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22 novembre 1963

22 novembre 1963

Titel: 22 novembre 1963 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Adam Braver
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et se roulant dans l’herbe, et se mesurant dans la lutte corps à corps, puis ils s’étendaient près du ruisseau, dans l’ombre humide, sous les saules, chantant des chansons ou écoutant les bruits de la forêt toute proche ; la fraîcheur du soir les dégrisait, les airs de chansons résonnaient dans leur tête les emportant au loin à travers Dieu sait quelles forêts noires, Dieu sait quelles clairières pleines de lune, le long de rivières inconnues, vers les pays où vivent les fées et où toutes les dames aiment leurs amis.
    Un cerf blessé bramait après l’eau, et de très loin les échos de la forêt apportaient le cri du héron, des bruits d’ailes dans les branches des buissons faisaient courir comme un frisson dans la forêt silencieuse, et les jeunes gens tendaient l’oreille – « Un coq de bruyère », « Non, un faisan ». La rainette se mettait à pleurer, et on se signait, pris d’une brusque tristesse au cœur.
    — Dieu sait quelles âmes pleuraient dans cette voix. Et la nuit tombait, humide et douce, et les jeunes gens retournaient au château, et là les rires reprenaient de plus belle près des greniers et des écuries ; toutes les lumières étaient éteintes au château et dans la cour, et dans tout château on trouve toujours quelques filles d’humeur légère aimant bien rire les jours de fête quand le vin et les chansons tournent la tête à tout le monde.
    Herbert causait longuement avec le cousin Joceran, qu’il faisait dormir avec lui. Dieu sait pourquoi il estimait Joceran comme personne au pays ne l’estimait. Il n’avait pas l’habitude de demander conseil ; mais il comptait avec l’avis de Joceran. Herbert était très fier du sang de Puiseaux, sang de sa mère, et Joceran était le chef de la maison de Puiseaux. « Le sang maternel, disait Herbert, nous est forcément plus proche que le paternel », et il considérait un peu Joceran comme le vrai chef de la famille.
    « Beau cousin, disait-il, vous savez que je vous tiens pour mon ami, et ceci je vous le dis sans flatterie. Cette fête, je voudrais qu’elle soit déjà finie, elle me pèse sur le cœur parce qu’il faut tant manger et boire que j’en suis malade. Et il y aura encore la noce dans quinze jours, et ça me gâtera tant l’estomac que j’en aurai à me purger pendant trois semaines. Et voilà jusqu’ici la seule joie que j’ai de mon fils, la question d’héritage mise à part. Or, dites-moi franchement : que pensez-vous de lui ?
    — Un beau garçon, dit Joceran, et qui sait se tenir. Il vous fait honneur.
    — N’empêche qu’il a fait l’imbécile pendant le tournoi, et que tout le monde parle de mauvais présage. Je ne mets pas martel en tête pour cela – c’est comme il arrive que des garçons trop amoureux restent secs comme des bûches à leur nuit de noce ; et ça leur passe vite après. L’enfant a de bons jarrets et du goût pour la joute. Je ne m’en fais pas, non. Mais pour son humeur, dites-moi un peu ce qui vous en semble.
    — Je ne le connais pas, dit Joceran.
    — Mon cousin, vous êtes trop prudent. Et je sais que vous avez de bons yeux. Croyez-vous qu’il ait de mauvaises idées en tête ?
    — Je crois, dit Joceran, qu’il n’en a que de très bonnes.
    — Beau cousin, je vous ai déjà dit : parlez-moi franchement et sans me flatter. »
    Joceran souriait de son sourire de biais qui lui plissait la joue droite. «  Je sais ce que je dis. C’est un garçon sans malice. Mais pour dire qu’il ne vous causera pas d’ennuis, je ne le dis pas.
    — Hein ? disait Herbert, tout de suite inquiet, on vous a raconté quelque chose ? Je savais bien qu’il y avait quelque chose.
    — Hé, beau cousin, que voulez-vous que je sache ? Je suis plus vieux que vous, voilà tout. Et j’ai du flair. Le garçon a la cervelle au vent, il faut le surveiller. Vous savez comment sont les jeunes gens d’aujourd’hui. Un de ces jours vous verrez qu’il se jettera du haut d’un clocher pour faire plaisir à quelque belle dame.
    — C’est bien le pire, dit Herbert, il serait assez sot pour cela. Mais il n’a pas la cervelle au vent. Il tient de sa mère. Et c’est bien ma chance que mon seul fils légitime soit aussi le fils de cette garce. Les diables l’écorchent en enfer ! Molle comme une tripe et têtue comme une mule. Ah ! Dieu, si seulement ma putain de fille était un garçon ! »
    Il se retourna sur sa paillasse, cherchant une

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