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Victoria

Victoria

Titel: Victoria Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Joanny Moulin
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les gouvernements français et britannique, l’incident débouche en définitive sur une clarification à l’amiable de leurs positions respectives en Afrique. La Grande-Bretagne a construit sa domination en Égypte et au Soudan depuis qu’en 1875 Disraeli et Rothschild ont acquis les parts du canal de Suez. Au même moment, les Français sont divisés par l’explosion de l’affaire Dreyfus, qui déconsidère gravement la France aux yeux de l’opinion internationale. Les journaux antidreyfusards publient des caricatures de Victoria avec un nez crochu, qui, dans l’euphorie du jubilé, font un fort mauvais effet.
    La reine, qui suit attentivement les développements de cette crise dans la presse, s’inquiète de la possibilité d’un coup d’État d’extrême droite en France. Au mois d’avril, elle est partie en vacances à Cimiez avec une certaine appréhension. Par précaution, elle a fait louer, au nom d’une de ses dames de compagnie, une villa en Italie, prévoyant de s’y replier en deux heures au moindre incident. Le président Félix Faure lui rend visite à l’hôtel Excelsior Regina. Comme elle lui fait part de ses inquiétudes, il l’assure qu’elle n’a aucun souci à se faire, car elle est « très aimée de la population », et que l’excitation de l’affaire Dreyfus a été très exagérée : « il y a révolution et révolution… » Victoria le trouve « très grand seigneur et pas du tout parvenu  », mais elle n’est pas sûre de partager son optimisme.
    Au même moment, la reine a refusé de recevoir son petit-fils, l’empereur d’Allemagne Guillaume II. De même, elle s’était catégoriquement opposée à sa présence à Londres pour les fêtes de son jubilé.
    « Sir A. Bigge, avait-elle écrit à son secrétaire particulier, peut dire au prince de Galles qu’il n’y a pas la moindre crainte à avoir que la Reine permette à l’empereur Guillaume de venir ici en juin. Cela ne pourrait pas se concevoir, pour de nombreuses raisons, et la Reine s’étonne que l’Impératrice y insiste. »
    Elle ne lui pardonne pas son télégramme de félicitations à Kruger au moment du raid de Jameson, non pas tant sur le fond que dans la forme. Tant que Guillaume ne saura pas se tenir, elle le considérera comme infréquentable. Son antisémitisme, mâtiné d’anglophobie, n’est pas le moindre des défauts qu’elle lui reproche et refuse de cautionner. Ce va encore plus loin, au point que Victoria intervient personnellement auprès de son gendre le tsar Nicolas II pour le mettre en garde contre les menées de Guillaume II, dont elle a connaissance par son ambassadeur à Berlin, Sir Frank Lascelles. Cela lui permet d’ailleurs de faire d’une pierre deux coups, en informant Nicolas qu’elle est aussi au courant, si d’aventure lui-même ne l’était pas, d’éventuelles intrigues russes en Afghanistan.
    Au printemps 1899, à Cimiez, Victoria reçoit le prince Alfred, duc d’Édimbourg et grand-duc de Saxe-Cobourg-et-Gotha depuis la mort de son oncle Ernest II en 1893. Willy exige qu’Affie cesse de porter l’uniforme britannique et intègre l’armée allemande. Il ordonne en outre qu’il réside en Allemagne et y fasse éduquer ses fils. Il ne peut pas, dit-il, se contenter de prendre la pose d’un prince allemand et conserver son commandement britannique.
     
    Trois dames en noir, sous des ombrelles blanches, se baladent très lentement entre Roquebrune et Cap-Martin, dans la féerie florale du printemps méridional. La silhouette de cette grand-mère dans une petite voiture tirée par un âne est depuis longtemps familière aux gens du lieu. De part et d’autre de l’impératrice des Indes marchent ses « sœurs » Eugénie et Vicky, impératrice douairière d’Allemagne, gravement atteinte d’un cancer. C’est la dernière fois que les badauds pourront apercevoir les trois impératrices se promenant ensemble dans le midi de la France. Victoria a décidé de mettre un terme à ses déplacements à l’étranger.
    « Hélas ! C’est ma dernière promenade dans ce paradis de la nature, que je quitte avec chagrin, car j’y suis plus attachée chaque année. Je regretterai de retourner dans le nord sans soleil, mais j’ai tant de gratitude pour tout ce que j’ai aimé ici. »
     
    Le 24 mai 1899, Victoria fête son quatre-vingtième anniversaire à Balmoral. Sous ces latitudes, le sol est encore gelé, bien que le soleil ne se couche pas

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