de La Havane, se produisit à bord du Maine , à l'ancre dans la rade. La plupart des trois cents membres de l'équipage dormaient, quand le feu se propagea à bord du bâtiment. Le commandant du navire dînait en ville. Les pompiers et les secours, dépêchés par l'amiral espagnol Mantarola, recueillirent quelques marins hébétés mais, quand, peu avant minuit, le cuirassé s'inclina sur le flanc, le capitaine Charles D. Sigsbee comprit que son navire était perdu. À l'aube, après l'appel, les sauveteurs durent se rendre à une triste évidence : deux cent soixante-six marins avaient péri, dont deux officiers. Trente-trois hommes, souvent blessés et brûlés, avaient échappé à la mort.
     
    Les premières constatations permirent d'établir que l'explosion s'était produite à proximité des magasins de poudre et de munitions du navire. L'hypothèse d'un échauffement du charbon, dans la soute voisine, fut évoquée comme origine interne de la catastrophe, mais d'autres s'empressèrent de dénoncer un sabotage, une atteinte par l'extérieur du vaisseau, attentat par torpille ou engin explosif. Le capitaine Sigsbee, dans son télégramme au secrétaire à la Marine, à Washington,

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