Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
s'apprêtait, lui aussi, à poser cette question, fut coupé dans son élan.
" Voilà, je te nomme satrape de Carie à la place d'Oron tobatès, et te donne également pleine autorité sur Halicarnasse et les territoires environnants. Mes généraux s'emploieront à les soumettre pour toi. "
Les propos d'Alexandre suscitèrent la perplexité de Callis thène, qui secoua la tête; en revanche, ils émurent la reine Ada. " Mon fils, dit-elle, je ne sais si...
-- Moi si, interrompit Alexandre. Je sais que tu seras un excellent gouverneur et que je pourrai avoir totalement confiance en toi. "
Il l'invita à s'asseoir sur sa chaise avant de s'adresser en ces termes à Eumène: " Maintenant, tu peux faire entrer la délé gation des notables. Il est juste qu'ils connaissent l'autorité dont ils dépendront à
partir de demain. "
Les opérations de ratissage étaient encore en cours quand on annonça l'arrivée d'Apelle. Le grand maître s'empressa de rendre hommage au jeune roi, puis il ajouta:
" Sire, je crois que le moment est venu de te représenter ainsi que tu le mérites: avec les attributs divins. "
Alexandre eut grand mal à étouffer un éclat de rire: " Tu crois ?
--Cela ne fait aucun doute. Certain de ta victoire, j'ai preparé une esquisse, que je me permets de te soumettre Naturellement, le résultat sera bien différent sur un tableau de dix pieds sur vingt.
--Dix pieds sur vingt? ", répéta Léonnatos, qui estimait qu'on gaspillerait ainsi trop de bois et trop de couleurs pour un garçon de taille moyenne tel qu'Alexandre.
Apelle lui lança un regard méprisant: à ses yeux, ce jeune homme aux cheveux roux et au visage semé de taches de rous seur n'était qu'un barbare inculte. Il se tourna de nouveau vers le roi: " Sire, ma proposition est loin d'être absurde. Tes sujets asiatiques sont habitués à être gouvernés par dés êtres supé rieurs, par des souverains semblables à des dieux, et qui se font représenter comme tels. Voilà pourquoi j'ai eu l'idée de te peindre avec les attributs de Zeus: l'aigle aux pieds et la foudre dans la main droite.
--Apelle a raison, observa Eumène, qui était entré avec Léonnatos et qui examinait d'un air intrigué l'ébauche de l'artiste. Les Asiatiques considèrent leurs souverains comme des êtres surhumains. Il est juste qu'ils te voient ainsi.
--Et que me co˚tera cette divinisation? ", demanda Alexandre.
Le peintre haussa les épaules. " Je pense qu'avec deux talents.. .
--Deux talents ? Mon ami, deux talents me permettent de ravitailler mes soldats en pain, olives et poisson salé pendant un mois !
--Sire, à mon avis, ce genre de considération ne devrait pas concerner un grand roi.
--Peut-être pas un grand roi, interrompit Eumène, mais son secrétaire, oui. Car les soldats s'en prennent à moi si leur nourriture n'est pas assez bonne ou assez abondante. "
Le regard d'Alexandre alla d'Apelle à Eumène, puis il se posa sur l'esquisse et revint vers le peintre. " Il est certain que...
--N'est-ce pas beau ? Imagine le résultat à une autre échelle, avec des couleurs vives, imagine la foudre aveuglante qui jaillit de ta main. quel homme oserait ensuite défier un tel dieu? "
C'est alors que Campaspé fit son apparition. Elle étreignit le roi et l'embrassa sur la bouche, puis elle le salua en plongeant ses yeux dans les siens. Elle était si près de lui qu'il pouvait `.sentir la pointe de ses seins contre sa poitrine. Son regard tra duisait sa disponibilité totale et sans réserve.
" Très douce amie, répliqua Alexandre sans se compro
®mettre. Te revoir est toujours un plaisir.
--Un plaisir qui t'est offert à n'importe quel instant ", mur mura-t-elle à son oreille en y promenant la pointe de sa langue.
Désireux de mettre fin à cette situation embarrassante, ~Alexandre se tourna vers Apelle et dit: " J'ai besoin de réflé chir un peu, car il s'agit d'une grosse dépense. quoi qu'il en soit, je vous attends pour le dîner. "
En sortant, le couple croisa Ptolémée, Philotas, Perdiccas et Séleucos qui accouraient, impatients de connaître les inten tions d'Alexandre.
Le roi les invita à s'asseoir autour d'une table, sur laquelle il avait déplié sa carte. " Voici mon plan: nous allons démonter les machines et les transporter à Tralles sur des chariots. Parménion, qui marchera vers l'intérieur pour s'assurer de la soumission des territoires bordant le Méandre et l'Hermos, en aura besoin en cas de résistance.
--Et
Weitere Kostenlose Bücher