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4 000 ans de mystifications historiques

4 000 ans de mystifications historiques

Titel: 4 000 ans de mystifications historiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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507.
    Quelle est l’origine de cette invention de Tolbiac ? Quelques lignes de Grégoire de Tours, seule source d’informations sur Clovis, bien que cet auteur ait écrit son Histoire ecclésiastique des Francs près d’un siècle plus tard : « Il [Clovis] avait avec lui comme auxiliaire le fils de Sigebert le Boiteux, nommé Chlodéric. » Et il explique : « Ce Sigebert boitait d’un coup qu’il avait reçu à la bataille de Tolbiac contre les Alamans. » De ce détail, on a déduit que la bataille avait eu lieu à Tolbiac, alors que rien dans ces lignes n’indique que Clovis eût alors combattu aux côtés de Sigebert.
    C’est à la veille de la bataille contre les Alamans qu’il se serait écrié : « Dieu de Clotilde, si tu me donnes la victoire, je croirai en toi ! » (Les paroles exactes varient d’un auteur l’autre.) Marchandage bien peu conforme à la théologie. Et histoire suspecte, parce qu’elle ressemble un peu trop au In hoc signo vinces de Constantin. Bref, il se convertit. Mais sans hâte : c’est un an plus tard que saint Rémi, en la cathédrale de Reims, l’apostrophera, non selon les termes qui ont connu tant de succès, « Courbe-toi, fier Sicambre… », mais « Abaisse humblement la tête, fier Sicambre… » Quant à la date exacte, elle défie l’érudition : on se contente en général de supposer qu’elle se situe entre 498 et 499, et l’on se garde de préciser à quel moment de l’année.
    Un évêque moderne, Mgr Saltet, a trouvé douteuse l’histoire du « vœu de Tolbiac ». Il note en effet que, lorsqu’il félicite Clovis pour sa conversion, saint Avit, évêque de Vienne, ne fait pas la moindre allusion au vœu du roi ni à sa victoire, omission singulière.
    A-t-on pourtant glosé sur le baptême du roi ! Il aurait imposé le christianisme en « France », voire la première église chrétienne, érigée à Lyon en 177. Depuis le règne de l’empereur romain Constantin (313), les chrétiens n’étaient plus persécutés dans l’empire, et depuis celui de Théodose (491), le christianisme était quasiment la religion de l’empire. Et ç’avait été dans une église que le fameux vase de Soissons avait été dérobé. Même la Burgonde Clotilde, l’épouse de Clovis – elle finira sainte, qui en aurait douté –, était chrétienne ; et, à la différence de son père, arianiste  (8) , elle était catholique. La population gallo-romaine est chrétienne et le clergé influent : Clovis se fait bien plus d’alliés que d’ennemis par son baptême.
    Clovis n’a certes pas introduit ni imposé le catholicisme en France. Et il s’en faudra que l’harmonie règne entre l’Église et l’État avant plusieurs siècles. La marque la plus forte que laisse Clovis avant sa mort en 511 est l’imposition de la loi salique, code pénal en soixante-cinq articles, qui romanise les coutumes germaniques en matière de justice et exclut les femmes des lignes de succession au trône. Finalement, ce prince belge était, comme son père, fidèle à l’esprit de l’empire, et ce fut pourquoi on dit que le Barbare romanisé l’avait emporté sur le Romain barbarisé.
    Mais la légende en fit un tout autre personnage, le « premier roi chrétien » pour les uns, « le valet de la réaction cléricale » pour les autres.
    En faire l’ancêtre, sinon « l’inventeur » de la France, est une théorie démentie par les faits. Le partage de ses possessions entre ses fils n’abolit nullement la ligne de scission entre le nord et le sud du pays que représentait la Loire. Pendant des siècles, les seigneuries de l’une et l’autre moitiés du pays entretiendront une méfiance réciproque. Onze siècles plus tard, sous Charles VII  (9) , l’unité nationale était loin d’être réalisée. Au regard des historiens, il apparaît plus comme le dernier sursaut dans la décomposition du mode gallo-romain que comme un précurseur.

732
    « Charles Martel arrêta les Arabes à Poitiers »,
ou l’escarmouche qui fit mouche
    L’une des exagérations les plus phénoménales de l’histoire s’enclencha presque immédiatement après l’événement qui en faisait l’objet. Ce fut le fait d’armes de l’arrière-petit-fils naturel d’un saint, cette « bataille de Poitiers », où les Sarrasins furent vaillamment arrêtés par Charles Martel.
    Celui-ci est le fils naturel de Pépin d’Héristal, ou d’Herstal, maire du palais du

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