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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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débattre. Quelques flatteurs demandèrent l’impression du rapport. C’était là un honneur insuffisant pour le nouveau pontife et la religion nouvelle. Couthon, d’un ton dévot, déclara que la Providence avait été offensée par les saturnales des athéistes. L’impression du rapport ne suffisait pas à la venger.
    « Il faut, dit-il, que le rapport soit non seulement imprimé, envoyé aux départements, aux armées, à tous les corps constitués et à toutes les Sociétés populaires, mais qu’il soit affiché en placards dans les rues. Il faut qu’on lise sur les murs et sur les guérites la véritable profession de foi du peuple français. (Applaudissements.) Je demande enfin, qu’attendu que la morale de la représentation nationale a été calomniée chez les peuples étrangers, le rapport de Robespierre soit traduit dans toutes les langues et répandu par tout l’univers. » (Applaudissements.)
    Aux Jacobins toutefois les choses ne se passèrent pas si bien. Le club fit voir qu’il n’appréciait nullement cette offensive contre la liberté de penser. Et comme le jeune Jullien, de la Drôme, membre de la Commission exécutive de l’instruction publique, tout dévoué à Robespierre, proposait une adresse pour féliciter la Convention, des protestations très vives s’élevèrent. Après Fouché, Barras, Élie Lacoste, Tallien, Amar, Dubon prit la parole. Il demanda rudement si l’on n’avait abattu les factions et fermé le club des Cordeliers que pour voir paraître une nouvelle conjuration, plus odieuse encore, contre la liberté. Robespierre, furieux, répondit d’une façon sournoise et menaçante en évoquant les ramifications du complot de l’Étranger dont tous les séides n’avaient pas été atteints.
    « Et moi, riposta Dubon, je découvre aujourd’hui qu’il existe dans notre sein même un complot contre la république. Ne cherche-t-on pas à rétablir l’autel pour pouvoir ensuite relever le trône ? »
    Couthon secourut Robespierre vert de rage. « Dubon, toi qui as toujours été un de nos plus solides amis, comment peux-tu…
    — Je ne saurais être l’ami d’aucun tyran. J’ai déjà dit que c’était une intolérable tyrannie de condamner Gobel pour avoir dépouillé la prêtrise. Or votre décret est la codification de cette tyrannie, la pire de toutes : celle qui enchaîne les consciences. Tout homme est libre de croire ou non en une divinité, de croire ou non à l’immortalité de l’âme. Le fondement de la république, c’est l’amour de la patrie, l’amour de la liberté, l’amour de nos semblables. Nous n’y laisserons pas substituer je ne sais quelle superstition imitée du pied-plat Rousseau, je ne sais quel « christianisme épuré » qui ramènerait l’Inquisition et les Dragonnades ! »
    Les applaudissements de toute une partie de l’assistance avertirent Robespierre qu’il fallait lâcher du lest. « Il n’est pas question, dit-il d’un ton méprisant, d’inquiéter ou de bannir ceux qui ne croient pas à la divinité. Ce serait effrayer trop d’imbéciles ou d’hommes corrompus. On poursuivra seulement ceux d’entre eux qui conspirent contre la liberté. »
    Finalement, l’adresse fut adoptée, avec pas mal d’atténuations. Quand on vint la lire à la Convention, Carnot, assis au fauteuil présidentiel, la reçut froidement, feignit de croire que le Dieu dont il s’agissait était simplement la Nature ni plus ni moins, et montra par toute son attitude combien peu importaient ces mômeries. Mais elles produisaient un effet considérable sur le public, du moins sur une partie : sur les ecclésiastiques et tous ceux qui, attachés à la religion, voyaient là une étape vers son retour. Dubon n’avait pu empêcher le Conseil général d’adhérer au nouveau déisme. Cependant l’adresse de la Commune, que Payan vint lire à la barre de la Convention, appuyait sur la portée politique du décret, en glissant sur la divinité. L’agent national marqua bien, du reste, sa position. Il ne s’agissait point, dit-il, de créer une religion nouvelle. En revanche, Fleuriot-Lescot, dans une proclamation aux Parisiens, laissa voir que non seulement on ressuscitait l’esprit religieux, mais aussi la plus absurde superstition. Dieu allait récompenser la France du décret du 18 floréal, en accordant de bonnes récoltes. « L’abondance est là, écrivait le maire, elle vous attend. L’Être suprême a commandé à la

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