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Une veuve romaine

Une veuve romaine

Titel: Une veuve romaine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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garde fut achevé. Mais, contre toute attente, on appela tout de suite mon nom. Des sous-fifres nous guidèrent à travers la foule jusqu’à une antichambre caverneuse où un secrétaire au langage châtié nous examina de la tête aux pieds, comme si nous étions de la vermine. Il barra mon nom sur une liste.
    — Cet homme était convoqué il y a longtemps. Pourquoi êtes-vous en retard ?
    Un majordome précéda Anacrites, très élégant dans une tunique grise qui lui donnait le faux air d’une tourterelle apprivoisée, en moins intelligent. Baigné, rasé de près, il offrait un saisissant contraste avec moi. Je détestais la façon dont il s’était lissé les cheveux en arrière : cela lui donnait l’apparence du filou qu’il était. À sa vue, j’eus beaucoup de mal à garder mon sang-froid. Je me sentais la bouche desséchée comme un vieux parchemin. Il me fixa en rétrécissant ses yeux pâles et soupçonneux, mais je restai assez maître de moi pour ne pas l’insulter. D’ailleurs, à ce moment précis, Proculus et Justus reçurent l’ordre de me conduire à l’intérieur.
    Quand nous franchîmes les imposants piliers de l’entrée, Anacrites jouait le rôle du personnage officiel digne de confiance, et moi, sous bonne garde, celui du loustic tombé en disgrâce. Deux jours passés à porter des chaînes m’aidaient à prétendre que je boitais. Et ce fut efficace.
    — Tu as un problème à la jambe, Falco ? s’empressa de demander Titus César.
    — Oh ! c’est une vieille fracture que je me suis faite l’hiver dernier, quand ton père m’a envoyé en mission en Bretagne. Elle se rappelle à moi quand je suis enfermé sans pouvoir faire aucun exercice.
    — N’essaie pas de te rendre intéressant, Falco ! gronda Anacrites.
    Titus jeta un regard impérieux au chef espion.
    — Oui, la Bretagne, je me rappelle en effet.
    Le travail que j’avais effectué pour son père en Bretagne était beaucoup trop secret pour qu’on en parle en public, mais Anacrites était bien sûr au courant. Je l’entendis marmonner furieusement entre ses dents. Je remarquai aussi que le secrétaire chargé de prendre des notes avait discrètement reposé son stylet en entendant mentionner un sujet confidentiel. Ses yeux orientaux croisèrent brièvement les miens. Il était clair qu’il était perméable à l’atmosphère et s’attendait à quelque distraction.
    Titus fit un geste en direction d’un jeune esclave.
    — Didius Falco a du mal à rester debout. Apporte-lui un tabouret.
    Malgré cela, Anacrites se disait qu’il me connaissait trop bien pour se faire du souci. En effet, je n’avais jamais cherché à cacher mes sympathies républicaines, ce qui rendait délicats mes rapports avec la famille impériale. Le chef espion savait tout aussi bien que moi à quoi on pouvait s’attendre : le dénommé Didius Falco allait se montrer insolent, maladroit. En un mot, se ridiculiser, selon son habitude.
     
    Nous étions donc à pied d’œuvre. Titus s’était installé d’une façon très décontractée sur le trône, avec une cheville posée sur le genou opposé, sans se soucier de froisser les plis galonnés de sa tunique pourpre. Le jeune esclave, trouvant logique de placer mon tabouret capitonné près de l’unique personne assise, le porta jusque sur l’estrade, au pied du trône de César. Et il m’aida même à grimper pour m’installer dessus. Anacrites fit instinctivement un pas en avant, puis renonça à protester. Bien obligé qu’il était d’accepter la courtoisie de son maître envers moi. Je me gardai bien de sourire ; le chef espion était beaucoup trop dangereux. Je me contentai de me percher sur mon siège en me massant de temps à autre la jambe, d’un geste voulu machinal, comme si mes pauvres os rapiécés me faisaient souffrir de façon permanente.
    Titus, à 30 ans, était bel homme. Pour quelqu’un de son rang, il se laissait trop facilement approcher. Cependant, l’exercice du pouvoir l’avait forcé à acquérir une certaine réserve. Même ceux qui n’avaient d’autre choix que de vivre dans les provinces les plus reculées de l’Empire n’ignoraient pas, grâce à son effigie sur les pièces de monnaie, que sa tête était une version de celle de son père, cheveux frisés compris, en moins anguleux. Quand il était petit garçon, sa mère avait dû lui faire les mêmes remarques que la mienne, à propos de sa tignasse. Mais Flavia Domitilla

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