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Une irrépressible et coupable passion

Une irrépressible et coupable passion

Titel: Une irrépressible et coupable passion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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faussement
peinée.
    « Mais je ne suis pas un dandy, je suis juste…
classieux.
    — Les mots en “ieux” n’ont rien de bon.
    — Et pourtant, j’adore vos yeux, fit-il valoir, avec
une balourdise de péquenaud.
    — J’avais plutôt en tête “odieux” ou “licencieux”.
Comme mon mari. »
    Judd s’esclaffa.
    « Il est vraiment si horrible que ça ? »
    Ruth, qui se balançait sous la conduite gracieuse de Judd,
aperçut Harry en train de marquer le pas avec lourdeur, les sourcils froncés
d’envie au-dessus du crâne de son épouse. Tout en l’épiant du coin de l’œil,
Ruth pencha la tête vers Judd de façon si intime que ses lèvres effleurèrent
l’oreille de son cavalier comme un baiser lorsqu’elle lui confia :
    « Nous avons dû écourter nos vacances à Shelter Island.
Albert s’est fait surprendre en train de bécoter une dame du Yacht Club et il
s’en est pris une par le mari. »
    Judd s’écarta brusquement, le visage plissé par
l’indignation.
    « Mais c’est affreux, Ruth ! »
    Il y avait quelque chose de roué dans les yeux humides de sa
cavalière. Mentait-elle ? Elle hocha la tête, comme une malheureuse
déshonorée et se blottit contre les formes masculines de Judd pour
ajouter :
    « Ce que j’ai été humiliée. Lora et moi sommes parties
l’après-midi même et Albert est rentré plus tard, la queue entre les jambes.
Nous ne nous sommes pas parlé depuis des jours. Et alors que je me préparais
pour venir ici, ses premières paroles ont été pour m’accuser d’avoir un
amant. » Une larme brûlante lui coula le long de la joue et elle l’essuya
du plat de la main.
    « Ensuite, il m’a dit qu’il s’étonnait d’être resté
autant d’années avec moi et que si un autre voulait de moi, grand bien lui
fasse. Et autres méchancetés. »
    Judd l’étreignit de manière paternelle.
    « Oh, Ruth, je suis tellement navré.
    — Ce n’est rien », articula-t-elle avec
difficulté.
    Elle enfouit sa tête dans le cou de Judd et nota le mépris de
Mrs Folsom, la folle jalousie de Harry. Elle n’avait pas remarqué que
l’orchestre jouait What’ll I do. Elle appuya sa joue sur l’épaule de
Judd, recouverte de flanelle grise, et fredonna, à l’unisson avec la chanteuse
en robe de soirée sur scène.
     
    Aux environs de dix heures, les vendeuses de la boutique de
Madison Avenue quittèrent Zari’s pour rentrer en bus et les détaillants en
visite grimpèrent dans la Packard des Folsom pour une virée au Hyman’s, un
night-club de Merrick Road, à Long Island. Ruth et Judd vexèrent Harry en
annonçant qu’ils avaient leur compte pour la soirée, puis ils partagèrent un
taxi jusqu’au Waldorf, dans la 33 e  Rue, d’où Ruth gagnerait
Pennsylvania Station à pied.
    Comme elle se tortillait sur la banquette, elle discerna la
curiosité de Judd.
    « Ma robe me fait mal sur mes coups de soleil,
expliqua-t-elle.
    — Pourtant, vous n’avez pas été au soleil tout
l’été ? »
    Elle parut mystérieusement gênée.
    « Mes clubs de golf sont au bureau et j’ai un pot de
crème contre les coups de soleil dans mon sac. Vous en voulez ?
proposa-t-il. On est à deux pas. »
    Les locaux de Benjamin & Johnes se situaient
dans un immeuble de onze étages au coin de la 5 e  Avenue et de
la 34 e  Rue. Le bâtiment était gardé par un veilleur de nuit
bourru qui les soupçonna de mijoter un mauvais coup, mais Judd n’eut ensuite
qu’à emprunter l’ascenseur et utiliser sa clef pour entrer.
    « J’ai l’impression de faire l’école
buissonnière », s’amusa Ruth.
    Judd accrocha son feutre à une patère et objecta :
    « Nous ne faisons rien de mal. »
    Il alluma une rangée de plafonniers et, titubant, ouvrit la
voie à Ruth dans le couloir parqueté de chêne en feuilles de fougère, jusqu’à
la salle principale comprenant quatre bureaux appariés, un téléphone commun,
une pile de catalogues Benjamin & Johnes, un buste de mannequin
féminin convaincant et des publicités punaisées pour les sous-vêtements Bien
Jolie parues dans le New York Times. Sans s’apercevoir que Ruth
fermait les stores vénitiens, Judd ouvrit une poche à glissière de son sac de
golf kaki à garnitures en cuir, orné du monogramme HJG. Il se redressa avec un
pot de Remède contre les coups de soleil du Dr Bunting, alors fabriqué à
Baltimore et qui devait sous peu être rebaptisé Noxzema.
    « Qu’est-ce qu’il y a dedans ? » se

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