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Abdallah le cruel

Abdallah le cruel

Titel: Abdallah le cruel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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aimes à t’empiffrer à longueur de journée.
Ne crains rien. Si, pendant le ramadan, tu es torturé par la faim, je te
promets de te confectionner une oignonade faite de la chair de ces benêts après
les avoir fait conduire à l’abattoir où ils retrouveront leurs semblables :
les ânes et les mulets. Tu dégusteras un plat exquis tel que tu n’en auras
jamais mangé de ta vie ! Mieux vaut d’ailleurs qu’ils finissent
ainsi ! Lorsque je monterai sur le trône, et je puis t’assurer que j’y
parviendrai, car il arrivera fatalement malheur à Abd al-Rahman, je leur ferai
payer cher leur insolence et l’ennui mortel de leurs sermons.
    Son secrétaire éclata de rire pour
donner le change. Depuis plusieurs semaines, il avait accepté, moyennant
l’octroi de postes honorifiques à certains de ses parents, d’espionner son
maître pour le compte d’Abdallah. Le soir venu, il quitta la demeure du prince
et se rendit auprès d’Obaid Allah Ibn Yahya pour lui rapporter ces propos.
L’intendant le remercia et fit venir chez lui Cheikh Ibn Loubaba Abou et Cheikh
Salih Ibn al-Safara pour les avertir des menaces formulées à leur encontre. Il
tenta de minimiser l’importance d’une telle réaction. Ce n’était pas l’avis de
ses interlocuteurs inquiets des paroles proférées par Mutarrif envers le jeune
prince dont ils étaient les précepteurs. Ils savaient que l’enfant était sujet
à de fréquentes maladies et que les médecins, déplorant sa santé chétive,
avaient conseillé à son grand-père de l’éloigner de la capitale et de
l’installer à al-Rusafa, réputé pour son climat plus salubre. Leur avis avait
été suivi. Reste que si le prince héritier venait à disparaître, Mutarrif
n’hésiterait pas un seul instant à revendiquer, pour lui, ce titre et, le cas
échéant, à faire assassiner son père et tous ceux qu’il tenait pour ses ennemis
jurés. Ils convainquirent donc l’intendant de les accompagner chez l’adjoint du
hadjib, Saïd Ibn Mohammad Ibn al-Salim. Celui-ci les reçut en pleine nuit, ne
dissimulant pas la surprise que lui causait cette visite tardive. Saïd n’était
autre que le gendre de Cheikh Salih Ibn al-Safara. S’adressant à son beau-père,
il lui dit :
    — Ta fille se porte bien et je
ne sais pas qui t’a rapporté qu’elle était malade. Si tu le désires, j’ordonne
qu’on la réveille afin de dissiper tes inquiétudes. Je préférerais ne pas avoir
à le faire. Elle doit se reposer. Je comptais me rendre chez toi pour
t’annoncer que tu seras bientôt grand-père.
    — Cette nouvelle me réjouit et
je prie Allah le Tout-Puissant et le Miséricordieux qu’il me donne un
petit-fils. Je sais que tu es un bon mari et ce n’est pas de soucis domestiques
dont je suis venu t’entretenir.
    — Aurais-tu eu vent de complots
ou d’intrigues ?
    Cheikh Salih Ibn al-Safara lui
rapporta fidèlement les paroles du prince Mutarrif telles qu’elles lui avaient
été transmises par son secrétaire et ajouta :
    — Mon ami Obaid Allah Ibn Yahya
n’a aucune raison de suspecter la véracité de ces dires. Notre souverain t’a
chargé de verser une rente mensuelle à ce Marwan en échange de ses informations
et il n’a eu qu’à se féliciter de son travail. Bien entendu, les menaces qu’il
a entendu proférer contre le prince héritier nous inquiètent au plus haut point
et nous te supplions de prévenir l’émir le plus rapidement possible.
    — Ce sera fait dès son lever.
    — Ce n’est pas tout. Nous craignons
pour nos vies. Je suis trop vieux pour vivre perpétuellement dans la peur et
l’incertitude. Faute d’obtenir une protection, je préfère abandonner ma
demeure, à laquelle je suis attaché, et à émigrer. J’ai reçu des propositions
de plusieurs princes d’Ifriqiya car ils ont en haute estime mon savoir et celui
de Cheikh Ibn Loubaba Abou, dont les décisions juridiques font autorité dans
tout le Dar el-Islam. Jusqu’à présent, nous avions refusé d’accepter ces
invitations car Abdallah nous comblait de ses bienfaits. De plus, je ne connais
pas de pays qui égale, pour sa douceur de vivre, cette contrée bénie
d’al-Andalous. Cette fois-ci, faute de garanties sérieuses, nous sommes décidés
à partir. Avec nous, s’en ira la science, mais il ne nous manquera pas de maîtres
à honorer où que nous allions.
    Saïd Ibn Mohammad Ibn al-Salim
soupira et dit :
    — La précipitation est une
mauvaise chose. Vous pouvez

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