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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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jours, il avait emmené le neveu de son collègue Mounier-Dupré afin de lui donner l’occasion de voir sa famille.
    « Pas de chance, dit Fernand, d’avoir manqué de si peu une si belle chose, mais je suis diablement heureux de l’apprendre. Vous ne pouviez trouver plus délicieuse femme, chaque fois que je reviens elle m’apparaît plus ravissante. Et toi, mon amie, tu ne pouvais trouver plus admirable époux.
    — Tu es un plaisant garçon, Fernand. J’espère que tu vas me tutoyer et m’appeler Bernard. Comment se porte la marine ?
    — Mieux, beaucoup mieux, grâce au citoyen Saint-André. Nous ne sommes pas encore en mesure d’anéantir les Anglais, mais nous nous défendons avantageusement. »
    Fernand disait vrai, le blocus des côtes devenait de plus en plus périlleux pour les croisières anglaises. Leurs pertes se multipliaient. Dans tous les duels de bateau à bateau, l’avantage restait aux bâtiments de la république, beaucoup plus marins. Les corsaires harcelaient jusque dans l’océan Indien le commerce britannique. Pitt devait à son tour protéger ses marchands par des navires de guerre. Un de ces convois, richement chargé, avait été enlevé au large de Terre-Neuve après une vive canonnade. Sur mer comme sur terre, la France nouvelle montrait sa résolution.
    Cependant la crise intérieure n’était point terminée. Tandis que Bernard regagnait son poste en Alsace, des convulsions agitaient toujours le Comité de Salut public. Les factions abattues laissaient des séquelles. Claude croyait sentir que là-dessus la divergence, déjà perceptible depuis quelque temps, entre Saint-Just et Robespierre s’accroissait sourdement. Saint-Just considérait Pache comme complice, avec Deforgues, des conjurations dans lesquelles il les soupçonnait d’avoir trempé sous prétexte de les découvrir. « Pache, disait-il, ne s’en est fait l’espion que lorsqu’il a vu ce parti sur le point d’être exterminé. J’ai à cet égard des preuves complètes. » Saint-Just voulait l’arrestation de Pache et de son gendre Xavier Audouin. Robespierre s’y opposait absolument, Pache et Audouin, estimait-il, avaient rendu de grands services en retour desquels ils méritaient d’être protégés. Claude partageait cet avis sur Audouin. On ne pouvait soupçonner son républicanisme.
    « Je l’ai chargé, ainsi que Gay-Vernon, de correspondre avec les Jacobins de Limoges, et je réponds de lui.
    — Je ne mets pas en doute ta sincérité, mais tu t’avances beaucoup », répondit Saint-Just.
    La question fut débattue toute une nuit, dans une séance très secrète, à l’hôtel des Invalides. Saint-Just n’obtint pas gain de cause, mais de son côté il refusa la sauvegarde demandée par Robespierre. On remplaça Pache à la mairie par Fleuriot-Lescot, substitut de Fouquier-Tinville. Payan succéda comme agent national près la Commune à feu le procureur-syndic Chaumette. Herman, en récompense de la fermeté dont il avait fait montre dans le procès des Dantonistes, fut nommé ministre de l’Administration intérieure, police et tribunaux.
    En vérité, les ministres n’étaient plus que de simples agents du Comité. Celui-ci, sous l’impulsion de Saint-Just, Robespierre et Couthon, tendait à saisir tous les moyens d’exécution, par défiance des fonctionnaires, presque tous corrompus, comme les deux récents procès venaient d’en fournir mainte preuve. Au demeurant, la corruption ne les atteignait pas seuls, elle était générale, elle résultait de l’anarchie. On ne voyait partout que trafics, vénalité, ambitions avides. La nation avait besoin non seulement de lois civiles mais encore d’un code moral. Dans un grand rapport complétant ceux de ventôse, Saint-Just évoqua devant la Convention les institutions de la république dont Robespierre et lui rêvaient. Pour la première fois, il en dessina l’esquisse. Son fondement, égalitaire, démocratique, répondait assez bien aux idées de Claude, mais là-dessus Saint-Just bâtissait un extravagant et puéril assemblage d’utopies plus éloignées les unes que les autres des réalités humaines : un songe d’antiquité grecque et romaine mal digérée, avec les vieillards, décorés d’une écharpe blanche, passant leurs jours à faire fumer l’encens sur les autels : bref quelque chose d’absolument inimaginable au XVIII e siècle, en cet âge de la vapeur, des aérostats, du télégraphe. Toutefois, le

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