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A l'écoute du temps

A l'écoute du temps

Titel: A l'écoute du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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son ami pour retourner dans
sa chambre.
     
    Il y eut un bref
silence dans la cuisine avant que Gérard Morin reprenne la parole.
     
    — Comme ça, vous
travaillez avec mon garçon? demanda Gérard, curieux de mieux connaître celui
qui avait aidé Jean-Louis à. obtenir un poste à la comptabilité chez Dupuis
frères.
     
    — Oui, monsieur.
     
    — Est-ce que ça
fait longtemps que vous travaillez là? demanda Laurette à son tour, adoptant,
comme son mari, le vouvoiement.
     
    — Onze ans,
madame Morin. Chez Dupuis, c'est une bonne place.
     
    — Vous êtes pas
marié? demanda-t-elle, curieuse.
     
    — Non. Il faut
croire que j'ai pas encore trouvé la fille qu'il me faut.
     
    — Ah! vous restez
chez vos parents, poursuivit Laurette.
     
    — Non, madame.
Mes parents restent en Gaspésie. J'ai un appartement.
     
    — Vous devez
trouver ça dur de vous faire à manger tout seul et de faire votre ménage?
     
    — Je me
débrouille, madame Morin. C'est sûr que mon appartement est pas aussi bien tenu
que si j'avais une femme, mais je pense que c'est pas trop malpropre.
     
    461 Sur ce,
Jean-Louis revint dans la pièce en endossant son paletot.
     
    — Je pense qu'on
est mieux d'y aller, fit-il remarquer à son ami qui s'était levé. Si on arrive
trop tard chez Chicoine, on va le déranger.
     
    Tous les deux
quittèrent l'appartement après avoir salué les parents.
     
    — Il est pas
laid, ce gars-là, fit remarquer Denise. S'il était pas si vieux, il pourrait
m'intéresser.
     
    — En plus, il est
ben habillé et il parle ben, ajouta son père.
     
    — Moi, j'aime pas
son genre, décréta Laurette. Comme disait mon père, il est trop poli pour être
honnête. En tout cas, on sait à cette heure de quoi il a Pair le fameux Jacques
Cormier.
     
    En se mettant au
lit ce soir-là, Laurette ne put s'empêcher de dire à son mari:
     
    — Il y a personne
qui va me faire croire que c'est normal qu'un homme dans la trentaine soit pas
marié. Je trouve ça bizarre que cet homme-là aime mieux se tenir avec un jeune
de dix-huit ans plutôt que de se chercher une femme.
     
    — Arrête donc de
t'en faire pour rien, lui ordonna Gérard en retirant son pantalon. Moi, je
trouve que c'est un gars pas mal intelligent. La meilleure preuve c'est qu'il a
pas l'air pressé pantoute de se mettre la corde au cou.
     
    Cette réplique
lui attira un coup de coude de sa femme quand il s'étendit dans le lit à ses
côtés.
     
    Le lendemain
matin, Laurette était debout à cinq heures quinze. L'appartement était plongé
dans le noir et il y faisait froid et humide. Elle réprima difficilement un
frisson.
     
    462 DES
SACRIFICES
     
    — Bonyeu!
jura-t-elle en serrant contre elle les pans de sa vieille robe de chambre, la
fournaise doit s'être éteinte.
     
    Elle avait
raison. La fournaise, faute de charbon, avait fini par s'éteindre durant la
nuit. Depuis qu'il avait souffert de la grippe, Gérard dormait mal, secoué
plusieurs fois par nuit par des quintes interminables de toux. Épuisé, il avait
oublié de se lever au milieu de la nuit pour alimenter la fournaise, comme il
le faisait toujours durant la saison froide.
     
    Laurette s'empara
du journal de la veille, en bouchonna quelques feuilles qu'elle jeta dans la
fournaise avant d'y déposer des éclats de bois et d'y jeter une allumette
enflammée. Quand le feu se mit à ronfler, elle ajouta quelques morceaux de
charbon. Elle reviendrait dans quelques minutes jeter un peu plus de charbon
sur les tisons rougis. Elle se dirigea ensuite vers la cuisine pour allumer le
poêle à huile.
     
    La mère de
famille avait mal dormi, réveillée à plusieurs reprises par la toux de son
mari. La dernière quinte de toux s'était produite à quatre heures et elle avait
été incapable de se rendormir. C'était pourquoi elle s'était levée si tôt.
     
    En attendant
l'eau chaude pour se faire une tasse de café, elle s'empara, par automatisme,
de son étui à cigarettes laissé, comme chaque soir, sur le réfrigérateur. La
première cigarette de la journée en buvant une tasse de café était, et de loin,
la meilleure de la journée. Elle ouvrit l'étui, prit une cigarette et la mit
entre ses lèvres. Au moment où elle actionnait la molette de son briquet,
Gérard apparut dans la cuisine.
     
    — T'avais pas
promis de pas fumer du carême? lui demanda-t-il en se grattant le cuir chevelu.
     
    — C'est pourtant
vrai, reconnut sa femme en enlevant précipitamment d'entre

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