Vidocq - le Napoléon de la Police
sait vraiment où il habite. Vidocq
décide de retrouver le second. Fidèle à sa méthode, il essaye de l’attirer à
lui. Le lendemain matin, le garde champêtre bat tambour et annonce à la
population que M. de Saint-Firmin, qui est derrière lui en calèche, ayant perdu
son épagneul « Brillant » est prêt à accorder dix louis de récompense
à qui lui donnerait des nouvelles de son petit chien. Devant l’annonce de cette
gratification, la foule s’amasse.
Vidocq signale alors discrètement à
la belle Yolande, un jeune homme qui ressemble beaucoup à la fille de
l’élagueur. Celle-ci lui saisit le bras et se met à trembler : « Mon
Dieu, c’est lui. » Vidocq le hèle : « Vous là-bas,
approchez. » Le jeune apache, intrigué et tenté par la récompense, salue
de deux doigts portés à sa casquette.
« Il me semble vous avoir vu
près de mon chien, hier. On m’a dit que vous l’aviez caressé. Mon pauvre
Brillant, rendez-le-moi. J’irai jusqu’à vous donner 300 francs.
— J’aimerais que ce soit vrai.
Mais non, je n’ai pas votre chien. D’ailleurs hier, j’étais à la barrière, j’ai
dansé toute la journée », soupire-t-il avec un regret évident.
« Certains m’ont dit que vous
l’aviez emmené chez vous.
— On vous a menti. J’habite un
garni où on n’accepte pas les chiens, affirme-t-il.
— Je vous crois si vous me
conduisez chez vous. Pour votre peine, je vous donnerai 10 francs. »
Le gain d’une semaine de travail.
C’est bien tentant. Tous arrivent devant le petit hôtel miteux du jeune homme.
Lorsqu’ils entrent dans sa chambre, Vidocq lui saute dessus et le menotte. Le
jeune garçon n’a même pas eu le temps de se débattre. Pendant qu’il est
immobilisé sur son lit, Vidocq fouille tout et ramasse quelques bijoux qu’il
montre à Yolande, restée dans la voiture. En les voyant, elle s’évanouit.
Conduit au commissariat, Guichet
tient tête et nie avec aplomb. Vidocq le reconduit au domicile de la Belle
Normande, le confronte avec le cabaretier qui l’identifie, Guichet proteste
toujours. Devant les draps ensanglantés de la victime, il continue à ne rien
vouloir reconnaître. Mieux, il sourit avec insolence comme s’il savait que
Vidocq ne se satisfait pas des preuves, mais apporte toujours un dossier
complet avec aveux du coupable. Pendant trois heures d’affilée, Vidocq
interroge Guichet qui refuse d’admettre l’évidence. Il a trouvé les bijoux par
terre, il ne connaissait pas la Belle Normande. Le cabaretier s’est trompé,
Yolande a mal vu. Rien à faire. Il n’avouera pas. Assis en face de Vidocq, il
s’étire et bâille :
« J’aimerais dormir
maintenant. » Vidocq retient l’envie de l’étrangler et le conduit jusqu’à
son bureau où un lit est toujours prêt. Guichet s’y allonge et s’endort d’un
sommeil paisible.
Vidocq adopte une autre tactique. Au
matin, une bonne odeur de café au lait envahit la pièce, réveillant le jeune
meurtrier qui s’assoit en se frottant les yeux.
« Vous partagerez bien mon
déjeuner. C’est du vrai café » lui dit Vidocq en souriant et en finissant
de beurrer les tartines. Avec la chute de l’Empire, les parisiens redécouvrent
le plaisir de boire du café le matin comme une friandise.
Guichet s’attable joyeusement en
face de Vidocq et commence à dévorer le pain beurré à pleines dents.
« Quel bel appétit ! C’est
beau la jeunesse. Quel âge as-tu ? admire Vidocq.
— Vingt ans.
— Vingt ans seulement ? Tu
es sûr ? s’étonne Vidocq à voix haute.
— Ben oui. Pourquoi ?
demande Guichet.
— Dans ce cas, ton action de
l’autre nuit avec cette pauvre femme sera regardée comme une étourderie de
jeunesse. Tu as de la chance de ne pas être majeur car là on t’aurait coupé le
cou, mais vingt ans ! Tu en seras quitte pour cinq ou six mois de prison
voilà tout. » Et Vidocq se verse du café.
« Bien vrai ? demande
Guichet.
— Bien sûr, c’est du ressort de
la correctionnelle. Mais je te préviens, tu ne pourras éviter la prison.
— Bah, six mois c’est vite
passé. Autant avouer la vérité si elle coûte si peu. C’est moi qui ai fait le
coup !
— Je le savais bien »
cligne de l’œil Vidocq, comme s’il s’agissait d’une bonne blague.
Le petit déjeuner fini, il l’emmène
chez un magistrat. Encouragée par Vidocq, la petite gouape déballe toute
l’histoire :
« C’est moi qui l’ai tuée
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