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Aïcha

Aïcha

Titel: Aïcha Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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comme des hyènes autour d’un vieux cadavre. Allez prier dans vos masdjid. Louez Allah de la fortune et du pouvoir qu’il vous donne. Sans Lui, que seriez-vous ?
    De son côté, l’Envoyé fit savoir que, le soir, il s’adresserait aux Croyants sincères avant la prière.
    Quand mon époux parlait ainsi publiquement, la mosquée, même agrandie, et notre cour étaient trop petites pour accueillir tous les fidèles. Aussi se serraient-ils partout entre nos murs, jusque dans la ruelle qui longeait la mosquée. Et, pour que chacun puisse entendre la parole du Messager d’Allah, Bilâl la répétait, phrase après phrase. Sa voix puissante portait dans le moindre recoin.
    Ce soir-là, un autre événement imprévu rendit ce jour mémorable.
    Pendant que nous assaillions les fortins des Banu Qaynuqâ, Tamîn al Dârî, l’ancien Chrétien, était revenu du pays de Ghassan, où, des années auparavant, il avait rencontré pour la première fois Muhammad. De tous ses compagnons, il était le seul à pouvoir encore rassembler des caravanes pour le Nord. Là-bas, à Homs, Jilliq ou Palmyre, des commerçants chrétiens lui étaient demeurés fidèles, bien qu’il leur eût appris sa soumission à Allah. Plus d’une fois déjà, au temps de notre grande pauvreté, il avait risqué sa vie et sa fortune pour commercer avec eux afin que l’existence nouvelle des Croyants de Mekka ne soit pas celle de mendiants.
    Cette fois-ci, il rapportait un présent particulier pour l’Envoyé : un escalier de bois aux neuf marches ornées du nom d’Allah en lettres de lumière sur fond de ciel. Elles conduisaient à une sorte de nacelle étroite bordée d’une rambarde aux barreaux dorés comme le soleil. Sur le devant était fixée une planche de cèdre sur laquelle les trois versets de la sourate An Nasr [8] étaient peints. Le côté gauche, qui serait disposé face au couchant, était décoré des trois versets d’Al Kawthar [9] . Au-dessus de la nacelle, une hampe torsadée soutenait une lampe comme nous n’en avions jamais vu. Elle était composée de huit miroirs d’argent et pouvait abriter les flammes de deux mèches.
    Pour pouvoir le transporter depuis Bosra, où il avait commandé cet escalier qui ne menait nulle part à un charpentier juif, Tamîn l’avait fait démonter. Dès son retour, il en fit déposer toutes les pièces dans notre cour. Un charpentier du Nord, que Tamîn avait converti à la parole d’Allah, prit les trois jours précédant l’exil des Banu Qaynuqâ pour le remonter. Devant le meuble, qui peu à peu reprenait forme, chacun s’interrogeait sur son usage et son utilité. Ce soir-là, en le découvrant enfin entièrement assemblé dans notre cour, Muhammad sourit et haussa les sourcils. Par plaisanterie, il demanda à Tamîn :
    — Voudrais-tu que je guette les hypocrites depuis là-haut ? Je crains que ton escalier ne possède pas assez de marches pour que mon regard puisse franchir leurs murs de mensonges.
    Tamîn était connu pour sa sévérité. On comptait sur les doigts d’une seule main ceux qui se souvenaient de l’avoir vu sourire. « Dieu ne fait pas de grimaces », aimait-il à répéter. Pourtant, c’est en riant qu’il avait échangé ses premiers mots avec mon époux. Ce jour-là, la plaisanterie du Messager ne le dérida pas.
    — Ce meuble n’est pas fait pour la guerre ni pour de vulgaires occupations, rétorqua-t-il. De là-haut, Allah le Tout-Puissant parlera par ta bouche. Ses paroles ruisselleront sur la tête de ceux qui espèrent Sa clémence.
    Tamîn connaissait mieux que personne les coutumes du Nord.
    — Tous les temples chrétiens du pays de Ghassan possèdent un escalier semblable, d’où l’on profère prêches et Dits sacrés, expliqua-t-il. Ta parole vaut celle des Chrétiens. Quand tu parles dans la masdjid, tu ne dois pas être à hauteur d’homme. Ce n’est pas une affaire d’orgueil ou de vanité. Ce qui vient dans ta bouche vient de bien plus haut.
    Muhammad discuta avec ses compagnons. À tous, la proposition de Tamîn parut sage, faisant honneur à Allah autant qu’à son nâbi.
    Mon père Abu Bakr dit :
    — Allah a poussé les Banu Qaynuqâ hors de leurs fortins. Il choisit ses fidèles parmi les habitants de Yatrib. Sa puissance va à Muhammad Son Prophète et à nul autre. Que cela se voie aussi dans Sa mosquée ne peut être mauvais.
    — On ne trouve pas un escalier pareil dans les synagogues des Juifs de Yatrib, précisa

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