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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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s’employaient de leur mieux. Ils auraient dû être dix au moins. Ils étaient huit, avec Fernand qui remplissait les fonctions de cinquième lieutenant. Il aurait dû y avoir huit cents hommes à bord. Il n’y en avait que sept cent cinquante.
    Tandis que l’escadre faisait ainsi de l’ouest, lord Howe, repassant devant Brest, constatait la disparition de la flotte française. Elle lui avait filé sous le nez. Il se lança en chasse. Des jours durant, on l’entraîna loin des côtes. Le 9 prairial, 28 mai, on s’en trouvait à plus de sept cents milles, sur le parallèle de Brest, quand les vigies des deux flottes signalèrent ensemble l’adversaire. Pendant les huit derniers jours, le temps n’avait cessé de se gâter. La houle maintenant était forte, il ventait une brise de suroît grand frais. Le crachin bouchait la vue. De sorte que l’on se tombait dessus à l’improviste sans avoir pu prendre aucun dispositif de bataille. Fernand vit monter un signal à la corne de la Montagne : « À tous. Imitez ma manœuvre. » L’amiral brassait afin de venir au plus près. On avait l’avantage du vent, Villaret-Joyeuse en profitait pour se dérober. Lui et Saint-André obéissaient aux recommandations de Paris, et, en prenant chasse devant Howe, ils l’écartaient un peu plus de la route du convoi.
    Aussitôt, les Anglais appuyèrent la chasse. Le Patriote naviguait à présent au vent de la Montagne, à quelques encablures par bâbord, avec le Juste : un 80 également, par tribord. Très bons voiliers, les uns et les autres, ils menaient les trois colonnes. Les hurlements du vent et les détonations des lames brisant par l’arrière ne leur permirent pas d’entendre la canonnade qui se déchaînait loin déjà derrière eux. Un des trois-ponts, le Révolutionnaire, de 110, manquant à la manœuvre s’était laissé sous-venter, et avait été enveloppé par l’ennemi. Le gros vaisseau se défendait bien. Il malmena ses adversaires au point qu’un 74 anglais, l’ Audacious, partit à la dérive. Néanmoins, le 110 eût été accablé par le nombre si Howe, soucieux de garder ses navires pour une bataille générale, ne les avait rappelés. Le Révolutionnaire, à demi désemparé, appuyé dans le lit du vent et des vagues par une voile de cape, resta seul sur la mer où la nuit tombait dans la crasse et les hurlements du vent.
    Au matin, le temps était toujours le même. Il gênait considérablement les vaisseaux mal montés, il servait au contraire l’escadre anglaise. Les marins de fortune, recrutés au moyen de la « presse », achetés à des marchands d’hommes ou envoyés par les cours d’assises, n’y manquaient pas, mais elle possédait des maîtres expérimentés dans l’art de dresser un équipage à coups de canne ou de chat à neuf queues, et un corps d’officiers où les simples enseignes avaient derrière eux des années de navigation. À l’aube, elle était dans les eaux de l’escadre française. Dès sept heures, elle manifesta l’intention de la forcer à combattre, en cherchant à prendre l’avantage du vent. Aussitôt la Montagne hissa le signal du branle-bas. Les hamacs, montés des batteries, étaient déjà roulés dans la gorge des bastingages. Les tambours appelèrent les soldats de marine à leurs postes de tirailleurs ou dans les compagnies d’abordage, tandis que les sifflets faisaient s’activer chaque marin à sa besogne précise. Partout on éteignait les feux. Les gabiers doublaient les principales manœuvres pour le cas où elles seraient coupées par un projectile, assuraient les mâts, tendaient les filets de casse-tête destinés à retenir les débris de vergues. Les matelots dégageaient les ponts, des mousses les sablaient pour que l’on ne glissât point dans le sang. On fixait aux pompes les manches à eau, on remplissait la chaloupe, dans la grand-rue. On démontait les cloisons mobiles séparant les postes, les chambres. Dans les batteries, les canonniers préparaient les pièces, décapelaient les bragues. Les servants prenaient place aux palans, se tenaient prêts à ouvrir au commandement les mantelets des sabords. Des hommes, nu-pieds, montaient des soutes les gargousses et le pulvérin, d’autres portaient les boulets, les boîtes à mitraille. Dans les faux ponts de tous les navires, les médecins déballaient leurs instruments – couteaux, scies à os, aiguilles – et faisaient former des tables d’opération en réunissant

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