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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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générale. Si tu assistais à une réunion des Comités, tu verrais quelle guerre secrète se livre continuellement dans Paris, dans les départements, aux Tuileries, partout, et à quelle armée d’agents étrangers, de complices, nous devons tenir tête. Effrayer ceux qui seraient enclins à les servir : voilà notre seul moyen de les combattre. Nous n’avons contre eux qu’une arme : la guillotine, encore la guillotine, toujours la guillotine.
    — Hon, hon, tu es donc devenu un vrai buveur de sang !
    — J’en suis loin. J’abhorre cette boucherie, et ce n’est pas moi mais tes amis, avec Danton, qui ont aidé les Hébertistes à mettre la terreur à l’ordre du jour. Au sein des Comités, Robespierre, Couthon, Lindet, Prieur, Carnot, Panis, David et moi-même, nous nous efforçons d’en atténuer les effets en protégeant ceux que l’on peut épargner sans risques pour la république. Nous avons horreur du sang, nous aussi, seulement nous ne le crions pas sur les toits comme Danton. Notre manière attire moins la popularité, mais elle est plus efficace. Si les soixante-treize sont encore de ce monde, ce n’est pas à des clameurs d’indignation qu’ils le doivent. Je suis bien d’accord avec toi : la nation n’a pas pires ennemis que les ultra-révolutionnaires. Cela néanmoins ne diminue pas la malfaisance des contre-révolutionnaires. Il faut frapper également les uns et les autres. Et toi, mon pauvre Camille, toujours entraîné par ton cœur, toujours naïf, toujours pressé de déchirer ceux que tu n’aimes pas, tu fais à la fois le jeu des nouveaux Enragés et des royalistes.
    — Moi ! Par… par exemple !
    — Oui, toi, Candide ! En demandant, à dix mille exemplaires, l’ouverture des prisons, chose impossible, tu nous donnes l’apparence d’obstinés terroristes, à nous qui ne sommes nullement sanguinaires. Tu nous assimiles à Hébert. Tu sapes l’autorité dont nous avons tant besoin pour lutter contre l’extrême gauche et la droite extrême. Tu es un instrument entre les mains de Danton, ne t’en rends-tu pas compte ? Crois-tu donc que cinq ou six cents morts de plus importent à l’homme qui se vantait des égorgements dans les prisons ? La clémence est à présent son drapeau comme l’ont été l’énergie et l’audace. En août, il soutenait par-dessous les Enragés, il poussait à la terreur, il lui fallait un tribunal fonctionnant sans répit. Qui a proclamé, le 5 septembre dernier, à la tribune de la Convention : « Chaque jour un aristocrate doit payer de sa tête ses forfaits » ? Soudain, le voici apôtre de l’indulgence. Remarques-tu qu’entre-temps il s’est mis à l’écart ? de manière à pouvoir dire : Je n’étais pas là, je reviens, je m’indigne, je veux arrêter ce massacre.
    — Danton, protesta Camille, était malade. Et il… il est sincèrement indigné. Il m’a dit : « Regarde comme la Seine est rouge ! Elle roule du sang. »
    — Il a toujours été excellent comédien. Ce n’est pas moi qui le prétends, c’est Fabre ; il s’y connaît. Danton a vu surtout que la « sagesse » de Robespierre répondait à l’aspiration générale, qu’il en prenait une position prépondérante. Ton Horatius Coclès manœuvre pour le supplanter en se montrant encore plus « sage ». Mais, en exagérant la modération, il nous la rendra impossible, sous peine d’être accusés de modérantisme, de feuillantisme. Finalement il renforcera le régime de terreur. Voilà la mauvaise besogne que tu accomplis pour lui sans t’en douter. Travaillons l’Assemblée pour obtenir la création d’un comité de justice, je le veux, j’y emploierai toutes mes forces. Combats les exagérés, mais ne tombe pas toi-même dans l’exagération inverse. Allons, mon ami, si comme tu l’écris les Comités entendaient exterminer par la guillotine tout ce qui n’est pas sans-culotte, existerait-il encore des écrivains royalistes pour te féliciter, des muscadins pour acclamer ton nom ? »
    Desmoulins secouait la tête. « Hon, bon, es-tu… es-tu allé au tribunal ? J’ai vu condamner les Brissotins, j’ai vu juger Barnave. C’est affreux ! »
    Non, Claude n’avait jamais assisté à une séance du Tribunal révolutionnaire. Le Comité ne lui en laissait pas le loisir. Mais n’avait-on pas pris d’avance toutes les précautions, choisi juges et jurés un à un sur la garantie de leur réputation ? Et l’accusateur

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