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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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jeunesse ! N'écoutez pas ceux qui prêchent l'abstinence et le rejet des plaisirs. Profitez, profitez des jours et des nuits ! Comme l'a dit Goethe, « l'homme, vertueux ou pas, doit finir en ruine », cita-t-il avec effort.
     
    Il retint longuement la main du jeune homme dans la sienne, comme s'il escomptait de ce contact une transfusion de vitalité, attitude qui indisposa lord Simon.
     
    Willy remarqua la grimace de ce dernier et émit un rire grinçant.
     
    – Le climat des Bahamas est, certes, meilleur que celui du Lancashire. Mais tu sais, il y a un an, j'étais aussi dispos que te voilà. La maladie vous tombe dessus d'un coup, sans prévenir. Tu verras, tu verras !
     
    Lord Simon perçut dans ce propos l'attente acrimonieuse d'un jaloux.
     
    – Bien sûr, je verrai ! Mais rappelle-toi que Samuel Johnson a écrit : « Notre bonheur dépend de la façon dont notre sang circule », hein. Il semble que le tien, épaissi par les excès, circule plutôt mal, n'est-ce pas, rétorqua lord Simon au bord de l'exaspération.
     
    Ayant parlé, il quitta le salon avec sa sœur, laissant Pacal tête à tête avec le malade. Le jeune homme approcha une chaise, s'assit près du vieillard égrotant et répondit à toutes les questions qu'il lui posa sur ses études, la vie aux États-Unis, et la façon dont il envisageait l'avenir.
     
    – Je compte administrer Soledad, dit Pacal, comme toujours peu loquace.
     
    – Bien sûr, vous êtes le futur lord Cornfield. Mais vous n'allez pas, comme Simon, mener une vie étriquée, sur un caillou battu par les ouragans, au milieu de colons à l'esprit étroit, ignares, ragoteurs, loin des vrais plaisirs, des théâtres, des musées, des salles de concert, des lieux où l'on s'amuse. Vous passeriez à côté de trop de choses enivrantes, de gens intelligents, d'artistes, de femmes élégantes, qui ont à la fois de l'esprit et de la cuisse, réussit à développer, malicieux mais bredouillant, William Gordon.
     
    Appréciant l'effort que faisait cet homme pour articuler, Pacal ne put se défendre d'une certaine sympathie pour son hôte.
     
    – Je compte bien, de temps à autre, sortir de Soledad pour me distraire. Maintenant, les vapeurs mettent Nassau à trois jours de New York, où j'ai des amis et où l'on peut s'amuser autant qu'à Londres, sir William.
     
    – Pouah ! Les Américains ignorent tout de nos divertissements raffinés, de la sensualité de nos vieilles civilisations. Ce sont des rustauds.
     
    – J'ai aussi le devoir de maintenir aux Bahamas l'œuvre des Cornfield, celle de mon grand-père surtout, qui a fait de Soledad une sorte de principauté coloniale heureuse. Et puis, né sous les tropiques, je tiens de ma défunte mère un besoin de grand air, de soleil, de chaleur, de baignade, de pêche, de chasse, de chevauchées. En un mot, de liberté.
     
    – Je vois, vous êtes de la nature. Moi, j'ai toujours été de la ville. Je m'ennuie à la campagne ; la verdure, les prairies et les forêts, si chères dit-on aux Anglais, m'ont toujours donné le spleen. Quant aux sports, ils demandent un effort physique que j'ai toujours consacré à d'autres jeux. Par exemple, j'estime la pratique du golf aussi niaise que la chasse au renard. Et puis, les bergères sentent le fromage aigre et les châtelaines rurales la pomme cuite, acheva Willy.
     
    Tandis que Pacal et William Gordon conversaient, lord Simon avait appris de sa sœur les risques que son associé faisait courir à leur filature de coton, une des plus importantes du comté.
     
    – Depuis un an, il ne surveille plus les comptes, accepte toutes les dépenses proposées par un directeur qui semble avoir la folie des grandeurs. Il signe les chèques qu'on lui présente, sans rien vérifier. Le fondé de pouvoir, qui tentait de le raisonner, a été mis à l'écart. Il était temps que vous veniez mettre de l'ordre dans nos affaires, révéla Mary Ann.
     
    – Je m'en occupe dès demain, dit lord Simon qui, jusque-là, avait fait confiance à son beau-frère et associé.
     
    Après le lunch , c'est avec regret et tristesse que Willy Main-Leste laissa partir Pacal. Pour le vieillard usé et assez lucide pour comprendre que les jours lui étaient comptés, le petit-fils de lord Simon représentait la vie chargée de plaisantes promesses.
     
    – Revenez me voir, demanda-t-il sans conviction en voyant le jeune homme s'éloigner.
     
    Le lendemain, lord Simon fit réveiller son

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