Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
l'apporter.
--qu'est-ce que c'est ? 7
--De la soupe de fèves. Elle est bonne, j'en ai go˚té une cuillerée. "
L~S SABLES D AMMON 473
Alexandre commença à manger. " Pas mal. Je t'en laisse un peu? "
Héphestion acquiesça. " Comme au bon vieux temps, quand nous vivions en exil dans la montagne.
--C'est vrai. Mais il n'était pas question alors de soupe chaude.
--C'est exact.
--Tu regrettes cette période ?
--Non, certainement pas. Mais je m'en souviens avec plai sir. Nous nous dressions, toi et moi, contre le reste du monde. " Il posa une main sur sa tête et l'ébouriffa. " Maintenant, c'est différent. Je me demande parfois si cela se reproduira.
-- quoi ?
--Un voyage, rien que toi et moi.
--qui peut le dire, mon ami ? "
Héphestion se baissa pour attiser le feu de la pointe de son épée, et Alexandre vit qu'un petit objet brillait à son cou: une dent de lait, une minuscule incisive ench‚ssée dans de l'or. Alors, il se rappela le jour o˘, enfant, il la lui avait donnée en gage d'amitié éternelle.
" Jusqu'à la mort ? avait demandé Héphestion.
--Jusqu'à la mort ", avait-il répondu.
Le cri d'une sentinelle, qui transmettait le mot d'ordre à ses camarades, résonna à cet instant. Héphestion s'éloigna pour poursuivre son tour d'inspection. Alexandre le vit disparaître
I dans l'obscurité tandis qu'une pensée, forte et distincte, se frayait un chemin dans son esprit. Il se dit que si un voyage les attendait~ il les conduirait vers une région mystérieuse, enve loppée dans les ténèbres.
quelques minutes s'écoulèrent encore, et l'on entendit bien tôt les appels du second tour de garde. Il devait être minuit. Alexandre sursauta en percevant un bruit de pas. Il se frotta les yeux. C'était Eumène.
Le secrétaire général s'assit à ses côtés. Il se mit à scruter le feu.
" que regardes-tu ? lui demanda le souverain.
Le feu, répondit Eumène. Il ne me dit rien de bon. "
Le roi se tourna vers lui avec un regard surpris. " Et pour quoi donc ?
-474 ALEXANDRE LE GRAND |~ ~ L~S SABLI7~ n'l~MM
()N
--Il est en train de tourner avec le vent, qui souffle à pré sent de la mer.
--Comme chaque nuit, à cette heure, si je ne me trompe
--OU1, mais cette nuit, c'est différent. "
Une pensée traversa l'esprit d'Alexandre, et un cri d~alarme sur la droite la confirma: un incendie venait de se déclarer à la base de la grande tour de bois.
" Un autre là ! ", hurla Eumène en pointant le doigt vers une maison qui se dressait à une centaine de pieds.
La voix de Perdiccas leur parvint sur la gauche: " Alarme Alarme ! Le feu ! "
Lysimaque se précipita vers eux. " Ils veulent nous faire rôtir !
s'écria-t-il, le souffle court. Ils incendient toutes les mai sons qui bordent la brèche et le rempart de briques. La tour de bois br˚le comme une torche, regarde ! "
Alexandre bondit. Memnon jouait sa dernière carte en pro fitant du vent.
" Vite ! Nous devons les empêcher d'allumer; d'autres foyers. Envoyez les attaquants, les "écuyers", les Thraces et les Agrianes ! Tuez tous les hommes que vous sur prendrez une torche à la main ! "
Ses compagnons accouraient. Il y avait aussi Séleucos Philotas, Léonnatos et Ptolémée.
" …coutez-moi ! s'écria Alexandre pour couvrir le rugisse rnent des flammes qui augmentait avec le vent. Toi,~Séleucos et toi, Léonnatos, prenez la moitié des pézétairoi, traversez lé quartier en feu et alignez-vous de l'autre côté: il faut que nous parions à une éventuelle contre-attaque. A l'évidence, les Perses veulent reprendre le contrôle de la brèche.
" Ptolémée et Philotas, alignez le reste des troupes derrière la brèche pour occuper toutes les portes. Je ne veux pas aVoir de surprises dans mon dos. Lysimaque, fais reculer les balistes et les catapultes, sinon elles seront détruites par l'effondre ment de la tour ! Allez, maintenant ! "
La tour de bois était à présent dévorée par les flammes qui léchaient le secteur oriental de la brèche. Cette gigantesque torche illuminait une vaste zone autour de la muraille, si bien que les archers agrianes n'avaient aucun mal à distinguer les incendiaires et à les transpercer de leurs flèches. Les poutres de la base furent vite calcinées et l'énorme enchevêtrement
s'effondra dans un vacarme épouvantable, libérant une colonne de feu de plus de trois cents pieds, qui dépassait tous les édifices de la ville.
La chaleur était telle qu'Alexandre dut quitter son point
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