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Une veuve romaine

Une veuve romaine

Titel: Une veuve romaine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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eût-elle encore été en vie, elle n’aurait plus eu de souci à se faire à son sujet : une armée de coiffeurs gardait son aîné présentable devant les ambassadeurs étrangers. L’Empire ne risquait pas de perdre la face.
    Avec Titus, sur son estrade, nous formions un petit groupe amical. Il tenait ma missive à la main et me la tendit. Il flottait une lueur malicieuse au fond de ses yeux, et je m’attendais à une plaisanterie de sa part. Il faut dire que Titus faisait toujours l’effort de se montrer courtois – et son charme était bien réel.
    — Que voilà un récit émouvant ! laissa-t-il tomber.
    — Désolé, César. Je suis poète à mes heures. Voilà pourquoi mon style a parfois des envolées lyriques.
    Titus réprima un sourire. Il était protecteur des arts et je savais que je ne m’avançais pas sur un terrain dangereux.
    C’était cependant le pire moment pour paraître nous réjouir ensemble sous le nez du chef espion. D’un hochement de tête, Titus indiqua à Anacrites qu’il pouvait s’approcher et faire valoir ses arguments. L’homme vint alors se planter devant nous avec beaucoup d’aplomb. Ce n’était pas la première fois que je le voyais en action, et je m’attendais au pire. Il possédait au plus haut point ce talent du bureaucrate qui consiste à paraître crédible quels que soient les mensonges qu’il débite.
    D’une certaine façon, je plaignais ce pauvre furoncle dépourvu de principes. Sa carrière était le parcours classique de l’arriviste. Il avait fait ses premières armes sous Néron, pendant ces années folles de suspicion et de terreur, quand l’avenir des espions n’avait jamais paru plus mirifique. Puis, arrivé à l’âge adulte, il s’était retrouvé sous l’autorité du nouvel empereur : Vespasien – un homme resté si incroyablement provincial qu’il n’avait que faire des espions du palais. Alors, au lieu de s’amuser à tirer les fils, blotti au centre d’une vaste toile d’araignée, Anacrites devait se creuser continuellement la tête pour prouver que son salaire était justifié.
    Il ne s’agit pas d’une plaisanterie : Vespasien tenait les cordons de la bourse serrés et surveillait les fiches de paye. Une seule faute, une erreur diplomatique, une porte s’ouvrant trop rapidement et le révélant en train de somnoler dans son bureau quand il avait annoncé qu’il partait effectuer une surveillance, sonneraient la fin de la carrière du chef espion – qui pourrait alors se retrouver en train de vendre des poissons-chats sur un quai quelconque. Il le savait. Je le savais. Il savait que je savais. Peut-être trouvait-on là l’explication de sa conduite.
     
    Je ne tentai pas une seule fois d’interrompre sa diatribe. Je le laissai vider son sac entièrement, et il faut dire qu’il ne s’en priva pas. Il en tira toute une série de faits mal interprétés qui, au bout du compte, le faisaient passer pour un honnête professionnel que ses supérieurs avaient attelé avec un cheval boiteux – moi, en l’occurrence. Le portrait qu’il venait de tracer faisait de moi le plus vil des escrocs.
    Les faits étaient pourtant on ne peut plus lumineux : quelques lingots de plomb des mines impériales avaient été stockés dans un entrepôt et oubliés par le Trésor public. J’en connaissais l’emplacement. Quand je m’étais rendu en Campanie, j’avais emporté ces lingots avec moi et vendu le plomb pour en faire des conduites d’eau, sans en avoir encore reversé le montant à qui de droit.
    Titus écoutait, les mains croisées derrière la tête. Ce n’était pas un grand orateur, mais avant d’en arriver à sa position actuelle, il avait néanmoins travaillé comme avocat. En dépit de son énergie débordante, il savait écouter. C’est seulement après s’être assuré qu’Anacrites avait bien terminé qu’il se tourna vers moi.
    — Le dossier de l’accusation est clair : les lingots de plomb appartenaient à l’État, et tu les as pris sans en avoir reçu la permission.
    — Anacrites est un bon orateur. Il s’est livré à un brillant exercice de rhétorique. Mais, César, il n’y a tout simplement pas d’affaire à juger. (Titus changea de position. Il se tint penché en avant, les deux coudes appuyés sur les genoux. J’avais réussi à capter toute son attention.) César, j’avais une raison toute particulière de respecter ces lingots de plomb. Je pense avoir extrait une partie du minerai du

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