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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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barbichu.
     
    – Les Taino et les Arawak des Bahamas ne sont pas des Cheyenne. Nos îles anglaises sont, Dieu merci, à l'abri des incursions des militaires américains en mal de victoires faciles, rétorqua Pacal, qui commençait à s'échauffer.
     
    – Jetons ce type dehors, proposa soudain le grassouillet, à qui un nez épaté et de larges narines conféraient un aspect porcin.
     
    Aussitôt approuvé, il s'avança avec deux autres vers Pacal, avec l'intention de se saisir de l'intrus. Maître de ses réflexes, le fils de Charles, qui avait appris de Takitok et de Sima à se débarrasser des importuns, attendit que les trois garçons soient à bonne distance. Quand l'un d'eux, le plus fort, avança une main, Pacal lui saisit l'avant-bras et, d'une seule torsion, le projeta au sol, pantois et meurtri. Il choisit ensuite de frapper le petit gros à la bedaine, lui coupant le souffle. Quant au troisième, il fut cueilli par un uppercut au menton, qui l'assit, hébété, sur le dallage du hall.
     
    Cette réaction, aussi violente qu'inattendue, refroidit les autres et motiva l'intervention du professeur, décontenancé par l'altercation.
     
    – Sortez d'ici, je vous prie, ou je vais demander à notre portier de vous mettre à la raison.
     
    Le portier, qui avait suivi l'assaut, montrait un large sourire et ne paraissait nullement pressé d'intervenir.
     
    – Voyez-vous, monsieur, à Soledad, sur mon île, Indiens, nègres et Blancs s'entendent fort bien quand il s'agit de défendre l'honneur des uns ou des autres. D'ailleurs, voici mon ami Thomas Artcliff qui arrive. Nous allons donc vous laisser entre vous, dit Pacal, voyant apparaître le New-Yorkais, tandis que leurs camarades relevaient les assaillants malheureux.
     
    – Que se passe-t-il ? demanda Thomas, l'air effaré.
     
    – Ces messieurs n'aiment pas les descendants d'Arawak. Ce n'est rien, allons-nous en.
     
    Artcliff se mit à rire et se tourna vers ses camarades.
     
    – Mon ami est capable de scalper qui lui manque de respect, lança-t-il, tandis qu'on emmenait le garçon à la mine porcine.
     
    La réputation du père de Thomas Artcliff et, plus encore, celle de son grand-père, connu comme généreux donateur de l'université, incitèrent le responsable du dormitory à se désintéresser soudain de l'affaire. Il invita d'un ton mielleux les étudiants à faire, dorénavant, montre de plus de courtoisie envers les visiteurs étrangers.
     
    – Allons dîner, conclut Artcliff en prenant le bras de Pacal.
     

    Le lendemain, Pacal crut nécessaire de raconter à Bob Lowell et à Viola comment des étudiants américains lui avaient cherché querelle et comment il avait été conduit à les corriger. La réaction de son maître le déçut.
     
    – Un de leurs professeurs m'a rapporté vos exploits, dont il n'y a pas lieu d'être fier, savez-vous. Vous n'auriez pas dû provoquer ces garçons, dit-il d'un ton sec.
     
    – Mais, ce sont eux qui se sont moqué de moi. À cause de mon physique, bien sûr. L'un d'eux a même insinué que j'étais un sambo , un mal blanchi, monsieur. Et ils ont voulu me jeter dehors.
     
    Lowell ne sembla pas retenir l'explication et traduisit son mécontentement en heurtant, l'une contre l'autre, ses mains de bois, gantées de cuir. Ce bruit sec, inhumain parce que étranger à la chair, impressionnait toujours Pacal.
     
    – Tout cela est bien ennuyeux. Vous avez frappé plusieurs étudiants, Pacal. Que voulez-vous, ces garçons ne savent pas faire la différence entre un Apache ou un Cheyenne et un Arawak des îles Bahamas. Ils ne voient en vous, bien que l'atavisme soit discret, qu'un descendant d'Indien. Et ces temps-ci, dans l'Oregon, les Modok tuent les vaches de nos fermiers, attaquent les convois, sabotent les lignes télégraphiques et, dans la vallée de la Platte, les Sioux s'en prennent aux chercheurs d'or et à nos soldats qui les défendent. Il y a des morts. Nos étudiants n'aiment donc pas les Indiens et ceux qu'ils considèrent comme tels. Il faut savoir cela, Pacal, et se conduire en conséquence.
     
    – Je ne laisserai jamais une insulte sans réponse, monsieur, rétorqua Pacal.
     
    – J'estime que Pacal a eu raison d'agir comme il l'a fait. Les Arawak n'ont rien à voir avec ce qui se passe dans l'Ouest, intervint Viola.
     
    La petite-fille de Maoti-Mata avait souvent à souffrir de l'attitude des Bostoniens, lors de ses sorties en ville. Dans les magasins, les Blancs

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