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Aïcha

Aïcha

Titel: Aïcha Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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fines fibres de dattier et de laine de chamelles tout juste sevrées. Il m’a dit : « Aucune couche ne saurait mieux te convenir pour accueillir l’Envoyé, ma fille. Chacun sait que tu t’y comportes comme il le faut pour son plus grand plaisir. »
    Hafsa riait à travers ses larmes.
    — Dieu nous a entendues, Dieu nous a entendues ! me répétait-elle, secouée de joie et m’embrassant jusqu’à ce que je me coule dans son bonheur. Mon père ne doute plus de notre époux !

3.
    Oui. Encore une fois Allah gratifiait les vrais Croyants d’une victoire et d’un butin magnifiques. La confiance revint et nos épaules furent soulagées du poids de la crainte. Les plis des fronts s’effacèrent et les rires résonnèrent. Plus d’humiliation ni de sarcasmes dans notre dos : les hypocrites et les douteurs retournaient dans le silence.
    Quiconque ayant plus d’expérience qu’Hafsa et moi aurait deviné que ce n’était qu’un répit avant les prochaines épreuves. La jeunesse gonflait nos poitrines, et la jeunesse veut aimer la vie comme elle aime d’avance le paradis du Tout-Puissant.
    L’Envoyé lui-même se montrait revigoré et plein d’énergie. Et très heureux de notre légèreté. Deux mois durant, peut-être trois, nous vécûmes dans la paix et l’insouciance. Mon époux se préoccupa de nouveau de nos études. Je retrouvai Talha devant les rouleaux d’écriture en compagnie d’Hafsa et d’Ali. Cette fois, Omar n’en tira aucun ombrage.
    De temps à autre, Fatima venait nous faire admirer son fils Hassan. Muhammad prit goût à le poser sur ses genoux tandis qu’il écoutait les doléances des uns et des autres. Mon père s’en amusait. Il poussait quelquefois la plaisanterie jusqu’à faire semblant de quérir l’avis de ce petit-fils qui n’avait pas deux ans et bredouillait à peine.
    Enfin, comme si Allah cherchait à nous réconforter et à nous rassurer, des voyageurs en provenance du Sud commencèrent à raconter que les affaires de commerce étaient très mauvaises à Mekka. Les récoltes de l’automne avaient été calamiteuses et les pluies ruineuses. Les Bédouins avaient perdu quantité de petit bétail. En outre, les puissants de la mâla n’osaient toujours pas former de grandes caravanes pour le Nord, craignant trop les razzias des Croyants d’Allah.
    — Telle est bien la preuve des mensonges des monâfiqoun ! affirmèrent d’une même voix mon père Abu Bakr et Omar. La victoire des Mekkois à Uhud n’était qu’une illusion ! Ils ont si peu confiance en leur dieu de bois qu’ils n’osent pas même lancer une trentaine de chameaux jusqu’à Tabouk !
    Les orages et le déluge s’étaient abattus sur Mekka, mais la pluie fut clémente et bienvenue sur Madina. Chez nous, pas de colère du ciel. Les puits se remplirent et la terre des jardins se couvrit de promesses de vie.
     
    Notre époux partageait ses nuits entre ma couche et celle d’Hafsa avec une régularité sans faille. Il s’y montrait plein d’attentions, d’une douceur et d’une passion que son âge, celui d’un homme sur la seconde pente de sa vie, n’amoindrissait en rien. Au contraire, ses rires et ses désirs nous enchantaient. C’était un amusement que nous partagions, Hafsa et moi, de comparer les bonheurs et les plaisirs qu’il nous accordait.
    Muhammad surveillait de près ce qu’il appelait notre « devenir dans la clémence de Dieu ». Il n’était pas de nuit dans la couche d’Hafsa sans qu’il mesure ses progrès dans la connaissance des rouleaux d’écriture et son agilité à les recopier. Sans cesse il s’assurait que ma mémoire retenait les dits et les faits les plus lointains. Il me questionnait sur ce qu’il m’avait enseigné et raconté, sur chacune des paroles de l’ange Djibril, anciennes ou nouvelles, ainsi que sur les faits et les circonstances qui avaient provoqué leur nécessité et la venue de Djibril. C’est alors que je compris la supériorité de ce texte sur les Écritures plus anciennes : le nôtre, celui de l’Envoyé, était en arabe.
    Pour dire le vrai, j’étais un peu déçue que notre époux se soucie moins de connaître mes progrès dans la lecture et l’écriture, réservant cette attention à Hafsa. Je décidai d’apprendre auprès d’elle à mieux me servir du calame. Hafsa se soumit à mon désir sans hésitation, faisant preuve d’une patience que Talha lui-même ne possédait pas.
    Mon rêve d’alors était de

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