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Voyage de J. Cartier au Canada

Voyage de J. Cartier au Canada

Titel: Voyage de J. Cartier au Canada Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Cartier
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hommes que nous estions il n'y en avoit pas dix sains, en sorte que l'ung ne pouvoit secourir l'aultre qui estoit chose piteuse à veoir, consideré le lieu ou nous estions.
    Car les gens du pays venoient tous le jours devant nostre fort, qui peu de gens veoyent, et ja y en avoit huict de mors et plus de cinquante, en qui on ne esperoit plus de vie.
Nostre cappitaine voyant la pitié et maladie ainsi esmeue, feist mettre le monde en prieres et oraisons et feist porter ung ymage en remembrance de la Vierge Marie contre ung arbre distant de nostre fort d'ung traict d'arc les travers des neiges et glaces. Et ordonna que le dimenche en suyvant l'on diroit audict lieu la messe. Et que tous ceulx qui pourroient cheminer tant sains que malades yroient à la procession chantant les sept pseaulmes de David avec la letanie, en priant ladicte vierge qu'il luy pleust prier son cher enfant qu'il eust pitié de nous. La messe dicte et celebrée devant ledict ymage, se feist le cappitaine pelerin à nostre dame de Roquemado promettant y aller si Dieu luy donnoit grace de retourner en France. Celuy jour trespassa Philippes Rougemont natif d'Amboise, de l'aage de environ vingt deux ans.
Et pour ce que la maladie nous estoit incongneue, feist le cappitaine ouvrir le corps pour veoir si aurions congnoissance d'icelle pour preserver si possible estoit, le persus. Et feust trouvé qu'il avoit le coeur blanc et fletry environé de plus d'ung pot d'eaue rousse comme dacte, le foye beau, mais avoit le poulmon tout noircy et mortifié et s'estoit retiré tout son sang au dessus de son coeur. Car quand il fut ouvert sortist au dessus du coeur grand habondance de sang noir infect. Pareillement avoit la ratte par devers l'eschine ung peu entamée environ deux doidz comme si elle euct esté frotée sur une pierre rude. Apres cela veu, luy feust ouverte et incise une cuisse, laquelle estoit fort noyre par dehors, mais dedans la chair fut trouvée assez belle.
    Ce faict, fut inhumé à mieulx que lon peust. Dieu par sa saincte grace pardonne à son âme, et à tous trespassez, Amen.
Et depuis de jour en aultre s'est tellement continuée ladicte maladie, que telle heure a este, que par tous les trois navires ny avoit pas trois hommes sains, de sorte qu'en l'ung desdictz navires n'y avoit homme qui eust peu descendre soubz le tillac pour tirer à boire, tant pour luy que pour son compaignon. Et pour l'heure y en avoit ja plusieurs de mortz. Lesquelz il nous convint mettre par par foiblesse soubz les neiges : car il ne nous estoit possible de povoir pour lors ouvrir la terre qui estoit gellée tant estions foibles, et avyons peu de puissance. Et si estions en une crainte merveilleuse des gens du pays qu'ilz ne se apperceussent de nostre pitié et foiblesse. Et pour couvrir ladicte maladie lors qu'ilz venoient pres nostre fort nostre cappitaine que Dieu a tousjours preservé, debout sortoit au devant d'eulx avec deux ou trois hommes, tant sains que malades. Lesquelz faisoit sortir apres luy. Et lors qu'il les voyoit hors du fort, faisoit semblant les vouloir battre en criant et leur gectant bastons apres eulx, les envoyant à bort monstrant par signes esdictz sauvages qu'il faisoit besongner tous ses gens dedans les navires les ungs à gallefestrer, les aultres à faire du pain et aultres besongnes, et qu'il ne estroit pas bon qu'ilz vinsent donner de hors. Ce qu'ilz croyent, et faisoit ledict cappitaine battre et mener bruict esdictz malades dedans les navires avec bastons et caillousz faignans callefestrer. Et pour lors estions si esprins de ladicte maladie que avions quasi perdu l'esperance de jamais retourner en France si Dieu par sa bonté infinie et misericorde ne nous eust regardé en pitié et donné congnoissance d'ung remede contre toutes maladies le plus excellent qui fut jamais veu ny trouvé sur la terre, ainsi qu'il sera faict mention en ce chapitre.
    Le nombre de temps que nous avons esté au hable saincte Croix et places dedans les glaces et neiges, et le nombre de gens decedez depuis le commencement de la maladie jusques à la my Mars.
Depuis la my Novembre jusques au quinziesme jour d'Apvril, avons esté continuellement enfermez dedans les glaces, lesquelles avoient plus de deux brasses d'espesseur. Et dessus la terre avoit la haulteur de quatre piedz de neiges et plus, tellement qu'elle estoit plus haultes que les bortz de noz navires : lesquels les ont duré jusques audict temps, en sorte que nos breuvages estoient tous gellez

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