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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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reconnut l'exactitude de la révélation. Au lieu de se montrer contrite, elle fit preuve de toute l'arrogance propre aux gens de sa race, qui ne peuvent dominer leur nature libidineuse et pour qui la sainte institution du mariage n'est qu'un acte administratif profitable.
     
    » Fortement ému, Robert Lowell, qui portait des mains artificielles articulées, faites de bois et d'un mécanisme métallique, gifla par trois fois la coupable. Un coup violent atteignit celle-ci à la tempe et sa mort fut constatée une heure plus tard par un médecin. Robert Lowell, bouleversé par cet accident, survenu au cours d'une scène de colère bien compréhensible et excusable, quitta sa demeure pour n'y plus reparaître. Dans la nuit, il se coucha sur les rails du Pennsylvania Railroad. Un convoi broya son corps, qui fut identifié par les mains artificielles. Ce sont ses restes, recueillis sur la voie ferrée, qui ont été hier matin inhumés, en présence des ingénieurs et des ouvriers de la compagnie qu'il dirigeait. Ses amis ont tous estimé, comme le coroner, qu'en giflant l'épouse indigne, il n'avait fait que venger son honneur bafoué. Cet acte et sa conséquence fatale pour l'infidèle eussent sans doute été absous par le jury criminel du comté.
     
    » La mère de Robert Lowell a déclaré que le suicide de son malheureux fils devait être imputé, comme crime post mortem , à l'épouse adultère. »
     
    Pendant cette lecture, lord Simon n'avait pas quitté son petit-fils du regard. La vue des maxillaires contractés et la respiration courte du jeune homme disaient clairement le trouble profond qu'il ressentait. Quand Pacal froissa la coupure d'un geste nerveux, son regard rencontra celui de son grand-père, à la fois sévère et interrogateur.
     
    – Alors ? jeta lord Simon.
     
    – C'est terrible, terrible, terrible. Bob Lowell a tué Viola, bafouilla Pacal.
     
    – Le métis, c'est toi, bien sûr. Un Desteyrac-Cornfield se faire traiter de métis par un polygraphe yankee  ! Te rends-tu compte ?
     
    Comme Pacal se taisait, penaud, lord Simon lança son tampon-buvard à travers la pièce, quitta son fauteuil et vint se camper devant son petit-fils.
     
    – Tu as donc couché avec la femme qui t'a bercé quand tu étais enfant ! Et sous le toit de son mari, ton mentor ! Ce n'est pas d'un gentleman, dit lord Simon, rageur.
     
    – Une fois, une seule fois, je vous assure, grand-père.
     
    – Il semble que cette seule fois ait eu des conséquences !
     
    – Je l'ignorais. Viola ne m'a jamais écrit et, dans ses réponses à mes lettres, Robert Lowell ne citait jamais Viola. D'ailleurs, il la méprisait, et elle était très malheureuse, dit Pacal.
     
    – Et tu as joué les consolateurs ; je vois ça. C'est un rôle dangereux. Les femmes appâtent à la mélancolie.
     
    Pacal, atterré par la révélation d'une tragédie où il avait sa part, résolut de tout révéler de son aventure. Il raconta, sans omettre un détail, son après-midi de baignade avec Viola et ce qui s'ensuivit.
     
    – Vous auriez mieux fait d'en rester à l'épisode de la plage, commenta le lord.
     
    – Comme je vous l'ai dit, elle est venue, la nuit, dans ma chambre en disant me devoir le plaisir refusé sur la plage. Ce qu'elle voulait, c'était, comme elle le répétait, connaître la caresse de mains de chair. Imaginez les mains artificielles de Lowell… avec leurs brides.
     
    – J'imagine, mon garçon.
     
    – Viola devait les lui ôter le soir et les attacher le matin. Elle avait pour ces prothèses, dont le cuir lisse et patiné ressemblait à de la peau momifiée, la répulsion qu'inspirent des pièces anatomiques. Acceptables quand elles prolongeaient les bras mutilés de Bob Lowell, rebutantes quand on les voyait posées sur un meuble, ces mains paraissaient d'autant plus inhumaines qu'elles copiaient grossièrement la vie.
     
    – Elles l'ont aussi supprimée, fonction très humaine, hélas.
     
    – Suis-je responsable de la mort de Viola ? C'est ce que vous pensez, ce que va penser mon père, qui était l'ami de Bob. Ce que va penser Alida, la sœur de Viola, et tous les Arawak, n'est-ce pas ? interrogea Pacal d'une voix blanche.
     
    – Responsabilité partagée. Non seulement avec Viola mais avec son mari. Car c'est lui qui a frappé à mort sa femme, s'abaissant ainsi au plus vulgaire. Un mari trompé chasse l'infidèle et c'est tout. Les anciens puritains, les plus sévères,

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