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A l'écoute du temps

A l'écoute du temps

Titel: A l'écoute du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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béret et s'amusaient à se le
lancer. L'adolescente, au bord des larmes, les suppliait de le lui rendre.
Richard, la cigarette au bec, n'avait pas hésité une seconde à intervenir.
     
    Il avait attrapé
l'un des plaisantins par un bras et l'avait menacé de le frapper s'il ne
rendait pas à la fille son béret. L'autre avait voulu s'en mêler, mais il avait
changé d'idée devant l'air déterminé de l'adversaire qui semblait prêt à en
venir aux coups.
     
    — OK. Énerve-toi
pas. C'était juste pour faire une farce, lui avait dit l'un des garçons en
tendant sa coiffure à sa victime.
     
    Cette dernière
avait remis son béret sur sa tête.
     
    Elle avait un
joli visage fin encadré de cheveux noirs et éclairé par des yeux brun foncé.
Son manteau gris à demi déboutonné laissait voir l'uniforme porté par les
élèves de l'école des dames de la Congrégation de la rue Sainte- Catherine.
     
    Richard, fier
d'être devenu un chevalier sans peur et sans reproche à aussi peu de frais, lui
avait alors proposé de la raccompagner chez elle au cas où quelqu'un oserait
s'en prendre encore à elle.
     
    166 LES PREMIERS
ÉMOIS
     
    — Je suis presque
rendue, lui avait-elle répondu. Je reste dans la dernière maison en pierre
grise avec une tourelle, avant d'arriver à De Montigny.
     
    — Ça fait rien,
Ça me dérange pas pantoute d'aller jusque-là avec toi.
     
    — Je sais pas si
ma mère va être bien contente de me voir arriver avec un garçon, avait-elle
ajouté. Elle me surveille souvent par la fenêtre quand je reviens de l'école.
     
    Je suis même sûre
qu'elle me mettrait pensionnaire au couvent si elle me voyait avec un gars.
     
    — T'auras juste à
lui dire ce qui vient de t'arriver, avait plaidé Richard en prenant un air
avantageux tout en écrasant son mégot de cigarette sur le trottoir.
     
    — T'es pas
sérieux. Des plans qu'elle se mette dans la tête de venir me chercher tous les
jours à l'école.
     
    — Si c'est comme
ça, je vais marcher avec toi et je vais te lâcher juste un peu avant d'arriver
chez vous pour que ta mère me voie pas, lui proposa l'adolescent avec aplomb.
Je m'appelle Richard Morin, avait-il poursuivi en se mettant en marche à ses
côtés.
     
    — Moi, Monique
Côté, s'était-elle présentée en lui offrant son plus beau sourire.
     
    Les deux
adolescents n'avaient parlé que quelques minutes, le temps que Richard fasse un
bout de conduite à la jeune fille. Lorsqu'il l'avait laissée devant la maison
voisine de la sienne pour ne pas être vu par la mère, il était déjà tombé
amoureux de celle qu'il avait protégée. Il avait passé la fin de semaine à
rêver à elle et il avait éprouvé beaucoup de difficulté de ne pas en souffler
mot à son frère Gilles.
     
    «Lui, c'est pas
pareil avec sa Nicole Frappier, s'était-il dit en se rengorgeant. Il lui a
jamais dit un mot. Il est trop gêné pour ça. Il va falloir que je lui explique
comment faire avec les filles. Il a pas le tour pantoute.» 167 Bref, la fin de
semaine avait été interminable aux yeux de l'adolescent qui n'avait pas cessé
de chercher un moyen d'apercevoir l'objet de sa flamme durant les deux jours de
congé. Samedi, son père l'avait occupé toute la journée et dimanche, il lui
avait été impossible de l'apercevoir à la messe. Le lundi midi, à l'heure du
dîner, il avait eu beau se précipiter sur la rue Fullum pour croiser sa
Monique, il ne l'avait pas vue. Il avait même couru jusqu'à l'école des filles,
coin Sainte-Catherine et Dufresne, au risque d'être vu par sa soeur Carole,
mais il avait fait chou blanc. C'était pour cette raison qu'il tenait tant à
quitter rapidement l'école Champlain cet après-midi-là. Il voulait la voir et
lui parler avant d'aller au presbytère.
     
    — Si le maudit
gros Nantel me l'a fait manquer, il va me le payer! dit-il, rageur, en marchant
en direction de la rue Sainte-Catherine.
     
    Il parcourut la
distance entre les rues Logan et De Montigny en courant. Pas de Monique Côté en
vue. Il traversa la rue et se dépêcha de se rendre au coin de la rue
Sainte-Catherine, bien décidé, s'il le fallait, à poursuivre jusqu'à la cour de
l'école des filles. Ce ne fut pas nécessaire.
     
    Au moment où il
s'arrêtait près de l'immeuble de l'Armée du Salut, il aperçut Monique en train
de traverser, de l'autre côté de la rue. Tout heureux de constater qu'elle
n'était accompagnée par aucune camarade, il alla à sa rencontre en

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