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Viens la mort on va danser

Viens la mort on va danser

Titel: Viens la mort on va danser Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Segal
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rapidement décimé les tireurs palestiniens, dont
beaucoup étaient des adolescents. Des enfants de onze, douze ans participaient
au combat.
    L'un de mes patients de Beït Chebab a eu
l'épaule emportée par un tir de mitrailleuse antiaérienne.
    Des rafales de mitraillette percent le
silence de la nuit, comme pour saluer le début de l'année nouvelle.
     
    Samedi 1 er janvier
    A dix heures du matin, Robert le chauffeur-
tireur d'élite vient me rechercher à l'hôtel de Coral Beach. J'ai rendez-vous à
l'hôpital Risk avec le ministre des Affaires sociales, le docteur Hassad Risk.
    Nous évoluons dans l'hôpital, au milieu des
verres cassés et des trous d'obus, à la recherche du docteur. Mais celui-ci a
dû s'absenter, nous dit-on. Aussi malgré les recommandations de prudence des
médecins de la Croix-Rouge, nous partons pour le camp de Tall el Zaatar.
    Je fais le tour du camp au milieu des
ruines funèbres qui se découpent et semblent déchiqueter le ciel bleu. Je sors
un boîtier et prends quelques clichés de ce lieu sinistre. Un enfant joue avec
un vélo cassé. Je me recule pour fixer d'autres images et ne vois pas un énorme
trou .d'obus derrière moi : je bascule sur le côté et m'affale avec mon
fauteuil. Heureusement, j'ai eu le réflexe de protéger mon appareil. J'explore
les ruelles, les maisons hachées par les rafales de mitrailleuse. Sur un mur
sont affichés les portraits des combattants morts pour défendre le camp. Du
linge sèche devant une maison éventrée. De temps à autre, un enfant surgit
d'entre les pierres; il fouille dans cette terre gluante. Cinquante mille
personnes en tout auront payé de leur vie cette guerre du Liban, et que
reste-t-il par ce froid samedi ? Des maisons éventrées, des maisons sans cœur,
que traverse un vent glacé. A aucun moment les fidèles de l'église ou de la
mosquée ne se sont posé le problème de Dieu, de leur Dieu.
     
    Lundi 3 janvier, 17 h 30
    Une formidable secousse vient d'ébranler le
centre de Beyrouth dans le quartier d'Accaoui. Dans un rayon d'un kilomètre,
toutes les vitres ont sauté; l'immeuble des Kataeb était visé. Sous les
décombres de la rue on relève trente-cinq corps déchiquetés par cinquante kilos
de dynamite. La charge était enfouie dans les égouts. Qui sera la prochaine
victime de ces règlements de compte sauvages ? Beyrouth s'apprête à revivre des
heures sombres, tendues, blêmes.
    La nuit à Beït Chebab est très froide. De
la ville nous parviennent des bruits feutrés de panique. La radio et la télévision
ne font état que d'incidents légers; les journaux en langue arabe, en revanche,
relatent pleinement le nouvel événement. On sait que depuis deux semaines les
    Syriens ont muselé la presse. Toute
personne qui tenterait d'entrer dans les locaux de son propre journal serait
arrêtée. Une exception à cette censure draconienne : les Américains. Ceux-ci peuvent,
sur présentation de leur passeport, aller et venir en tous lieux, faire leur
travail d'information.
     
    Mardi 4 janvier
    Tout semble calme après l'explosion d'hier
après-midi qui a fait trente-cinq morts et cinquante blessés. Une voisine de
vingt ans et sa tante ont été déchiquetées alors qu'elles passaient devant
l'immeuble des Phalanges. Tout repose en silence sur des mètres et des mètres.
Les cendres des immeubles sont mêlées aux cendres des passants.
    « Le terrorisme va-t-il reprendre ? » Leïla
me pose vingt fois la même question. Je n'ose lui répondre par l'affirmative,
mais je suis sûr que les heures et jours à venir auront ce goût de cendre.
    Des bourrasques de vent chargées de neige fondue
balayent le château Boustany. Après les douze coups de minuit, soudain un
treizième coup, puis un autre et encore d'autres éclatent avec une violence
inouïe. Plastic ou obus de 105? A chaque fois la maison, pourtant bien
accrochée à la colline, se met à vibrer. Une nouvelle explosion ébranle toute
la demeure.
     
    Mercredi 5 janvier

Karim, le fils des Yared, me confie avoir
plongé sous son lit dès la première décharge. C'est pourtant auprès de lui que
je cherche les renseignements quant à la nature des explosions. Dix-huit mois
de guerre l'ont rendu expert. Il opte pour des charges de plastic.
    J'apprends un peu plus tard qu'on avait
placé celles-ci dans des voitures. De la pharmacie, du dépôt de médicaments de
la Croix-Rouge d'Ain Arr, il ne reste plus rien.
    Toujours sans nouvelles du docteur Majzoub,
responsable

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