1942-Le jour se lève
pour Pétain, ni d’« illusions
dérisoires sur le redressement possible de chefs prosternés dans la boue ».
Qui pourrait croire que « ceux qui sont allés sur le sol frémissant de la
patrie martyrisée, mettre leur main dans la main de Hitler, sortiraient jamais
du déshonneur » ?
Une seule issue pour les Français : la lutte « contre
l’ennemi et contre les gens de Vichy qui sont les complices de l’ennemi ».
Et de Gaulle, ce 18 avril 1942, va plus loin qu’il n’a jamais été en
déclarant : « La libération nationale ne peut être séparée de l’insurrection
nationale. »
Pour de Gaulle il n’y a pas d’autre issue que de parler haut
et fort, à la fois pour imposer la souveraineté et l’indépendance de la France
aux Américains et aux Anglais, et pour faire entendre la voix de la Résistance.
De Gaulle n’est dupe ni des intentions des Alliés à l’égard
de la France Libre, ni des arrière-pensées des chefs de la Résistance qui le
soupçonnent de ne pas être aussi républicain qu’ils le souhaiteraient.
Les Anglais et les Américains, eux, agissent brutalement aux
Antilles, en Nouvelle-Calédonie, en Orient, à Madagascar. Les Américains
traitent avec les représentants de Vichy !
Et pendant ce temps, l’Allemand, grâce, reconnaît-il,
« à la qualité de sa collaboration avec la police française », arrête,
condamne, fusille plus d’une centaine d’otages à Paris, 55 à Lille, 40 à Caen.
La répression, dirigée maintenant par le général SS Karl
Oberg, est efficace. Oberg, Hoherer SS und Polizei Führer , s’est
installé dans de vastes locaux, 57, boulevard Lannes.
Il prend conscience de la gravité de la situation. Chaque
jour, en ce printemps 1942, il y a une action violente – meurtre, attentat,
sabotage, manifestation de rue ; ainsi rue de Buci à Paris – contre
la Wehrmacht.
Oberg organise une coopération quotidienne avec René
Bousquet, qui met les sections « anticommunistes » de la police au
service de l’occupant, en même temps que la préfecture de police dresse le
fichier complet, tenu à jour, des Juifs français et étrangers.
Face à cette répression, la résistance s’organise.
Jean Moulin parcourt la France : il est Max, Rex, Régis,
prépare l’ouverture d’une galerie de peinture, à Nice, couverture commode pour
un ancien préfet « limogé » par Vichy, et qui semble ainsi se vouer à
des activités de marchand d’art.
Peu
à peu, il contrôle les communications radio de la Résistance avec Londres, il
recense et équipe les aires d’atterrissage et de parachutage, et il tient ainsi
sous contrôle les livraisons d’armes en même temps qu’il dispose des fonds à
attribuer.
Son but est d’unir la Résistance autour du général de Gaulle.
Il crée un Bureau d’information et de propagande qui diffuse les thèmes
élaborés à Londres, répartit le matériel de propagande et transmet à Londres
les informations obtenues par les mouvements de résistance. En même temps, Moulin
organise le départ – puis le retour – des chefs de la Résistance vers
Londres.
Rémy, Pierre Brossolette, des hommes politiques souvent
socialistes (Christian Pineau, Félix Gouin) font ainsi l’aller et retour entre
la France occupée et la « France Libre ».
De Gaulle peut donc « prendre le pouls » de la
Résistance, en même temps que les préjugés antigaullistes tombent.
Ces voyages sont périlleux. L’avion – un Lysander –
atterrit sur un terrain sommairement balisé. Il dépose des « passagers »,
en embarque sans s’arrêter plus de quelques minutes.
La voie maritime est plus longue.
D’Astier de La Vigerie monte à bord d’un sous-marin
britannique au large d’Antibes. Il rejoint ainsi Gibraltar, après de nombreuses
arabesques, et gagne enfin, en avion, Londres. Le voyage aura duré une
vingtaine de jours…
Cette rencontre de Gaulle-Résistance (dans quelques mois, on
dira entre les Forces Françaises Libres – FFL – et les Forces
Françaises de l’intérieur – FFI) renforce de Gaulle, au moment où les divergences
sont nombreuses entre France Libre et Alliés.
Washington et Londres recherchent peut-être l’affaissement
de la France, afin de s’emparer de son Empire et d’installer leur domination en
Europe, une fois l’Allemagne vaincue.
De Gaulle sent bien qu’on lui suscite des rivaux, hier l’amiral
Muselier, aujourd’hui le
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