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Victoria

Victoria

Titel: Victoria Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Joanny Moulin
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« volontaires » américains. Toutefois, il y a plus préoccupant : les Russes, souhaitant pousser leur nouvelle frontière le plus possible vers le sud, prennent prétexte de malentendus cartographiques pour tarder à évacuer certains territoires dont ils démolissent les fortifications. Napoléon III donne l’impression qu’il incline à soutenir le tsar. La Navy retourne occuper la mer Noire. L’ambassadeur de Russie à Londres menace de rentrer à Saint-Pétersbourg. Palmerston grogne : « Le plus tôt sera le mieux. »
    La tension des relations internationales en Europe produit d’autres grincements. Le roi de Prusse demande personnellement à Victoria d’intervenir dans une querelle qui l’oppose à la Suisse, à propos du canton de Neuchâtel sur lequel il souhaite faire prévaloir ses droits dynastiques. À Neuchâtel, le parti prussien, ayant attaqué les républicains, vient d’être réprimé par les troupes fédérales. Frédéric-Guillaume IV exige la libération d’insurgés, menaçant de l’obtenir par la force si nécessaire. Vienne, jamais trop pressée de contenter Berlin, interdit la marche des armées prussiennes dans les États de la Confédération germanique. Les Français défient les Prussiens de passer par l’Alsace et la Lorraine. Victoria n’y peut rien. Palmerston ricane : « La farce sera bientôt finie et la Prusse en sera pour ses frais. »
    En septembre, Victoria apprend la mort du maréchal Hardinge, des suites de l’accident vasculaire cérébral qui l’a terrassé en sa présence. Le 13 octobre, sa demi-sœur Feodora l’informe du décès à Amorbach de son frère, le prince Charles de Leiningen, d’une attaque d’apoplexie, à l’âge de 52 ans.
    Victoria, au cinquième mois de sa grossesse, est profondément affectée par les horreurs de la guerre, et voici que la mort la frappe dans sa famille la plus proche. Elle s’aperçoit, avec une certaine stupeur, qu’elle ne trouve le réconfort et l’apaisement ni auprès d’Albert et de ses enfants ni dans le travail, mais en s’abandonnant à la mélancolie même du deuil.
    « J’éprouve soulagement et bienfait, dans mon corps et dans mon âme, à demeurer ainsi fixée sur le sujet triste qui remplit mon cœur. »
    Albert, lui-même mis à rude épreuve par sa constitution décidément fragile, s’alarme de la voir dans cet état. Depuis des semaines, elle oscille constamment entre une prostration muette et de forts accès de mauvaise humeur. L’idée qu’il se fait de son rôle d’époux, l’hérédité inquiétante de la maison de Hanovre, tout l’incite à veiller attentivement sur la santé mentale de la reine. Ne sachant plus que faire, il demande au baron Stockmar de venir l’aider à s’occuper de Victoria, à qui il ne peut plus guère, non plus qu’aucun des enfants, adresser la parole sans craindre de déclencher une dispute. Comme toujours dans ces moments-là, il tente de la raisonner par lettres interposées.
    « Il est vraiment dommage, lui écrit-il, que tu ne trouves pas de consolation dans la compagnie de tes enfants. La racine du problème est cette idée erronée que le rôle d’une mère est de toujours corriger, gronder, donner des ordres et organiser des activités. Il n’est pas possible d’entretenir une relation heureuse et amicale avec des personnes que l’on vient de réprimander. »
    Cherchant à la réconforter, il tente de miser sur l’enthousiasme qu’elle semblait éprouver pour l’heureux mariage de Fritz et Vicky. Il lui apporte une lettre de la princesse Augusta, qu’ils lisent ensemble. Victoria demeure terriblement sombre.
    « J’ai beaucoup de ressentiment, dit-elle, pour l’attitude de la cour et du gouvernement de Prusse, et je n’aime plus du tout l’idée que notre enfant s’en aille à Berlin, pour ainsi dire dans la tanière de l’ennemi  !
    — Qu’est-ce qui te rend si amère ? »
    Comment peut-il, comment ose-t-il poser la question ? En un instant, la colère explose et rien ne peut la retenir. Victoria se répand en invectives contre Fritz et ces atroces Prussiens, contre Albert lui-même, qui en réalité organise un abominable mariage politique, qu’il déguise en conte de fées. Croit-il peut-être qu’elle ne comprend pas ? Qu’elle n’a pas des yeux pour voir et des oreilles pour entendre ? Vicky elle-même n’est qu’une petite sotte insupportable, qui ne songe qu’à complaire à son cher Papa.

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