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Aïcha

Aïcha

Titel: Aïcha Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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ton père. Sinon, on te posera des questions. Tu expliqueras ton absence en disant que ton ventre s’est brouillé ou que des djinns ont visité ton sommeil. On te laissera en paix le temps que tu te purifies et implores la clémence d’Allah.
    — Mais Lui verra que je mens !
    — Dieu sait tout, Il voit tout. Il connaît tes raisons. Il jugera.
    En un éclair je pensai à ma propre histoire, pas si vieille, et comment le Tout-Puissant m’avait guidée hors de mes mensonges.
    — Mais à notre époux, je dois dire ce que pense mon père ! insista Hafsa. Je ne peux pas le laisser dans l’ignorance.
    À cela, je ne sus pas répondre. Par bonheur, Hafsa reprenait tous ses esprits :
    — Nous pourrions nous tourner vers Abu Bakr, proposa-t-elle. Depuis toujours il sait adoucir les humeurs de mon père.
    C’était vrai. Mais avais-je assez la confiance de mon père pour lui demander conseil ? Hafsa sonda mon regard, devina mon hésitation :
    — Rien ne presse, dit-elle. Laissons passer le jour et venir la nuit. De montrer sa rage apaise toujours un peu mon père.
    Pour ne pas lui donner l’impression que je laissais cette décision peser tout entière sur elle, j’acquiesçai :
    — Nous devons prier ensemble. Allah saura nous conseiller s’il le veut.
     
    Hafsa raconta à qui voulait l’entendre que des djinns malfaisants l’avaient visitée durant la nuit. Elle devait se purifier avant que notre époux ne la rejoigne. J’ai proposé de l’accompagner dans la petite masdjid sur les pentes du Jabal Sal. Après une journée entière de prières, de silence, de paisible beauté déposée devant nous, lorsque l’ombre du soir apparut, la conviction nous était venue qu’Allah approuvait notre silence et appréciait le soutien que nous apportions à Son Envoyé. Nous devions seulement taire les doutes d’Omar et surveiller l’humeur des compagnons.
    Alors que nous nous serrions toutes les deux sur l’âne qui nous ramenait à la maison, je dis à Hafsa :
    — Allah nous a entendues. Sois tranquille.
    En vérité, je m’étonnai de mes propres mots et m’en sentis même un peu honteuse. D’où me venait tant d’assurance ? Le Tout-Puissant m’était témoin que ce n’était ni vanité, ni parole en l’air. Mon âge et mon ignorance auraient dû me conduire à plus de modestie.

2.
    Les grandes chaleurs cessèrent, sans pour autant apaiser les disputes dans Madina. Des rumeurs menaçantes arrivèrent de Mekka. Après la mort d’Abu Hamza à Uhud, l’Envoyé avait perdu le lien avec ceux qui l’informaient des manigances d’Abu Sofyan. Il nous fallait redoubler de vigilance. Les alentours de l’oasis étaient désormais incertains. Notre époux ordonna que les femmes soient accompagnées par des hommes en armes lorsqu’elles allaient chercher de l’eau dans les puits éloignés.
    Enfin, un jour de grand vent, Muhammad décida de se rendre en personne aux fortins des Banu Nadir afin de régler une importante affaire. Leurs bastions étaient dignes de leur richesse et de leur puissance. Leurs terres, vastes et prospères, se trouvaient séparées du coeur de Madina par des plantations de dattiers. Depuis que le grand menteur et insulteur Ka’b ibn Aschraf avait été décapité, le Choisi d’Allah n’était pas le bienvenu dans cette tribu, dont les membres étaient sans doute les monâfiqoun les plus acharnés de l’oasis.
    Dès qu’il apprit la décision de notre époux de se rendre chez ses ennemis, mon père protesta :
    — Impossible ! Autant tenter les démons.
    — Peut-être n’oseront-ils pas s’en prendre à moi, répondit Muhammad.
    — Quand tu connaîtras leur décision, il sera trop tard, s’agaça Omar.
    — Qui sait ? dit Muhammad par plaisanterie.
    Omar, piqué dans son orgueil, insista :
    — Laisse-moi y aller à ta place.
    — Et leur laisser croire que l’Envoyé d’Allah les craint ? Hors de question. Mais tu ne te trompes pas : on sait qui ils sont. La traîtrise et la soif de vengeance leur rongent les sangs. Les scorpions fourmillent sous les pierres de leurs fortins. Raison de plus pour les approcher. Accompagnez-moi.
     
    Puis voici ce qu’il advint :
    Mon époux et nos pères, Omar et Abu Bakr, prennent le chemin des Banu Nadir, nos adversaires. Chacun sur sa mule, ils traversent les plantations de dattiers. Les Banu Nadir, ayant appris leur venue par quelques émissaires, leur ouvrent la porte de leurs fortins.
    — Entre,

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