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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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nouvelles d'Europe, l'impondérable cargaison du trois-mâts ne pouvait être que souvenirs d'aventures hauturières et rêves exotiques.
     
    Lord Simon avait tenu à ce que Lewis Colson assumât une dernière fois le commandement du navire, avant de céder la passerelle à John Maitland. À Boston, il avait autorisé les visites de son bateau et les curieux s'étaient extasiés devant le luxe des appartements, l'éclat des cuivres, le vernis des mâts et des lisses, l'uniforme des officiers et marins du bord. En échange d'un baiser, certaines demoiselles, qui n'étaient pas de la bourgeoisie, avaient obtenu un béret de matelot frappé du phénix d'or !
     
    Ainsi, quand, après deux semaines, vint le moment de l'appareillage pour New York, une foule se rassembla sur les quais. Pacal, venu dire un dernier au revoir aux siens, attendit que le voilier eût quitté le grand bassin pour retourner à Cambridge, où il trouva Robert Lowell, de plaisante humeur.
     
    À la somme convenue pour la pension de son élève, lord Simon avait ajouté cinquante actions de la société qui, depuis cinq ans, faisait construire par l'ingénieur James B. Eads, à Saint Louis, sur le Mississippi, un pont de fer. Long de plus d'un mile, reposant sur trois arches, celle du centre étant la plus large du monde, l'ouvrage, financé en majorité par des Britanniques, avait coûté dix millions de dollars. Devenu actionnaire par le don de lord Simon, le professeur Lowell pourrait assister à l'inauguration du pont, annoncée pour le 4 juillet, à l'occasion de l'Independence Day.
     
    Viola ne semblait pas partager la satisfaction de son mari. En l'observant, Pacal vit qu'elle avait pleuré et, quand Bob quitta la maison pour se rendre, comme presque chaque soir, au Temple Club, il n'eut pas à insister pour connaître la raison de ce chagrin.
     
    – Quand j'ai vu, de loin, le Phoenix prendre la mer, j'ai cru que mon cœur éclatait. Comme j'aurais aimé être à bord, avec vos parents et lord Simon, pour aller revoir mon île, avoua-t-elle, encore émue.
     
    – L'an prochain, c'est nous qui rendrons visite à Soledad. Mon grand-père a même dit qu'il enverrait l' Arawa k pour nous transporter, dit Pacal.
     
    – L'an prochain, au temps de vos vacances, je serai à Philadelphie avec mon mari. Vous savez bien qu'on y prépare une grande Exposition internationale pour célébrer le centenaire de l'Indépendance des États-Unis. Bob est déjà engagé par Baldwin's Locomotive Works pour présenter de nouvelles machines. Alors, vous irez seul à Soledad, conclut-elle, résignée.
     
    Confus et apitoyé, Pacal prit les doigts de Viola, qu'il baisa doucement. Il fut surpris et gêné par la réaction de la jeune femme. Elle retira vivement sa main et se détourna, avec un petit cri, comme si le geste spontané de Pacal lui avait été douloureux.
     
    – Allez à vos leçons. Demain, les cours reprennent, et nous avons eu beaucoup de distractions ces temps-ci, dit-elle vivement, le feu aux joues.
     

    Au cours de l'été, Pacal, Thomas et bon nombre d'étudiants du MIT se passionnèrent, non pour le cadeau que le gouvernement français allait faire aux États-Unis à l'occasion de leur centenaire – une statue géante de la Liberté, qui serait dressée dans la baie de New York – mais pour un yacht extraordinaire. Ce bateau, destiné à un riche Égyptien, était en construction à Philadelphie. Il devrait atteindre la vitesse record de vingt-six nœuds à l'heure. Aux premiers essais, il avait dépassé vingt et un nœuds. Construit par les chantiers Neafle and Levy, sur les plans de l'ingénieur anglais Osborne Reynolds, spécialiste de la propulsion par hélice, le yacht, dont la coque en plaques de fer bénéficiait d'un double rivetage, disposait d'une chaudière à très haute pression. Par une série de cylindres, celle-ci fournissait l'énergie à une énorme hélice placée sous la poupe. L'ingénieur Reynolds avait baptisé ce bolide des mers Aerolithe .
     
    – Avec un tel bateau, on pourrait traverser l'Atlantique en une semaine, observa Artcliff.
     
    – Et aller aux Bahamas en deux jours, renchérit Pacal.
     

    Tandis qu'à Cambridge le fils de Charles retournait à ses études, à New York, le Phoenix était amarré dans le port. Pour ne pas gêner Jeffrey, de qui lord Simon connaissait les difficultés financières depuis la crise de 73, les Bahamiens descendirent au Fifth Avenue Hotel, près de Madison

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