1914 - Une guerre par accident
esprits.
Clemenceau sortit de la guerre fort d’une popularité inégalée qu’illustrait son
surnom de « Père la Victoire ». À la Conférence de la Paix, à Paris
en 1919, Clemenceau défendit une ligne intransigeante visant à faire payer
l’Allemagne au maximum. On l’accusa, par la suite, d’avoir perdu la paix et
suscité un sentiment de revanche en Allemagne. Battu contre toute attente à
l’élection présidentielle de 1920, il se retira définitivement de la vie
politique et passa son temps à voyager et à écrire plusieurs ouvrages jusqu’à
sa mort en novembre 1929.
Ayant dû céder, dès le début de la guerre, le portefeuille
des Affaires étrangères à Gaston Doumergue, René Viviani demeura à la tête du
gouvernement jusqu’en octobre 1915. Remplacé par Aristide Briand, il
devint garde des Sceaux en même temps que ministre de l’Instruction publique.
Il revint par la suite à la diplomatie en représentant la France à la Société
des Nations en 1920-1921. De plus en plus fragile psychiquement, il fut élu
sénateur en 1922 et le resta jusqu’à sa mort trois ans plus tard.
Aristide Briand, l’homme qui fut dans sa carrière politique
onze fois président du Conseil et vingt fois ministre, revint aux affaires en
1916. Après la guerre, il s’employa à barrer à Clemenceau la route de la
présidence de la République. Devenu un des hommes forts du régime, il eut en
charge la diplomatie française qu’il l’orienta dans une perspective de paix et
de collaboration internationale. Favorable aux accords de Locarno, il fut
également l’un des coauteurs du pacte Briand-Kellogg, avant d’être l’artisan,
en 1929, d’un projet d’union européenne. Présenté comme un apôtre de la paix,
Briand travailla surtout au rapprochement avec l’Allemagne, en la personne de
son chancelier Gustav Stresemann. Les deux hommes seraient récompensés de leur
action par le prix Nobel de la Paix. Briand fut cependant critiqué en France
pour son obstination à défendre une paix impossible, à soutenir un pacifisme
hors de saison et à faire preuve d’une certaine naïveté au regard de la
situation internationale. Il disparut en 1932.
Malgré le début des hostilités, Joseph Caillaux maintint son
opposition à la guerre. Défenseur d’une paix sans annexion ni indemnité, il fut
accusé de trahison en 1917. Arrêté en janvier 1918 pour intelligence avec
l’ennemi, il fut condamné en février 1920 à trois ans d’emprisonnement et
à la privation de ses droits civiques. Il fut amnistié en janvier 1925
puis, totalement réhabilité, redevint aussitôt sénateur et ministre des
Finances. Caillaux développa une politique budgétaire condamnée tant par la
gauche que par ses amis politiques. Battu par Édouard Herriot pour la
présidence du parti radical, il redevint ministre et se fixa pour mission
d’assainir vigoureusement les finances publiques. Président de la commission
des finances du Sénat, Caillaux avait retrouvé tellement d’autorité qu’on le disait
capable d’abattre des gouvernements, comme celui de Front populaire. En
juillet 1940, Caillaux fit partie des parlementaires qui votèrent les
pleins pouvoirs au maréchal Pétain avant de se retirer de la vie politique. Il
mourut, oublié de tous, en novembre 1944, laissant une image sulfureuse et
contrastée.
Ministre de la Guerre, Adolphe Messimy fut remplacé dès la
fin août 1914 par Alexandre Millerand. Ancien officier de carrière, il
reprit alors un commandement au front pour finir avec le grade de général. Par
la suite, il fut sénateur de l’Ain jusqu’à sa mort en 1935. Son collègue du
gouvernement, Abel Ferry, s’engagea également dans l’infanterie, tout en
conservant un temps son portefeuille ministériel. Nommé délégué au contrôle,
commissaire aux armées, le neveu « adoré » de Jules Ferry mourut sur
le front en septembre 1918. Éloigné un temps de la vie gouvernementale,
Louis Barthou redevint ministre de septembre 1917 jusqu’en 1934, malgré de
brèves parenthèses d’opposition. Député puis sénateur des Basses-Pyrénées, élu
à l’Académie française en 1918, il fut assassiné à Marseille en
octobre 1934 en même temps que le roi Alexandre I er de
Yougoslavie. Élu lui aussi à l’Académie française, Alexandre Ribot redevint
président du Conseil en mars 1917. Il ne dura que six mois à ce poste et
se retira progressivement de la vie publique jusqu’à
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