Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Une tombe en Toscane

Une tombe en Toscane

Titel: Une tombe en Toscane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
Vom Netzwerk:
tombeaux. Pieds contre pieds, Inés et Pedro dormaient comme deux amants apaisés, après l'amour, guettant le ciel où apparaîtrait le signe de leur triomphe. La légende lui revint fidèlement dans les vers du poème :
     
    Et vous serez rendus à l'axe péremptoire,
     
    L'un par l'autre reflet d'amour inébranlé.
     
     
    Il comprit alors le sens de l'inscription. Ce n'était pas le serment des vivants donnant leurs limites, mais celui du patient repos accepté avec la mort : jusqu'à la fin du monde. L'attente de la naissance définitive, qui viendrait de l'effacement de tous les passés par l'amour sublimé.
     
    Lentement, Jean-Louis quitta l'église et se dirigea vers le restaurant. Maintenant se formait l'équation où manquaient encore bien des termes. Elle s'inscrivait en lui comme celle de son enfance au tableau noir.
     
    L'inconnu restait ce père insoupçonné qui ne lui avait qu'incomplètement donné la vie.
     
    Le lendemain, dans le hall de l'hôtel, Jean-Louis aperçut la femme au Leica qui avait interrompu sa méditation devant les tombeaux d'Alcobaça. Elle discutait avec animation, en portugais, avec deux petits hommes bruns, très élégants, auprès desquels, en jupe verte, elle avait l'air d'une plante géante. Encore, remarqua Jean-Louis, que des chaussures de sport sans talons et sa coiffure masculine la maintiennent à la limite de la normale. Quand il passa près du groupe, elle dut le reconnaître et esquissa un sourire. Un moment plus tard, comme il choisissait des journaux français au kiosque du hall, elle le rejoignit.
     
    - Vous m'en voulez beaucoup pour hier, à Alcobaça ? dit-elle, avec un accent qui semblait n'appartenir à aucune langue précise.
     
    Comme Jean-Louis, étonné, se demandait ce qu'il convenait de répondre, elle poursuivit :
     
    - J'ai tout de suite compris que je vous dérangeais dans une observation importante et je suis toute prête à m'excuser.
     
    Il y avait quelque chose de masculin dans ce langage et dans cette attitude.
     
    - Vous n'avez pas à vous excuser. J'étais tout près de me considérer comme le seul visiteur des tombeaux et si j'ai marqué de la surprise, quand vous êtes apparue, ce n'était que de la surprise. Croyez-moi, je n'avais rien d'important à faire là.
     
    Jean-Louis avait une voix nette, un peu sèche.
     
    La jeune femme cessa de sourire et parut embarrassée. D'un seul coup, elle devint très féminine. Si elle n'avait pas bu deux whiskies avec les Portugais, elle n'aurait pas eu l'audace d'aborder Jean-Louis. La vie indépendante qu'elle menait, ce métier de photographe l'avaient habituée à des réactions d'homme. C'était une bonne chose après tout, à la fois comme attitude d'attaque et de défense. Mais, devant Jean-Louis, elle constatait qu'elle jouait faux. Il venait de lui signifier que ses craintes, sincères ou non, étaient injustifiées, qu'elle n'avait affaire qu'à un simple touriste qui risquait de juger ses excuses déplacées.
     
    Mais déjà il devenait plus courtois.
     
    - Je paie mes journaux, excusez-moi une seconde.
     
    Quand il se retourna vers elle, il souriait.
     
    - Je m'appelle Jean-Louis Malterre et je suis heureux d'entendre parler français.
     
    « Il va me faire la cour », pensa-t-elle, et elle reprit son attitude masculine.
     
    - Je m'appelle Margaret Greenworth, vous savez déjà que je suis photographe.
     
    - Tenez-moi compagnie pour l'apéritif, demanda Jean-Louis ; j'aimerais savoir si je ne suis pas devenu muet, car je n'entends parler que portugais et mon ignorance m'a condamné au silence depuis trois jours.
     
    Margaret, cette fois, commanda un jus de fruit.
     
    - Ainsi, dit Jean-Louis, vous mettez une telle application à faire des photographies.
     
    Il y avait un semblant d'ironie dans ce propos, car, chez les Malterre, personne n'avait jamais eu en main un appareil photographique.
     
    Margaret Greenworth utilisait ses Leica à des travaux d'art. Elle s'expliqua longuement là-dessus. Pour elle, la photo était un moyen d'expression. Elle faisait des albums pour une maison d'édition américaine.
     
    - Si j'ai troublé votre visite, hier, c'était vraiment parce que j'y étais forcée par la lumière. Depuis quatre jours, j'attendais un certain éclairage du visage mutilé d'Inés de Castro et le jour où vous êtes venu, je me tenais en embuscade depuis neuf heures du matin...
     
    - Ainsi, vous m'aviez vu entrer dans l'église ? demanda

Weitere Kostenlose Bücher