1941-Le monde prend feu
Moscou !
Il n’y avait pas d’autre stratégie.
Il avait écouté ceux qui, comme l’amiral Raeder et aussi le
Reichsmarschall Goering, prétendaient qu’il fallait frapper la Grande-Bretagne
en Méditerranée :
« Elle a toujours regardé la Méditerranée comme le
pivot de son Empire », répétait Raeder.
Mais les Italiens de Mussolini qui avaient attaqué les
Britanniques capitulaient partout, en Cyrénaïque, en Libye, en Somalie, en
Érythrée, en Éthiopie.
Leurs soldats étaient ces prisonniers en loques dont les
longues files s’étiraient entre les dunes du désert !
Et il faudrait tenter de les sauver, là, sur les terres africaines
mais aussi en Grèce, où leurs troupes reculaient, poursuivies jusqu’en Albanie !
On ne pouvait compter que sur le soldat allemand, fils
héroïque de la nation germanique.
Hitler s’était adressé à Franco, invitant le Caudillo
espagnol à rejoindre l’Allemagne et l’Italie, à donner l’assaut contre
Gibraltar :
« Une chose est essentielle, Caudillo, avait déclaré
Hitler : parler net. La vie et la mort sont les enjeux de notre combat et
à pareille heure nous ne pouvons plus faire de cadeaux. La lutte que mènent l’Allemagne
et l’Italie décidera du sort de l’Espagne autant que du leur. Seule la victoire
de l’Axe permettra la survivance de votre régime actuel. »
Mais Franco était aussi habile et retors que Staline ! Il
assurait Hitler de son « absolue loyauté », tout en gardant d’excellentes
relations avec l’ambassadeur britannique Samuel Hoare. Et surtout, il
consultait les cartes de la Cyrénaïque qui, tenues à jour, permettaient de
suivre le recul des troupes italiennes devant l’offensive anglaise du général
Wavell !
Pourquoi s’engager militairement aux côtés de l’Axe, alors
que les généraux italiens et le plus glorieux d’entre eux, Graziani, prenaient
leurs jambes à leur cou ?
Hitler n’était pas dupe du « fastidieux boniment
espagnol ».
Il l’écrit à Mussolini :
« En un mot comme en cent, l’Espagne ne veut pas faire
la guerre avec nous et ne la fera pas. Ce refus est extrêmement fâcheux, car il
nous frustre, momentanément, du moyen le plus direct de frapper l’Angleterre
dans son domaine méditerranéen. »
En fait, Hitler a le sentiment que les événements – la
défaite italienne, le refus du général Franco, les ruses et les ambitions de
Staline, l’obstination stupide de Churchill –, le destin lui signifiaient
que la seule route qui s’offrait à lui était celle de la guerre contre la
Russie.
Il avait choisi l’opération Barbarossa , il y avait
quelques semaines.
Maintenant, le destin la désignait comme nécessaire, inéluctable.
Le 8 janvier 1941, le Führer réunit dans son nid d’aigle
du Berghof son Conseil de guerre.
La neige qui couvre les pentes et les cimes de l’Obersalzberg
étincelle, tant la lumière du soleil est éclatante.
Au Berghof, on est dans la pureté du ciel.
Le brouillard et les nuages forment une couche grisâtre qui
masque les vallées, les villages, Berchtesgaden.
L’air est vif.
En marchant sur la terrasse ensoleillée du Berghof, on a l’impression
de le déchirer, de le froisser. Il fait un froid sec.
Les généraux et les amiraux, de Halder à Raeder et à Goering,
se pressent autour du Führer.
Il exulte, évoque tout en allant et venant sur la terrasse
les richesses fabuleuses que contiennent les immenses espaces de la Russie.
« En trois semaines, nous serons à Saint-Pétersbourg, dit-il.
Et quand la Russie s’effondrera, le Japon pourra enfin entreprendre cette
expansion vers le sud, toujours repoussée par crainte de la menace soviétique. Quant
à l’Allemagne, elle doit dominer la Russie sans l’annexer, elle pourra faire la
guerre à d’autres continents. »
On s’installe dans l’une des grandes salles de réunion du
Berghof.
« Notre situation en Europe ne risque plus de s’altérer,
commence Hitler, même si la totalité de l’Afrique du Nord nous échappe. Notre
position est si fermement assise qu’une issue défavorable est devenue
impossible. La Grande-Bretagne ne peut espérer gagner la guerre qu’en nous
battant sur le continent, éventualité tout aussi impossible. »
Il dévisage ces généraux, raides dans leurs uniformes. Et
leur présence, leur soumission l’exaltent.
Lui, Adolf Hitler, il les domine, il les conduit, comme une
meute
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