Vidocq - le Napoléon de la Police
voilette.
Vidocq n’eut plus qu’à se jeter sur lui et à lui mettre les menottes avant de
l’offrir tout saucissonné, au préfet de police, ravi de ces étrennes
originales.
Vidocq en est certain, il est
l’auteur de ce vol sensationnel. C’est donc un ennemi intime qu’il va devoir
une nouvelle fois confondre, car ce ne peut être que lui qui a opéré cette
nuit. De retour à la Préfecture, il demande son dossier et constate qu’il s’est
effectivement évadé. Le vol a été commis dans la nuit du 5 au 6 novembre et le
7, Vidocq identifie le coupable. Reste maintenant à l’arrêter ainsi que ses complices,
ce qui est une autre affaire.
Le conservateur, au mot de
« complice » se dresse sur ses ergots :
« Mes employés sont au-dessus
de tout soupçon et ne sont autorisés à entrer dans les salles du cabinet des
médailles que les membres du plus grand monde. » Vidocq hausse les
épaules : « Celui qui est entré ici avait les clefs. Regardez
vous-mêmes, les vitres ne sont même pas brisées. Il n’a pu le faire qu’à l’aide
d’un complice qui lui a fourni les clefs ou des doubles. »
Le conservateur en bégaie et, drapé
dans sa robe de chambre, proteste, la main sur le cœur :
« Elles sont uniques, il n’en
existe aucun double. De plus, elles sont enfermées la nuit dans un coffre à
côté de mon lit. Les salles, voyez-vous, sont fermées au public. Les visites
sont rares et les visiteurs, hors de tout soupçon, ne sont admis que sur
rendez-vous… »
Sans se laisser convaincre par ces
déclarations, Vidocq consulte le registre des visites. Rien que du grand monde.
Duc de X, marquis de Y, comte de Z, il continue cependant
à parcourir le registre, ligne par ligne, et s’arrête sur un nom qui le fait
tiquer intérieurement, vicomtesse de Nays-Candau.
Née Delphine de Jacquot d’Andelarre
de Gallois et parente du duc de Richelieu, ministre favori du roi Louis XVIII, elle demanda, dès les premiers jours de la Restauration des
faveurs pour sa famille, ruinée par la Révolution. Le ministre lui avait alors
donné ce conseil paternel : « Mariez-vous et nous nous chargerons de
la carrière de votre époux. » En 1818, elle déniche à dix-huit ans, le
vicomte Luis-Mariano de Nays-Candau, un individu d’une absolue médiocrité et de
huit mille livres de rente (environ trente mille quatre cent quatre-vingt-dix
Euros). Peu de chose pour une jeune femme soucieuse de tenir son rang à la
Cour.
Son mariage à peine conclut, elle se
met en campagne pour faire de lui un préfet et d’elle, une
« préfète ». Clairvoyante, elle a conscience que son époux ne pourra
jamais faire carrière dans l’armée. Beaucoup de concurrence et surtout avec des
gens compétents. Et puis qu’y gagnerait-elle ? Un général ne commande qu’à
des soldats, alors que diriger une préfecture donne autant de pouvoir que
d’influence à une épouse avertie. Chaque fois qu’une préfecture est vacante, la
vicomtesse se précipite aux Tuileries et harcèle le roi et ses ministres.
Possédant une mémoire infaillible, elle a en tête, la liste des préfets avec
leur âge, leur situation de famille et de santé. Elle dénonce les trop vieux ou
les gâteux et propose son mari pour remplacer chaque mort. Tant de persévérance
a sa récompense et le vicomte est nommé sous-préfet à Tarbes.
La consécration préfectorale et la
puissance politique liée à cette fonction vont bientôt échoir aux mains de la
vicomtesse. C’est sans compter sur l’époux qui, s’il ne s’intéresse ni à sa
fonction ni à son épouse, se passionne pour celles des autres. Il passe son
temps à séduire tous les jupons de sa sous-préfecture et à se battre en duel
avec les maris. Devant le scandale, il est radié. Ne perdant pas de temps en
lamentations, la vicomtesse repart à l’assaut des ministres et obtient du
nouveau roi Charles X, une nomination dans une autre
sous-préfecture, celle de Louhans.
La sous-préfecture ne plaît pas à la
vicomtesse qui obtient alors une mutation à Bagnères, beaucoup plus chic. Puis
Charles X perd son trône et la vicomtesse son appui
politique.
Sitôt le règne de Louis-Philippe
établi, la belle Delphine de Nays-Candau est une des premières grandes dames à
se rallier au régime du nouveau roi et gagne ainsi la gratitude du couple
royal, en particulier de la reine Marie-Amélie. La vicomtesse reprend alors sa
campagne pour faire nommer son
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