1914 - Une guerre par accident
franquiste. Il avait cinquante
et un ans. Les cendres de Jean Jaurès furent déposées au Panthéon en 1924.
*
À la fin de la guerre, anéanti par l’effondrement de la
Hamburg-Amerika Linie qui était l’œuvre de sa vie, Albert Ballin se suicida à
Hambourg le 9 novembre 1918. Avant sa mort, il confia :
« Il n’était pas nécessaire d’être un Bismarck pour prévenir cette guerre,
la plus bête de toutes. »
Au début de la guerre, Max Warburg fut nommé par le Kaiser à
la tête des services secrets allemands. Aux États-Unis, son frère Paul devint,
quant à lui, l’architecte de la future Federal Reserve Board. Max resta
influent après la guerre, tâchant de ralentir la montée au pouvoir des nazis.
En 1933, il siégeait encore au bureau exécutif de la Reichsbank sous la
direction du gouverneur Hjalmar Schacht. Warburg dut cependant émigrer aux
États-Unis en 1938 où il demeura jusqu’à sa mort, huit ans plus tard.
Pendant la guerre, sir Ernest Cassel poursuivit ses
opérations financières fructueuses dans des pays aussi sûrs que la Suède,
l’Égypte, ou encore le Mexique et l’Uruguay. Quand il mourut en 1921, on évalua
son héritage à 400 millions de francs suisses de l’époque.
La guerre fut une aubaine pour Basil Zaharoff qui noua des
relations de plus en plus étroites avec Lloyd George, Aristide Briand ou
Georges Clemenceau. Ce dernier le décrirait en ces termes : « Vieux
Grec d’Odessa qui gagne cent mille francs par jour, fume les cigares les plus
chers du monde, très beau, l’air d’un Tintoret, très généreux, splendide
aventurier, roi secret de l’Europe. » Zaharoff travailla surtout à faire
basculer la Grèce du côté des Alliés malgré les liens familiaux du roi
Constantin avec le Kaiser. Il aurait consacré plus de 50 millions de
livres sterling pour faire destituer Constantin. Reconnaissant, le Royaume-Uni
l’éleva à la dignité de baron. Après la guerre, sir Basil se consacra à
des trafics d’armement plus discrets, vers des puissances moyennes. Il
s’intéressa également au pétrole et s’associa avec le prince Louis II de
Monaco pour contrôler la Société des Bains de Mer qui gérait le casino de Monte-Carlo.
Zaharoff intervint à plusieurs reprises pour que les droits de la Principauté
de Monaco soient garantis par la France. Il mourut à Monaco en
novembre 1936.
*
Albert de Mun eut à peine le temps de voir le déclenchement
de cette guerre de revanche qu’il avait tant appelée de ses vœux. Il fonda
aussitôt l’œuvre des aumôniers volontaires. Replié sur Bordeaux, sur la demande
expresse de Poincaré, de Mun y succomba d’une crise cardiaque à l’âge de
soixante-treize ans, en octobre 1914.
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Profondément autrichien, Stefan Zweig n’abdiqua pourtant pas
ses conceptions humanistes et pacifistes pendant la guerre, cultivant notamment
son amitié pour Romain Rolland. Favorable à une l’Europe unifiée, il se
consacra entièrement à l’écriture, multipliant nouvelles, essais et
biographies. Affectée par l’effondrement des Habsbourg et de l’Autriche, son
activité créatrice se développa jusqu’à l’avènement des nazis. En 1934, Zweig
dut fuir Vienne pour l’Angleterre, ses œuvres ayant été interdites par le
régime hitlérien. Établi au Brésil à partir de 1941, désespéré, ses rêves
d’humanisme anéantis, il se suicida l’année suivante en compagnie de son
épouse.
Envoyé sur les champs de bataille de Lorraine, dès
août 1914, le lieutenant Charles Péguy mena ses hommes devant Metz avant
de se replier sur l’Aisne. En septembre, à Villeroy, au cours des combats de la
bataille de la Marne, Péguy fut tué d’une balle en plein front.
Revenu à son ambassade londonienne peu après sa
mobilisation, Paul Morand retrouva Philippe Berthelot au Quai d’Orsay en 1916.
À la fin de la guerre, il s’éloigna peu à peu de la carrière et continua à
s’amuser beaucoup même s’il se prétendait « veuf de l’Europe ». Dandy
dans l’âme, il multiplia poèmes, nouvelles ou récits de voyage. Dans les années
vingt, sa notoriété littéraire était devenue considérable tandis que son style
de vie, aux côtés de son épouse la richissime princesse roumaine Hélène Soutzo,
défrayait la chronique. Mis à la retraite d’office en 1940, Morand refusa de
rester à Londres avec le général de Gaulle. Il rentra en France occupée et fut
nommé par Laval ambassadeur en
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