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1943-Le souffle de la victoire

1943-Le souffle de la victoire

Titel: 1943-Le souffle de la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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morale, autrement dit en révolution, en même temps qu’elle est en
guerre. »
     
    Catroux
comprendra-t-il ? De Gaulle a confiance en ce général habile, diplomate-né,
fidèle et qui connaît bien Giraud. Mais peut-être Catroux ne mesure-t-il pas qu’il
faut parfois renoncer aux compromis, demeurer intransigeant.
    « Rien ne serait plus fâcheux et, j’ajoute, plus
douloureux qu’une discordance entre votre attitude et la mienne dans cette
conjoncture capitale », lui écrit-il.
    Car de Gaulle sent la tension monter. Chacun perçoit que c’est
pour la France le tournant décisif. Si Giraud l’emporte – et derrière lui
les Anglais et les Américains –, si l’union se fait selon le diktat de
Roosevelt, alors c’en est fini de la souveraineté française.
    On murmure que Roosevelt a un projet de partage du monde et
que Churchill, à quelques nuances près, l’accepte.
    États-Unis, Russie, Grande-Bretagne constitueraient une
sorte de directoire. La France et les petits pays européens – dont elle
ferait partie désormais – y seraient soumis. On remodèlerait ses frontières.
    « Roosevelt a préconisé la création d’un État appelé
Wallonie, qui comprenait la partie wallonne de la Belgique ainsi que le
Luxembourg, l’Alsace-Lorraine et une partie du nord de la France ! »
    La nation, une fois les Allemands chassés et vaincus, resterait
pour une année ou deux sous contrôle des armées d’occupation américaines !
    Voilà ce qui est en jeu, voilà pourquoi on veut le faire
céder.

 
8.
    De Gaulle ne cédera pas.
     
    Il a le visage fermé des jours de grande colère. Il sent la
France humiliée par ces « deux empereurs », Roosevelt et Churchill.
    Il a l’impression que sa bouche est remplie d’une salive
amère.
    Il a accepté à contrecœur de se prêter à cette mise en scène
de la conférence d’Anfa, de la séance de photographie avec le général Giraud, mais
la blessure qu’on lui a infligée, qu’il a subie, reste douloureuse.
    « Le général de Gaulle est revenu à Londres, note un
journaliste du New York Times, avec autant de soufre jaillissant de son
nez et autant d’étincelles jaillissant sous ses talons que lorsqu’il était
parti pour Anfa. »
    Il confie, avec une moue de dégoût et d’une voix méprisante,
hautaine :
    « Je n’aurais jamais consenti à vivre à Anfa, dans
cette maison sous la protection de barbelés et de baïonnettes américaines si je
n’avais appris qu’elle appartient à un Danois et non à un Français. »
    Et il rappelle qu’il a exigé que les sentinelles américaines
soient relevées par des hommes de la Légion étrangère sous commandement
français.
     
    Il y a plus grave.
    On lui a fait jouer les figurants. Toutes les décisions ont
été prises par Roosevelt et Churchill, comme si la France, son Empire, cette
Afrique du Nord française n’existaient plus !
    Voilà la vraie blessure.
     
    Pire encore.
    Il voudrait se rendre en Algérie, voire en Syrie, et
pourquoi pas à Moscou afin d’échapper aux pressions et à la surveillance
anglo-américaines.
    Mais on lui remet une lettre du Foreign Office qui est une
interdiction de quitter l’Angleterre en le soumettant à un chantage : on
lui fournira un avion après qu’il aura conclu un accord avec le général Giraud !
    De Gaulle relit la lettre, dents serrées :
    « Le gouvernement de Sa Majesté pense qu’il serait plus
sage que le voyage du général de Gaulle ne soit pas entrepris, tant que les
relations entre le Comité national – que de Gaulle préside – et l’administration
d’Alger – aux mains de Giraud – ne sont pas encore réglées. Le
gouvernement anglais regrette donc de ne pouvoir, pour le moment, accorder les
moyens que le général de Gaulle a demandés. »
    De Gaulle rejette la lettre, rugit :
    « Alors, je suis prisonnier ! »
    Il sort de son bureau à grandes enjambées.
     
    Il fulmine, il peste parce qu’il sait bien que Churchill et
Roosevelt ont pris des décisions majeures, vont déterminer les orientations de
la guerre et donc le destin de la France.
    « Je vois l’Afrique du Nord comme un tremplin et non
comme un sofa », a dit Churchill et, bien que relégué par Roosevelt au
rôle de second, il réussit à faire adopter par les Américains ses plans de
guerre.
     
    On bombardera l’Allemagne afin de briser la confiance de ce
peuple en son Führer. On transformera les villes en champs de

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