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1940-De l'abîme a l'espérance

1940-De l'abîme a l'espérance

Titel: 1940-De l'abîme a l'espérance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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trousseaux. Le mot « France », brodé en blanc sur fond kaki, doit être cousu sur les manches du blouson britannique.
    « Au rapport du soir, la section prend une allure martiale dont nous sommes très fiers. »
    Parmi ces jeunes hommes, un « vieux » sergent de trente-cinq ans, professeur, simple, direct, courtois, empreint d’une gentillesse naturelle qui le rend attentif aux autres. Il se nomme Raymond Aron, et Daniel Cordier l’écoute analyser la situation avec une lucidité et une rigueur implacables.
    « Il y a un mois que Pétain a demandé l’armistice, dit Aron. Les Allemands occupent la moitié du pays. Nous sommes ici une poignée de volontaires. L’armée française qui stationnait en Grande-Bretagne a rejoint avec armes et bagages le Maroc. Pourtant, c’est ici que se joue l’avenir de la liberté, de la démocratie. »
    Cordier est subjugué. La simplicité et le style oral d’Aron transforment les ténèbres en lumière.
    « Si Hitler ne débarque pas ici et n’est pas vainqueur cet été, il perdra la guerre, ajoute Aron. Mais la victoire n’est pas pour demain. En attendant, il n’y a pas d’autre voie que de préparer la bataille, ni d’autre issue que la victoire. »
     
    Ce mot de « victoire », à Vichy, autour de Laval et de Pétain, rime avec Allemagne.
    Personne ne semble imaginer que le Reich puisse être vaincu par cette Angleterre isolée.
    Hitler se prépare à signer un pacte à trois, associant le Japon et l’Italie au Reich.
    Toute l’Europe continentale est sous le contrôle de l’armée allemande. La Russie de Staline, si elle élargit son glacis, livre scrupuleusement au Reich produits agricoles et matières premières.
    Et les communistes, orchestrés par le Komintern – l’ Internationale que dirige Moscou –, appellent à la paix et non à la résistance. À Bruxelles comme à Paris, ils condamnent les « ploutocrates » stipendiés de Londres et juifs, bien entendu.
    Ce sont eux les responsables de ce déclenchement de la guerre : Blum et Mandel, Daladier et Reynaud, coupables, et non pas M. Hitler ! Ces propos sont le décalque de la propagande allemande.
     
    À Vichy, on veut donc faire entrer la France dans le nouvel ordre européen que construit autour d’elle l’Allemagne. Et pour cela, il faut en finir avec le « système » républicain, responsable du désastre.
    Pétain, Laval, Darlan, Weygand « veulent faire table rase de tout ce que la France a représenté au cours des deux dernières générations », constate un diplomate américain.
    Adrien Marquet, le plus proche de Laval, dresse le réquisitoire du régime vaincu.
    « C’est une politique néfaste, économique et sociale épuisée qui, au premier choc des armées allemandes, s’est effondrée sur nos têtes. Nous sommes sous les décombres du régime capitaliste libéral et parlementaire. »
    Et Baudouin, secrétaire d’État aux Affaires étrangères, ajoute :
    « Nous avons vécu vingt ans d’erreurs et de mécontentement. Nous vivions sous une caricature de démocratie. Depuis des années, la France a vécu sous le régime de la lâcheté et du mensonge… »
     
    C’est à l’hôtel du Parc, situé au centre de Vichy, que s’élabore la politique du gouvernement Pétain.
     

     
    Le Maréchal dispose au troisième étage d’un bureau et d’une chambre. Dans la pièce voisine, loge l’officier d’ordonnance, le capitaine Bonhomme, jalousé par tous les intrigants, et d’abord par le docteur Ménétrel qui peu à peu deviendra le plus proche des collaborateurs du Maréchal.
    Tout ce troisième étage est consacré aux services de la présidence du Conseil.
    Au premier étage, est situé le ministère des Affaires étrangères ; et au second, Pierre Laval, vice-président du Conseil. Laval peut ainsi contrôler les allées et venues des uns et des autres. Car l’hôtel du Parc comme l’hôtel Majestic, et tous les lieux investis par le gouvernement Pétain et ses rouages, grouillent d’intrigues.
    Gouverner et représenter la France dans ces conditions est une gageure.
    Mais Pétain et ses ministres ont la certitude que la paix est proche, et les Allemands ont promis, lors des discussions d’armistice, qu’ils laisseraient le gouvernement s’installer à Paris et à Versailles.
     
    On vit avec cet espoir.
    Le soir, Laval rentre chez lui, dans sa propriété de Châteldon.
    Pétain, au milieu de l’après-midi, fait une courte promenade

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