Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Une irrépressible et coupable passion

Une irrépressible et coupable passion

Titel: Une irrépressible et coupable passion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
Vom Netzwerk:
témoigner que
de vous-même et de votre plein gré. Si vous témoignez à la barre, vous serez
soumise à un contre-interrogatoire par le ministère public, comme n’importe
quel autre témoin. Le tribunal vous laisse maintenant la liberté de décider si
vous préférez faire valoir ce privilège ou non.
    — J’aimerais témoigner, s’il vous plaît »,
répliqua-t-elle de sa douce voix de soprano caressante et veloutée, que peu
dans le public avaient déjà entendue.
    Le demi-millier de spectateurs dans la salle archibondée se
leva pour mieux la voir et s’aperçut qu’elle était en réalité plus belle que ne
l’avaient dépeinte les portraits fielleux publiés dans la presse, avec son
teint lumineux, sa peau d’ivoire et ses fascinants yeux scintillants d’un bleu
de Delft. Certains chroniqueurs comparèrent même Ruth aux chastes créatures
féminines dignes et placides des tableaux de Sandro Botticelli ou de Jan
Vermeer.
    Edgar Hazelton débuta par quelques questions d’arrière-plan
sur les relations entre Ruth et son mari et soutira à sa cliente que, moins de
trois mois après leur mariage, Albert et elle se disputaient déjà
continuellement ; chaque fois qu’elle irritait Albert, ce dernier la
jaugeait à l’aune de la défunte Jessie Guischard, « la meilleure femme
qu’il ait jamais connue ». Son bateau à moteur était même baptisé Jessie G ,
jusqu’à ce que Ruth le forçât à changer son nom. Elle concéda qu’elle avait
subi en secret une opération afin de pouvoir concevoir un enfant, ce qui avait
encore exacerbé la colère d’Albert – d’autant plus que Lorraine n’était
pas un garçon.
    Les lèvres de Ruth tremblotèrent à la mention de sa fille,
elle fondit en larmes dans son mouchoir et ce fut seulement après que le juge
Scudder lui eut tendu un verre d’eau qu’elle reprit contenance.
    Hazelton démontra qu’elle avait été une bonne épouse et une
bonne mère, qu’elle avait enseigné à Lorraine cantiques et prières, cousu
elle-même les rideaux et les habits du bébé, rempli de conserves de fruits le
cellier. Puis il lui demanda :
    « Vous avez enfreint vos vœux de mariage avec Henry
Judd Gray, n’est-ce pas ? »
    Ruth se déroba à son regard.
    « Oui.
    — Est-ce le seul homme, hormis votre époux, avec qui
vous ayez fait œuvre de chair ?
    — Oui. »
    Elle ajouta qu’elle ne buvait guère et ne fumait
jamais ; elle avait seulement insisté pour qu’Albert s’assurât mieux, du
fait de tous les accidents auxquels il était sujet : il y avait eu
plusieurs incidents dans le garage – le cric avait cédé et la Buick lui
était tombée dessus, la porte s’était refermée alors que le moteur tournait. Et
un jour où il dormait sur le canapé, comme elle voulait éteindre la TSF, elle
avait accidentellement donné un coup de pied dans le tuyau de gaz, qui s’était
descellé du robinet. Elle était sortie faire une course et, à son retour, elle
avait retrouvé Albert presque asphyxié. Quand elle avait rapporté cette mésaventure
dans une lettre à Mr Gray, il l’avait choquée en déplorant qu’Albert ne
fut pas mort.
    « Était-ce là une réaction caractéristique de sa
part ?
    — Tout à fait. Se débarrasser de mon mari était une
obsession pour lui. »
    Elle ajouta que c’était la raison pour laquelle elle
entendait mettre un terme à leur liaison, mais Judd l’avait prévenue que
« si je rompais avec lui, il allait révéler au monde entier quel genre de
dépravée j’étais ».
    Hazelton invita alors Ruth à raconter comment elle avait
hérité du contrepoids et elle répondit qu’il se trouvait dans un paquet que
Mr Gray lui avait remis au restaurant Henry’s. Elle pensait qu’il
contenait seulement un rouleau à pâtisserie que Benjamin & Johnes
commercialisait comme un réducteur de cellulite et c’était seulement plus tard
qu’elle avait découvert l’instrument contondant, ainsi qu’un mot de la main de
Judd : « Je viendrai lundi soir pour lui faire son affaire. »
    Elle avait caché le contrepoids au sous-sol. Quand Judd
était arrivé le 7, il avait déclaré qu’il était là pour « en finir avec
Son Excellence », mais elle s’y était opposée : « Je te
l’interdis, Judd ! »
    Il avait alors décrété qu’il reviendrait le jeudi soir,
pendant qu’Albert serait au bowling, « et le coincerait dans le
garage », mais il s’était dégonflé et, au lieu de ça, il

Weitere Kostenlose Bücher