Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
laissées en larmes dans leurs maisons de Piérie ou d'…ordée.
Peut-être les évoquaient-elles en cette heure mélancolique.
" As-tu jamais songé à te marier? demanda soudain Ptolémée.
--Non. Et toi ? - Moi non plus. J'aurais bien épousé Cléop‚tre. - Moi aussi.
--Perdiccas également, si tu veux tout savoir.
--Eh oui, Perdiccas aussi. "
Un cri retentit à la tête de la colonne. Des éclaireurs ren traient au galop d'une de leurs missions de reconnaissa~ce
" Célènes ! Célènes ! ~ ,~ s
-- O˘ ? interrogea Eumène en se précipitant vers eux r '
--A cinq stades, dans cette direction ", répondit un Îclai ~, reur en indiquant une colline o˘ un nombre infini de lumières scintillaient.
C'était un spectacle merveilleux: la ville ressemblait à une gigantesque fourmilière éclairée par des milliers de lucioles Semblant sortir de sa torpeur, Alexandre leva le bras pOUr~ arrêter la colonne. " Nous bivouaquerons ici, ordonna-t-il Et demain, nous marcherons sur la ville. C'est la capitale de la Phrygie et le siège du satrape perse de la province. Si Parménion ne s'en est pas encore emparé, c'est nous qui le ferons. Il doit y avoir beaucoup d'argent dans cette forteresse
--On dirait qu'il a changé d'humeur, observa Ptolémée
--En effet, admit Séleucos. Il s'est sans doute rappelé ce que disait Aristote: "De deux choses l'une. Soit il y a une solu tion au problème, et il est inutile de s'inquiéter. Soit il n'y a pas de solution au problème, et il est inutile de s'inquiéter." Il va peut-être nous inviter à dîner. "
38 "~
Aristote arriva à Méthône sur l'un des derniers bateau~ui partaient encore du Pirée en dépit de la mauvaise saison. Le capitaine avait décidé
de profiter d'un vent du sud, relative ment égal, pour livrer une cargaison d'huile d'olive, de vin et de cire d'abeille, qui, sinon, aurait d˚
attendre l'arrivée du printemps et des prix plus bas.
Une fois à terre, il monta sur un chariot, tiré par deux mules, et se fit conduire à Miéza. Il possédait les clefs de t
les b‚timents, qu'il était autorisé à utiliser comme bon lui semblait. En outre, il savait qu'il y trouverait une personne à qui il voulait parler, une personne qui lui donnerait des nqU velles d'Alexandre: Lysippe.
Le sculpteur était en train de travailler dans sa fond~
~il
1~ effectuait l'esquisse en argile d'un groupe de statues repré sentant la troupe d'Alexandre durant la bataille du Granique. Il la fondrait ensuite à
une échelle définitive pour réaliser le monument que le roi lui avait commandé. Le soir était presque tombé et déjà les lanternes br˚laient dans l'atelier, le réfectoire et quelques chambres d'invités.
" Bienvenue, Aristote ! lança Lysippe. Pardonne-moi de ne pas te serrer la main: elle est toute sale. Un instant, et je suis à ta disposition. "
Aristote examina l'ébauche: une sculpture de vingt-six per sonnages sur une plate-forme de huit ou dix pieds de lon gueur. C'était stupéfiant: on pouvait voir le tourbillon des vagues et presque percevoir le rythme furieux du galop des ~hevaux lancés à la charge. Alexandre se détachait parmi ses
ompagnons, vêtu de sa cuirasse, les cheveux ébouriffés par le nt, monté sur un Bucéphale furieux.
Lysippe se rinça les mains dans une cuvette et s'approcha.
" qu'en dis-tu ?
--C'est superbe. Je suis toujours frappé par le frémisse ent de l'énergie que renferment les formes, dans tes oeuvres. On dirait que les corps sont plongés dans une sorte d'orgasme fou.
--Ils surprendront le visiteur, qui les découvrira après avoir gravi une petite hauteur, expliqua Lysippe d'un air ins piré, en levant ses grosses mains pour décrire la scène. Ils I'écraseront, ou presque, ils le bouleverseront Alexandre m'a demandé de rendre ces soldats immortels, et je consacre toute mon énergie à la satisfaction de son désir, afin de récompen ser également les parents de la perte qu'ils ont subie.
--Par la même occasion, tu le propulses, vivant, dans la légende~ dit Aristote.
--C'est ce qui arriverait de toute façon, tu ne crois pas ? "
Lysippe ôta son tablier de cuir et le pendit à un clou. " Le dîner est bientôt prêt. Acceptes-tu de manger avec nous ?
--Volontiers, répondit Aristote. qui sont tes autres invités ?
--Charès, mon assistant ~" dit le sculpteur en indiquant le garçon maigre à la chevelure clairsemée qui s'affairait autour d'un modèle en bois, armé
d'une gouge. Il salua le
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