1944-1945-Le triomphe de la liberte
de
la supériorité militaire des officiers et des soldats britanniques que l’est
Monty.
« Il ne fait aucun doute, écrit Brooke, que Ike est
disposé à faire tout son possible pour maintenir les meilleures relations qui
soient entre Britanniques et Américains, mais il est tout aussi clair qu’il n’y
connaît rien en stratégie et que, pour ce qui relève de la conduite de la
guerre, il n’est pas du tout fait pour le poste de “commandant suprême”. »
Mais Ike est ce commandant suprême et il ne peut se laisser
entraîner dans les querelles dérisoires, ou être blessé par des propos qu’il
connaît, mais qu’il préférerait oublier.
Et il doit entendre aussi les conseils de Churchill qui se
considère comme un chef de guerre à qui les généraux doivent obéissance.
Et il doit affronter les exigences et les récriminations de
De Gaulle.
Alors, il fait installer dans le parc de son quartier
général – une grande demeure, Southwick House – une caravane
camouflée. Il se détend dans sa « roulotte de cirque », essayant
d’oublier pour quelques dizaines de minutes la tension qui augmente au fur et à
mesure que s’approche le 1 er juin.
Le 30 mai, le Feldmarschall von Rundstedt, commandant
en chef des forces armées de l’Ouest, assure au Führer que rien n’indique que
l’invasion soit immédiate.
15.
Au contraire du Feldmarschall von Rundstedt, les Français en
ce mois de mai 1944 sont persuadés que le Débarquement est pour dans quelques
jours.
Les dés roulent. Les hommes changent.
Les préfets nommés par Vichy lorgnent sur la Résistance, et
la Gestapo en arrête une dizaine. Elle interpelle aussi des hommes qui furent
les plus proches conseillers de Pétain.
Le Maréchal se confie au représentant de la Suisse qui,
notant les termes de cette conversation intime, souligne combien Pétain
manifeste sa détresse.
« Très nerveux, très déprimé, Pétain me fit remarquer
qu’on lui avait enlevé ses conseillers, qu’il n’avait aucune expérience
politique, qu’il avait été victime d’une pression inouïe… Il avait cédé
souvent, trop souvent… »
Il a à nouveau cédé puisqu’il a obéi aux Allemands qui
l’obligent à quitter Vichy.
Il ne le regrette pas.
Il a pu parler aux Parisiens. Il s’est rendu à Rouen, mais
les décombres du centre de cette ville bombardée l’empêchent de pénétrer dans
la cathédrale. Il regagne sa résidence, le château de Voisins, proche de
Rambouillet. Il y reçoit Laval, Déat, Darnand, et même von Rundstedt.
On perçoit comment, habilement, il se dégage de la
collaboration, évoque ses « gardiens » auxquels il réussit à échapper
afin d’aller à la rencontre des Français. Il renoue ainsi avec l’image qu’il donnait
en juin 1940.
Quand le 19 mai le conseiller allemand Renthe-Fink lui
indique que le gouvernement du Reich souhaite le voir regagner le centre de la
France, le château de Lonzat situé à 17 kilomètres de Vichy, afin d’être
éloigné des côtes françaises, Pétain accepte, mais veut rendre visite aux
villes sinistrées de l’Est.
Les Allemands accèdent à sa demande, et voici Pétain sur la
place Stanislas à Nancy.
« Il n’a pas été facile de venir jusqu’à vous. Il a
fallu négocier, mais j’ai réussi à m’échapper », dit-il.
On l’acclame. Le soir, à l’hôtel de ville, 500 notables
se pressent pour le saluer.
Il se rend à Épinal, à Dijon.
Le 5 juin, il est à Lyon. Il visite les blessés des
bombardements et rencontre Charles Maurras.
Ce 5 juin, les premiers parachutistes, des Français,
ont été largués en Bretagne, en Normandie.
Laval téléphone au Maréchal et lui conseille devant la
gravité de la situation de rentrer immédiatement à Vichy.
Pétain s’obstine, il veut se rendre à Saint-Étienne, ville
ouvrière qui l’avait acclamé en 1941.
On l’applaudit.
D’un signe de main, il fait cesser les ovations.
« Grâce à vous, dit-il, je pars plus fort pour
accomplir ma tâche. »
La foule entonne La Marseillaise.
Pétain murmure :
« Où sont mes amis ? Où sont mes ennemis ?
Avec les Allemands, c’est tout simple. Mais les autres ? Les Français
m’acclament quand ils me voient. Mais demain, ils me renieront et ne me
pardonneront pas de les avoir sauvés. »
Pétain a ainsi, durant ce mois de mai 1944, dessiné la
silhouette qu’il veut présenter aux Français :
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