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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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incarnée. »
    Lindet, Carnot, Prieur et jusqu’à Billaud joignirent leurs protestations à celles de Claude. « Delmay, ajouta-t-il, a tout sacrifié au salut de la patrie : une profession qui lui tenait à cœur, ses affections familiales, et un sentiment plus fort encore. Il a rompu avec ses parents à cause de leurs opinions, mais les liens du sang subsistent toujours. Tant coupable que sa sœur nous paraisse, nous devons peser avec soin si, en la frappant sans pitié, nous n’allons point porter un coup cruel à un homme qui a mérité notre estime, notre admiration, notre reconnaissance et notre amitié fraternelle. Je me propose de vous fournir tous les moyens d’en juger. Je vous demande de me laisser faire le second rapport. Jagot s’est acquitté du sien en conscience, nul n’en doute, mais il ne disposait que de renseignements incomplets.
    — Je ne m’oppose pas à ta requête », dit Maximilien. Les autres membres acceptèrent.
    Un répit fut gagné de la sorte, pendant lequel on apprit la mort de Pétion et de Buzot. Leurs cadavres à demi dévorés par des loups venaient d’être découverts dans un petit bois, non loin de Saint-Émilion. Huit jours plus tôt, une colonne de réquisitionnaires avait trouvé, tout près de là, au bord de la route, Barbaroux gisant, la mâchoire fracassée par une balle, un pistolet près de lui. Transporté à Bordeaux, il était aussitôt, comme hors-la-loi, monté à la guillotine. Les autorités bordelaises supposaient à présent que les trois Brissotins, quittant de nuit un refuge pour un autre, surpris par l’approche de la troupe et se jugeant perdus, avaient résolu de se tuer. Barbaroux se tirait aussitôt une balle dans la tête, Buzot et Pétion se dissimulaient dans le bois tout proche et absorbaient du poison dont ils étaient munis.
    Cette macabre nouvelle ne fit pas oublier à la Sûreté générale la question Delmay. Quatre jours après l’intervention de Claude, Lavicomterie observa que Mounier-Dupré avait porté là-dessus une accusation contre le comité de surveillance de Limoges. Il fallait savoir si, oui ou non, celui-ci avait déformé des faits ; et, dans ce cas, prendre une sanction contre lui. On devait fixer une date pour le rapport. Claude déplora une fois de plus sa sottise. Il obtint encore deux jours, sans chercher à retarder davantage. Cela ne servait à rien puisque le Comité de Sûreté générale ne perdait pas l’affaire de vue et qu’il n’y avait donc pas moyen de l’enterrer. Il aurait fallu posséder la puissance de Robespierre pour interdire purement et simplement, comme lui au sujet de la Mère de Dieu, la poursuite de l’instruction.
    Avant d’engager la partie au pavillon de l’Égalité, Claude, naturellement, ne manqua point de se ménager des alliances. Vadier, Moïse Bayle, Voulland, auxquels importait peu le châtiment d’une vague contre-révolutionnaire provinciale et qui avaient besoin d’appuis contre Robespierre, promirent leur voix. Panis la promit aussi, par amitié. Robert Lindet, Carnot, Prieur s’engagèrent à opter pour l’indulgence. Amar, Billaud, Collot, Lavicomterie, Jagot, inflexibles, ne cachèrent pas qu’ils jugeraient selon leur conscience, d’après l’exposé de la cause. Inutile d’essayer de circonvenir Ruhl. Quant à David, il opinerait comme Robespierre, et Barère comme le plus grand nombre. Couthon, dont la maladie empirait, ne venait plus aux séances du soir. Les chances s’équilibraient.
    Claude débuta en rappelant de quelle façon Bernard, dans sa volonté de combattre les tyrans étrangers, avait été soutenu par son beau-frère, lequel s’était rangé, dès les premiers temps, parmi les Jacobins. « Élu officier municipal, il s’est toujours opposé aux violences des Amis de la Paix, il a collaboré à leur dissolution, puis à celle des dragons aristocrates. Si on l’a vu ensuite se refroidir pour la Révolution, ce ne fut point par un changement de ses convictions démocratiques, mais parce que la loi du maximum, qui nous a été imposée par les Hébertistes, et dont nous-mêmes ne voulions pas, dont nous connaissons tous les néfastes effets, ruinait son commerce. Quoi qu’il en soit, il n’a en aucune manière agi contre la République. Toutes ses prétendues liaisons avec les aristocrates et les réfractaires se réduisent simplement à d’anciennes relations avec ses voisins de campagne, à ses rapports avec son beau-père, son

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