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À l'ombre des conspirateurs

À l'ombre des conspirateurs

Titel: À l'ombre des conspirateurs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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puis de petites jarres contenant divers cosmétiques, des coffrets en bois de santal pour les bijoux et les écharpes, des miroirs, des peignes, des coffres pour les vêtements… Des servantes allant et venant, et une joueuse de harpe pour la distraire quand elle se sentait triste. Elle en avait eu tout le temps : quatre misérables années.
    La chambre de Pertinax se situait dans une autre aile. Voilà comment vivent les riches. Quand Pertinax éprouvait l’envie d’exercer ses droits conjugaux, un esclave venait la chercher pour la conduire le long de deux couloirs glacés. Était-elle parfois allée le retrouver de son propre chef ? J’en doutais. Lui-même ne s’était vraisemblablement jamais donné la peine de venir la surprendre ici. Helena Justina avait demandé le divorce pour le motif que Pertinax la négligeait. Le plus haïssable, à mes yeux : il se vautrait dans le luxe, mais son échelle des valeurs était grotesque.
    L’estomac noué, je regagnai lentement l’atrium. Là, je tombai sur Geminus.
    — Tu n’as pas l’air dans ton assiette. Que fais-tu ici ?
    — Je cherche des idées de décoration.
    — Trouve-toi un travail décent, un métier qui rapporte !
    Nous pensions nous être débarrassés de toutes les statues, mais tandis que nous échangions quelques remarques acerbes, on en apporta encore une. Après une rapide estimation de l’œuvre d’art, Geminus se permit quelques plaisanteries sur le modèle : une beauté coulée dans le bronze, une joie pour l’œil. Helena Justina elle-même.
    Je laissai échapper un sifflement admiratif. L’auteur de cette statue était doué. Il avait extraordinairement su capturer cette expression outragée toujours prête à se manifester, et cette naissance du sourire au coin des lèvres… Du bout des doigts, je nettoyai un coude maculé de boue, puis caressai le superbe derrière de bronze.
    Geminus, le commissaire-priseur qu’Anacrites avait prétendu être mon géniteur, apparaissait comme un homme trapu, secret, d’humeur changeante, âgé d’une soixantaine d’années, avec des cheveux gris frisés. Un bel homme, en somme, même si moins qu’il le pensait lui-même. Il possédait un superbe profil avec un véritable nez étrusque (lui servant à renifler tous les scandales), et des yeux capables de repérer toutes les jolies femmes. Ses conquêtes féminines avaient fait de lui une légende dans la Sæpta Julia où se rassemblent tous les antiquaires. À chaque fois que l’un de mes clients souhaitait vendre un meuble ou un bijou de famille, je l’adressais à lui, et je faisais de même pour mes jolies clientes si j’étais trop occupé.
    Nous restâmes un instant à jouer les critiques d’art. La statue n’était pas signée, mais il affirma que c’était l’œuvre d’un sculpteur grec connu. Elle était magnifique, avec sa coiffure dorée et ses yeux colorés. Quand Helena Justina avait pris la pose, elle devait avoir 18 ans. Les cheveux relevés dans un style ancien, elle était soigneusement enveloppée dans un péplum traditionnel. Le sculpteur était quand même parvenu à laisser deviner ses formes d’une façon lascive.
    — Très joli, commenta Geminus. Oui, une jolie pièce.
    — Où était cachée cette beauté ? demandai-je aux porteurs.
    — Fourrée au fond d’un placard, à côté des latrines de la cuisine.
    Voilà qui ne me dérangeait pas le moins du monde. Je préférais nettement cette vision à celle de Pertinax en train de la contempler avec concupiscence dans ses appartements privés. Ce pauvre débile n’avait conservé dans sa chambre que des statuettes en argent représentant ses chevaux, et des peintures de ses navires…
    — Castor et Pollux ! s’exclama-t-il. Tu cours après elle ?
    — Non, rétorquai-je.
    — Menteur !
    — Je dis la vérité.
    Effectivement, quand son altesse avait voulu mieux faire ma connaissance, c’est elle qui m’avait couru après.
    Les femmes changent beaucoup entre 18 et 23 ans, mais Helena Justina ne portait aucune trace des épreuves que Pertinax lui avait fait subir. Pourtant, comme j’aurais aimé la connaître avant lui ! Quelque chose dans son expression, même à cet âge, me le faisait regretter.
    — Il l’a représentée avec un air trop soumis, murmurai-je. Dans la réalité, la dame te regarde comme si elle allait te mordre le nez, dans le cas où tu t’approcherais de trop près.
    Inspectant mon museau pour y découvrir des

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