1941-Le monde prend feu
centre de laquelle, sur une large table, des cartes sont
déployées.
Il annonce qu’il rentrera à Berlin, demain ou après-demain. Et,
d’un geste, il demande qu’on convoque ici Ribbentrop.
C’est le ministre des Affaires étrangères qui, le 23 novembre
1941, il y a donc à peine plus d’une semaine, a déclaré à l’ambassadeur
japonais à Berlin, Oshima :
« Ainsi que vient de le rappeler le Führer, les droits
à l’existence de l’Allemagne, du Japon et des États-Unis présentent des
différences fondamentales. Nous savons aujourd’hui de façon certaine qu’en
raison de l’attitude intransigeante des États-Unis, les négociations en cours
entre Tokyo et Washington ne peuvent aboutir qu’à un échec.
« Si le Japon accepte de combattre la Grande-Bretagne
et les États-Unis, j’ai la certitude que cette décision lui sera favorable tout
autant qu’à l’Allemagne. »
Et pour que l’ambassadeur japonais n’ait aucun doute sur l’engagement
du Reich, Ribbentrop précise après avoir sollicité l’accord de Hitler :
« Si le Japon déclare la guerre aux États-Unis, l’Allemagne
fera de même instantanément. En de telles circonstances, il ne peut être
question de négocier une paix séparée. Le Führer est formel sur ce point. »
Mais il faut préparer l’opinion allemande, et aussi l’opinion
américaine, où Hitler sait qu’il existe un fort courant hostile à l’entrée en
guerre.
Un diplomate longtemps en poste à Washington – Hans
Dieckhoff – prépare un mémorandum.
« On doit souligner, insiste-t-il, que le vrai danger
que court l’Amérique s’appelle Roosevelt. Il faut mettre l’accent sur l’influence
des Juifs à la Maison Blanche, nommément Frankfurte, Baruch, Cohen, Morgenthau.
« Le slogan de toutes les mères américaines doit être :
“Mourir pour l’Angleterre ? Non, mon fils a mieux à faire.” »
La déclaration de guerre pourrait intervenir le 11 décembre,
après un discours du Führer au Reichstag.
D’ici là que Goebbels rappelle que des navires allemands ont
été attaqués par des destroyers américains, que les États-Unis se sont
installés en Islande, qu’ils approvisionnent la Grande-Bretagne et la Russie de
Staline.
Il faut écrire, faire écrire que « Roosevelt est l’homme
qui pour dissimuler l’échec du New Deal a provoqué la guerre. L’homme
qui, soutenu par les Juifs et les milliardaires, porte la responsabilité de la
Seconde Guerre mondiale ».
Hitler, tout au long de la soirée du 7 décembre 1941, entouré
de quelques familiers (Bormann, Ribbentrop qui vient d’arriver au grand
quartier général, cette Tanière du Loup – Wolfschanze), parle d’une
voix exaltée.
« Les Américains n’ont pas d’avenir, dit-il. L’Amérique
est un pays pourri. Le problème racial et les inégalités sociales y sévissent. »
Tout son visage se crispe.
« L’Amérique ne m’inspire que de l’aversion et le plus
profond dégoût… Mi-enjuivée, mi-négrifiée, voilà la société américaine, tout
son comportement vient de là : comment espérer qu’une telle nation, un tel
État où tout est construit sur le dollar puisse tenir debout ? »
Ribbentrop s’éloigne.
Il va sur ordre du Führer téléphoner à Ciano, le ministre
des Affaires étrangères italien, pour l’informer de la prochaine déclaration de
guerre aux États-Unis. Ciano note dans son journal :
« Cette nuit, appel téléphonique de Ribbentrop. Il est
ravi de l’attaque japonaise. Tellement ravi que je n’ai pu m’abstenir de le
féliciter tout en éprouvant personnellement quelques doutes sur les
conséquences de l’événement… Mussolini en est heureux lui aussi. Depuis
longtemps, il souhaite que se clarifie la situation entre l’Amérique et l’Axe. »
Au matin du lundi 8 décembre, Hitler réunit à son grand
quartier général une conférence pour définir « sous quelle forme les
modalités de la déclaration de guerre à l’Amérique pourront impressionner
favorablement le peuple allemand ».
Le Führer retient l’amiral Raeder et donne l’ordre à la
Kriegsmarine « de couler les bâtiments américains partout où elle les
rencontrerait ».
La déclaration de guerre n’a pas encore été transmise, mais
qu’importe ! Les navires américains ont attaqué des navires allemands !
« De tels actes ont créé de facto l’état de guerre », dit le
Führer.
Le
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