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A l'ombre de ma vie

A l'ombre de ma vie

Titel: A l'ombre de ma vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Florence Cassez
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jamais,
mais je finirai par me faire respecter tant bien que mal. Le secret est de ne
pas tramer, car on ne peut pas faire grand-chose quand une bande de types vous
coincent. Ils se déplacent à plusieurs, parce qu’il y a une réelle rivalité
entre eux : des voyous, des tatoués, des drogués… c’est une véritable
jungle dans laquelle les faibles n’ont pas leur mot à dire. J’ai vu des femmes
se faire violer, ici, et personne pour s’interposer parce que c’est trop
dangereux. J’ai vu des règlements de comptes d’une violence inouïe. Et j’ai
fait comme tout le monde : faisant semblant de ne rien avoir vu, j’ai
continué mon chemin, pas fière mais pas inconsciente au point d’imaginer que je
peux faire le poids.
    Quand Israël sort enfin du box, il est vingt heures. Il a
parlé pendant neuf heures ! Il me regarde, exténué, il a vraiment une sale
tête. Alors c’est à mon tour, moi qui croyais, vu l’heure, qu’on rentrerait à
Santa Martha. De l’autre côté de la grille, se trouve un bureau, et un autre un
peu plus loin, avec des gens qui écrivent et posent des questions, parfois.
Juste derrière la grille, ce sont les avocats. Et au fond, là-bas, quelques
chaises et des gens assis dessus ; des spectateurs, parce que les procès
sont publics. Juste derrière cette grille contre laquelle j’appuie mon visage,
c’est la vie, la liberté, un monde complètement différent de la folie dans
laquelle je suis plongée, et qui me paraît si loin et si proche à la fois.
Presque à portée de main et parfaitement inaccessible.
    Je dois raconter mon histoire, pour la première fois.
Comment je suis arrivée au Mexique et comment j’ai rencontré Israël. J’imagine
qu’il a dit la même chose avant moi, et je crois que cela va me servir si les
juges se rendent compte que je ne le connais pas depuis si longtemps, s’il a
dit lui aussi que nous nous sommes séparés, puis remis ensemble et séparés
encore. Toute ma vie au Mexique défile à nouveau et je m’aperçois que cela me
fait du bien d’en parler, d’expliquer que ma vie avec Israël était celle de
n’importe quel couple tout neuf et que, pour moi, il travaillait dans les
garages de ses frères. Je leur dis que j’allais parfois au garage, que je les
voyais occupés, que je voyais aussi les voitures qui passaient au ranch. Je
leur dis que je n’ai pas imaginé un instant qu’il pouvait y avoir autour de moi
des histoires comme ces enlèvements. Je parle, je parle, pour essayer de les
convaincre que je suis une fille comme tout le monde avec ses amis, ses amours,
son travail. C’est juste que je m’imaginais pouvoir travailler ici comme je
l’avais fait en France, voilà ce qui m’a manqué. Tout cela défile à mesure
qu’on me demande, qu’on me laisse expliquer, et pour la première fois depuis le
début de cette folle histoire, j’ai l’impression de renouer avec ma vraie vie,
de m’extirper un peu de ce bourbier devenu encore un peu plus infâme depuis la
veille au soir.

VI
    Mon procès a commencé sans que je m’y attende. Sans même que
j’aie eu le temps de m’y préparer.
    Il est deux heures du matin, je suis à nouveau dans ce
fourgon rempli de femmes fourbues et agressives. Ce rythme va devenir mon
quotidien, pendant plus de deux ans : des allers-retours à la prison pour
hommes, où se tiendra mon procès, jusqu’à ce que mon avocat décide que c’est
suffisant, que les juges ont fait le tour de la question et peuvent juger, en
toute connaissance de cause, que je n’ai rien à voir avec tout ça. Je dois donc
tisser une vraie complicité avec M e Ochoa mais mon problème est que
je le trouve de plus en plus bizarre, cet avocat. Pour tout dire, je ne le sens
pas. Lorsque j’étais à l ’arraigo, il m’a fait une proposition très
particulière que je n’ai pas bien comprise. Il m’a parlé d’une cassette vidéo
qui existerait, selon lui, montrant Cristina Rios Valladares en train de faire
ses courses dans un supermarché.… deux jours avant sa prétendue libération. Je
n’ai pas bien compris, parce que si cette cassette existe vraiment, c’est
quelque chose d’énorme ! La preuve que tout cela est inventé, monté, une
pièce maîtresse pour démontrer mon innocence. Si cette Cristina fait ses
courses le 7 décembre, elle ne peut pas être séquestrée en même temps et
l’accusation ne tient plus ! Mais Ochoa a dit qu’il ne pouvait pas se la
procurer si facilement,

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