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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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reprises, « tous ceux qui auront cherché à dissoudre ou avilir la Convention nationale, ceux qui auront abusé des principes de la Révolution, ceux qui auront répandu de fausses nouvelles, égaré l’opinion, corrompu la conscience publique, dépravé les mœurs, enfin ceux qui, par quelque moyen que ce soit, attenteraient à la liberté, à l’unité, à la sûreté de la république ou retarderaient son affermissement ». En somme, on donnait au tribunal le pouvoir de condamner n’importe quel citoyen opposé d’une façon ou d’une autre à la doctrine robespierriste. Et le rapporteur lut la liste des douze nouveaux juges et des cinquante nouveaux jurés proposés : tous amis personnels de Robespierre, ou de Couthon, entre autres Duplay. Il fallait ce nombre pour que les quatre sections pussent siéger d’une façon permanente.
    Ruamps, qui représentait la Charente-Inférieure, se leva.
    « Je demande l’ajournement et l’impression pour examen. Si une telle loi était adoptée d’emblée, je me brûlerais la cervelle au pied de la tribune. »
    Jacobin convaincu, Ruamps avait été jusqu’à ces derniers temps un des soutiens de Robespierre. D’autres Montagnards protestaient également. Lecointre avec violence. Claude peinait à se taire, et n’était point le seul. Les membres du gouvernement ne pouvaient s’élever contre le projet présenté par l’un d’entre eux, sans trahir ainsi l’antagonisme qui divisait le Comité. Depuis des mois, la Convention n’osait pas y toucher parce que, le croyant toujours uni fortement, elle voyait dans l’accord de ces dix hommes le ressort de leur énergie, la source des victoires remportées par la France sur la Coalition. S’ils se révélaient soudain divisés, ennemis, on les changerait. Robespierre, Saint-Just impressionnaient encore la majorité de la Convention, ce n’est pas eux qu’elle renverrait. On perdrait là tout moyen de combattre la dictature montante. Or, la date périodique du renouvellement tombait aujourd’hui même. Maximilien et Couthon avaient supérieurement manigancé leur coup pour fermer la bouche à leurs collègues, pour les contraindre à laisser passer une loi au moyen de laquelle les Robespierristes leur couperaient la tête.
    Claude rageait. Barère tenta une manœuvre bien conforme à ses habitudes. Répondant, au nom du Comité, aux Montagnards qui réclamaient l’ajournement : « Soit, dit-il, mais ce délai ne saurait excéder trois jours. » Trois ou mille, cela se valait. Si la loi ne passait pas sur-le-champ, si on la mettait vraiment en discussion, il n’en resterait rien. Robespierre le savait. Il descendit du fauteuil pour remplacer Couthon à la tribune, et il exigea la discussion séance tenante.
    « Que l’Assemblée siège jusqu’à ce soir s’il le faut. Au milieu des victoires de la république, les conspirateurs sont plus actifs, plus ardents que jamais. Il faut les frapper. Le projet de loi est fondé sur la justice et la raison. Cette opposition qui se manifeste n’est pas naturelle ; on cherche à diviser la Convention, à l’épouvanter. Ce n’est pas nous qu’elle doit avoir à craindre. On ne nous empêchera pas de sauver la patrie. »
    Les Robespierristes applaudirent. Couthon recommença la lecture du projet, article par article. Il en comptait vingt-deux. Les discuter de la sorte, sans préparation, sans texte sous les yeux, quelle dérision ! Mieux valait, pour l’instant, laisser faire. Une loi peut toujours être rapportée. Maximilien se trompait beaucoup s’il se croyait triomphant.
    Sitôt après le vote, le Comité de Salut public fut prorogé sans changement. La séance levée, il y eut, dans les antisalles, des conciliabules orageux. Léonard Bourdon, Thuriot, Bourdon de l’Oise, Fréron, Tallien, Cambon, Rovère, Guffroy, Ruamps, Merlin, Legendre, et tous ceux qui se sentaient menacés par cette loi « nationicide », comme la qualifiait Moïse Bayle, la reprochaient avec colère aux anti-Robespierristes du pavillon de Flore et du pavillon de Marsan. « Vous êtes des traîtres ! » clamait le violent Lecointre. Collot et Amar leur expliquèrent alors qu’au mépris de toutes les règles aucune lecture préalable n’avait été faite, aucun des Comités consulté. « C’est un acte de suprême despotisme, dit Claude ; et, sachez-le, nous sommes visés tout autant que vous. » On pouvait l’avouer maintenant. « Mais toi, s’écria Lecointre

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