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Voyage en Germanie

Voyage en Germanie

Titel: Voyage en Germanie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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l’administration occupait le plus bel emplacement. Étant donné que personne n’a envie de se charger des problèmes de logement, ce sont toujours les employés des bureaux qui décident de l’organisation au sein de la forteresse. Et bien entendu, ils se réservent la partie la plus agréable.
    Un secrétaire notarial chauve nous désigna d’un mouvement de tête la suite somptueuse que la Quatorzième avait réquisitionnée. Le calme régnait. Ce qui signifiait soit que la légion était un ramassis de flemmards inefficaces, soit que le travail de la journée était déjà expédié et classé. Peut-être que leur légat faisait la sieste chez lui, et que le préfet du camp avait un rhume. Peut-être que les tribuns s’étaient tous rués sur une journée de permission pour aller chasser. Je réservai mon opinion. Du moment qu’ils gardaient des greniers pleins, un décompte des armes soigneux et un registre au jour le jour de ce qui entrait dans les coffres de la banque d’épargne, Vespasien n’était pas homme à ergoter sous prétexte qu’on se la coulait douce dans les services de ravitaillement de la Quatorzième. Ce qui l’intéressait, lui, c’était le résultat.
    Dans la plus grande salle, nous trouvâmes deux gradés de la légion. L’un, qui n’était pas un combattant, portait une tunique rouge mais pas de cuirasse. Son casque pendait à un clou, orné des deux cornes qui lui valaient son appellation de cornicularius : tête du service. À mon avis, ces petites cornes constituent un apport humoristique de la légion, visant à donner l’air ridicule aux chefs de sa bureaucratie. Son compagnon, lui, n’était pas de la même espèce. Un centurion en grand attirail, dont une série complète de phalerae, les neuf médaillons pectoraux décernés en échange de services dévoués. L’homme avait plus de 60 ans, et le mépris enraciné qui se lisait sur son expression m’apprit qu’il s’agissait du primipilus, le premier pilum, centurion en chef. Ce grade couru est attribué pour trois ans, au terme de quoi vient s’ajouter une prime de démobilisation équivalant à un revenu de classe moyenne, et un passeport d’accès à des emplois civils privilégiés. Certains, et je flairais que celui-là devait en faire partie, choisissent de reconduire leur mandat de primipilus, se donnant ainsi le rôle de menace publique auquel ils sont on ne peut plus rompus. Blanchir et mourir sous le harnais au cœur de quelque province désolée est l’idée que se fait le primipilus d’une bonne vie.
    Celui-ci avait un cou bref, épais, et une mine à écraser les mouches à coups de bélier pour se distraire. Sous ses larges épaules, son torse s’amenuisait à peine jusqu’à la ceinture, mais sous le poitrail, on ne voyait pas l’ombre d’une amorce de bedaine. Il avait de petits pieds. Il ne bougeait pratiquement pas en nous parlant, mais je me dis qu’il devait être vif quand l’envie le prenait de se mouvoir. Il m’inspirait de l’aversion. Sentiment parfaitement superflu. Lui non plus ne m’appréciait pas : c’est ça qui allait compter.
    Le cornicularius était beaucoup moins impressionnant physiquement, avec son nez en trompette et sa petite bouche au pli amer. Son manque de prestance, il le compensait en fiel et en faconde.
    Au moment où nous entrâmes, les deux hommes étaient en train de tailler en pièces un soldat ayant commis quelque délit, comme poser une question naïve. Ils y prenaient grand plaisir et semblaient prêts à humilier leur victime tout l’après-midi durant, à moins que surgisse quelqu’un qui les écœure encore plus. Ce fut le cas : Xanthus et moi apparûmes.
    Ils conseillèrent au soldat de disparaître au fond de son fourreau de glaive ou quelque chose d’approchant. Il quitta la pièce, se coulant devant nous d’un air reconnaissant.
    Primipilus et cornicularius nous toisèrent, s’échangèrent un regard, puis nous dévisagèrent de plus belle, l’air railleur, en attendant que la rigolade commence.
    — Je n’en crois pas mes yeux ! s’écria le primipilus.
    — Qui a laissé entrer cette racaille ? Quelqu’un a dû assommer les gars du poste de garde ?
    — Quelle bande d’enfoirés de laxistes, ces gars de la Première !
    — Bon après-midi, risquai-je depuis l’embrasure de la porte.
    — Dégage, frisette ! gronda le primipilus. Et embarque ta gonzesse avec.
    Dans ma partie, les insultes sont monnaie courante, aussi attendis-je

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